Le chèque de trop ou le vertige de l’intransigeance et de l’absurde

LETTRE OUVERTE. Comme chaque année, je rejoins pendant quelques temps mon conjoint sur son lieu de travail à l’étranger mais reviens comme tout ‘’early bird’’ chez moi au printemps.

Comme toute bonne citoyenne, je m’acquitte pendant mon absence de mes devoirs, règle mes factures, déclare mes revenus, le tout en utilisant les technologies modernes.

L’unique institution pour laquelle j’utilise mon chéquier est la Municipalité de Pierreville afin de m’acquitter des taxes municipales, seule option possible. Je fais donc UN chèque par an et procède tel qu’exigé, me pressant de l’envoyer dès réception de la facture, redoutant d’éventuels frais de retard, n’étant pas assurée que le cachet de la poste fasse foi pour la mairie.

Mais cette année, j’ai commis une erreur. J’ai oublié que j’avais ouvert un autre compte (dans la même banque) et que le chèque adressé concernait le compte que j’avais fermé. Mon chèque fut donc refusé. Jusqu’ici, tout semble normal.

Mais là débute cette déplorable histoire. Je reçois tout d’abord, sans autre forme de procès, une facture de 75$ (c’est cher mais c’est le règlement à Pierreville) pour chèque retourné, plus des pénalités de retard applicables sur le premier tiers (j’avais envoyé le règlement annuel.) D’autres municipalités compréhensives avaient pourtant accordé un délai de paiement en raison des circonstances exceptionnelles dues au Covid.

Réalisant la source de mon erreur, j’ai tenté d’expliquer le problème, demandé un peu de compréhension étant donné que je n’avais jamais failli à ce devoir. Refus catégorique ! C’est Le Règlement ! Le tout validé lors d’une réunion du Conseil Municipal.

Je rappelle au passage que depuis l’an passé, la crise du Coronavirus a rendu tout retour au pays incertain. Pour ma part, aucun vol n’était programmé depuis ma destination et le séjour de 3 nuits d’hôtel (estimé à 2000$) était maintenu. Ceci m’empêchait donc de régler le problème en personne, à Pierreville.

Le moyen de m’acquitter des taxes (et de l’amende) demeurant, n’ayant toujours pas de chéquier, j’ai de nouveau demandé que l’on me communique les coordonnées bancaires de la Municipalité pour effectuer un virement. Refus catégorique sous prétexte que ma banque chargeait trop de frais (75$ peut-être ?) Paiement par Carte bancaire également refusé.

Que pouvais-je faire alors devant leur refus obstiné d’accepter les outils modernes existants en ce XXIè, et si je me souviens bien, déjà largement répandus au siècle précédent ?

La Municipalité me proposait alors de trouver quelqu’un de confiance qui pourrait régler à ma place ! Évidemment ! Mais comment envoyer le montant à cette personne (qui fort heureusement existe) ? Très simple en réalité : je lui ai adressé un virement Interac. Ce fût instantané.

Après de longues péripéties et échanges de courriels, j’ai finalement réussi (!) à payer les taxes ainsi que la facture de 75$ qui avait légèrement été engraissée (augmentant pendant les pourparlers). J’avais au moins la preuve qu’il y avait bien des êtres humains derrière ce  Règlement.

Aujourd’hui, mon courroux demeure devant une telle attitude et je n’ai que mes mots pour dénoncer l’archaïsme de telles méthodes, l’absurdité de tant d’intransigeance de la part du Conseil Municipal (mairesse par intérim et conseillers concernés) et employée décisionnaire qui se réfugient derrière le Règlement tel le bastion de leur toute puissance !

Leur rôle ne se limite pas à l’administration comptable de la commune mais leur tout premier Devoir est de servir les citoyens et de les respecter. Ceci devrait constituer l’article 1 du Règlement.

En dernier lieu et non des moindres, je n’ai pas du tout apprécié d’avoir été forcée d’importuner une tierce personne (Merci Marcel !) pour venir à bout de leur aveuglement et je suis désolée des désagréments que cela lui a procuré.

Morale de cette histoire : la crise mondiale que nous subissons tous (ou peut-être pas visiblement) doit nous mener (certains plus que d’autres) à plus de bienveillance et à reconsidérer nos modes de fonctionnement. Je n’ai pas l’espoir que l’on adapte les règlements mais qu’on les applique avec discernement et en bonne intelligence. Ce dernier point s‘applique également à la personne qui est allée se plaindre à la municipalité de ma pelouse trop longue (avant qu’elle ne soit tondue, ce pour quoi j’ai engagé quelqu’un), ce qui m’a valu de la part de la municipalité un rappel du règlement (encore) et la menace sous-jacente d’une amende !

Pour conclure et à titre de dédommagement pour le préjudice causé et cette atteinte à mon intégrité, je demande que ces 79$ soient versés à la Bibliothèque de la Municipalité pour l’achat de livres destinés aux enfants et adolescents de la ville. La culture leur ouvrira l’esprit et leur fournira les outils pour se défendre contre les abus de pouvoir.

Marie-Anne Bouygues

Pierreville – Centre du Québec