Quand Janik devient Azaelle
BÉCANCOUR. Janik Bélanger a étudié en théâtre. Comme plusieurs, elle rêvait d’en faire carrière. Finalement, c’est dans un ring qu’elle vit sa passion pour la scène.
Quelques soirs par mois, elle devient Azaelle. Une rebelle plutôt sans cœur. Méchante. Une transposition de son côté obscur à la puissance mille! Elle affronte d’autres personnages qui frappent tout autant l’imaginaire.
«La lutte, c’est du théâtre extrême», qualifie la jeune femme de Bécancour, qui pratique ce sport depuis quatre ans et demi et qui incarne Azaelle depuis presque aussi longtemps.
«J’ai eu la piqûre lorsque mon ex m’a emmenée voir des shows de lutte, il y a quelques années. À l’époque, je ne savais même pas que la lutte existait! Il s’adonnait à ce sport et un jour, je l’ai accompagné à une pratique. J’avais le goût d’essayer. Depuis, je n’ai jamais arrêté», raconte-t-elle.
«C’est un sport peu commun, poursuit la jeune femme. C’est très physique. Chaque apparition est un dix minutes intense, qui équivaut à une heure d’entraînement.»
Donner et recevoir des coups dans le ring ne lui fait pas peur. Injurier les autres et se faire injurier dans le cadre du spectacle non plus. «En réalité, quand mon personnage est critiqué, ça me stimule, sourit-elle. Il a été conçu pour être détesté. D’ailleurs, j’en ai entendu de toutes les couleurs en raison de ma corpulence! J’encaisse régulièrement des commentaires que la plupart des gens ne pourraient pas endurer dans la vraie vie.»
Métamorphose
Janik disparaît au fur et à mesure que s’étale sur son visage le maquillage qui fait apparaître Azaelle à l’approche d’un match. «Quand je me prépare, j’entre tranquillement dans mon personnage. Puis, quand je suis derrière le rideau et que ma toune part pour mon entrée en scène, je suis complètement une autre personne.»
Azaelle a beau être détestable et faire office de méchante dans la plupart des histoires, elle donne tout de même quelques leçons de vie à Janik. «Par exemple, j’ai vraiment beaucoup développé mon sens de la répartie!, rigole-t-elle. Avant, je n’étais pas capable de répondre aux gens. Maintenant, oui. Mais je dose mes propos, ce qui n’est pas du tout le cas dans le ring, où je me permets aucune retenue et aucune gêne pour faire réagir la foule.»
Un art qui se travaille
Janik est de nature joviale et souriante. Elle travaille dans le public et rien ne laisse deviner a priori qu’un genre de « démon » sommeille en elle. «On a tous un côté plus sombre. J’amplifie le mien à travers Azaelle. Je n’agirais jamais dans la vraie vie comme j’agis dans un ring!», précise-t-elle.
Parce que oui, la lutte c’est de la fiction, du spectacle, du théâtre, des cascades. C’est un art qui s’apprend et qui se peaufine. Janik, elle, s’entraîne une fois par semaine à la FCL (Fédération canadienne de lutte) de Shawinigan, où elle aide aussi l’entraîneur des recrues.
«Ça nous fait revoir la base, ce qui nous permet de nous améliorer constamment. Lors des entraînements réguliers, on révise les techniques et on en apprend des nouvelles. Par exemple, il y a une manière de donner des coups pour ne pas blesser l’adversaire et pour ne pas se blesser non plus. On apprend aussi à recevoir ces coups et à tomber sans douleur. Ça se pratique.»
Janik monte dans le ring devant un public féroce au moins deux soirs par mois, à Shawinigan et à Québec. Pendant un bon moment, elle se rendait aussi en Pennsylvanie avec d’autres lutteuses du Québec pour prendre part à des matchs sur invitation.
En plus de ces engagements, elle participe régulièrement à des démonstrations («spot shows») un peu partout au Québec pour faire la promotion de son sport. Elle sera d’ailleurs à celle prévue ce vendredi 5 avril à 20h au Centre des arts populaires de Nicolet.
«J’aimerais ça que ce gala test devienne régulier. Ça me ferait un endroit de plus où lutter et ce serait tout près de chez nous», indique la résidente du secteur Sainte-Angèle-de-Laval.
Invitée au gala Femmes fatales 22
Le 4 mai prochain, la jeune femme prendra aussi part à un imposant gala de lutte entièrement féminin à Québec. Femmes fatales 22 réunira une trentaine de lutteuses de la province et des États-Unis. Les douze Québécoises invitées s’affronteront dans ce qu’on appelle une Bataille royale.
«Nous serons toutes dans le ring en même temps. Le but, c’est d’éliminer ses adversaires une à une en les passant par-dessus le troisième câble [leurs pieds doivent également toucher le sol]. C’est exigeant parce qu’on doit toujours être en mouvement», explique Janik.
La gagnante [déterminée à l’avance à l’interne mais inconnue du public, précisons-le] méritera sa place sur une carte spéciale.
«Que l’on gagne ou l’on perde, ça n’a pas d’importance. On veut offrir le meilleur de notre personnage peu importe le contexte pour donner un bon spectacle à la foule», précise Janik.
Les meilleures performances se font d’ailleurs devant un public bruyant, voire hargneux. La lutteuse de 26 ans espère que ce sera le cas à Nicolet, vendredi, pour que les non-initiés qui y seront puissent apprécier le spectacle à sa juste valeur.