Quand deux petites secondes changent toute une vie

PORTRAIT. Deux petites secondes. C’est le temps que ça a pris pour que la vie de Camille René bascule, le 3 février dernier.

Alors qu’elle tente de déprendre sa motoneige dans le stationnement d’une amie, une mauvaise manœuvre l’éjecte du véhicule. La chute qui suit sectionne sa colonne vertébrale. Son cou encaisse un choc terrible et quatre de ses côtes se fracturent.

Son amie, première répondante, lui apporte les premiers soins. Camille veut se lever, mais elle est incapable de bouger les jambes. «J’ai paniqué», se souvient-elle.

Quand l’ambulance arrive, l’adrénaline tombe. Une douleur vive s’abat sur elle. Elle est transportée dans cet état au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke.

«J’ai eu une opération au dos qui a duré huit heures. On m’a installé une plaque de métal dans la colonne pour relier les bouts sectionnés», raconte Camille.

«Quand je me suis réveillée, j’étais entubée. Je ne pouvais pas parler. J’étais inconfortable et effrayée.»

Dans les heures et les jours qui suivent, elle prend la pleine mesure de la situation. On lui annonce que les chances qu’elle puisse marcher de nouveau un jour se situent à moins de 1%. C’était le lendemain de sa fête; le 8 février.

Réadaptation

«Au début, je me disais que je ne pourrais jamais vivre sans mes jambes. Finalement, avec la réadaptation, c’est faisable»

– Camille René

Puis, la réadaptation a commencé. Elle s’est déroulée à Montréal, sur une période de trois mois environ.

La jeune femme de 23 ans a vite réalisé que bien des choses avaient changé dans son corps. «J’ai perdu l’usage de mes jambes, mais j’ai aussi plein d’autres conséquences. Comme je suis paralysée à partir du bas de la poitrine, ma façon de respirer est maintenant différente. Il me reste une seule rangée de muscles abdominaux fonctionnels. En conséquence, je ne peux pas me soulever ni me tenir assise sans être appuyée. J’en suis incapable. Ma vessie et mes intestins sont affectés. Je dois les vider aux trois ou quatre heures pour ne pas m’intoxiquer», énumère-t-elle.

«Au début, je me disais que je ne pourrais jamais vivre sans mes jambes. Finalement, avec la réadaptation, c’est faisable. J’ai fait de gros progrès.»

Le sport, cet exutoire

La jeune femme de 23 ans est sortie du centre de réadaptation le 12 avril. Peu de temps avant, elle avait accordé une entrevue à la télé au cours de laquelle elle avait mentionné chercher des projets auxquels s’accrocher.

«Sylvie Trudel, la conjointe d’Eric Van Den Eynde (entraîneur de cyclisme renommé) a été touchée par mon histoire. Elle m’a contactée par Facebook et m’a dit qu’elle aimait mon attitude. Elle m’a offert d’essayer le vélo à main», raconte Camille.

Une semaine après son retour à la maison, elle a fait son premier essai. Depuis, elle s’entraîne cinq fois par semaine. Elle a aussi la chance, depuis trois mois, de bénéficier des judicieux conseils de M. Van Den Eynde.

Ce sport est un excellent exutoire à ses yeux: «Ça tombe à un bon moment parce qu’en sortant du centre de réadaptation, j’avais peur. Je ne savais pas ce qui m’attendait, ni comment j’affronterais la suite des choses», confie celle qui s’adonne aussi au basketball, à la nage et à l’entraînement en salle.

Dernièrement, la jeune femme participait à une tranche de la Coupe du monde Paracyclisme Route à Baie-Comeau. C’était sa deuxième compétition de l’été après les Championnats canadiens Route tenus à Saguenay. Juste après, elle prenait part aux Championnats québécois de paracyclisme 2018 à Victoriaville.

La suite

Ces compétitions, elle les fait par plaisir, et parce que ça lui permet d’apprivoiser sa nouvelle condition. «Je vais continuer à m’entraîner dans les mois qui viennent. On verra l’été prochain si je continue», mentionne celle qui envisage aussi reprendre ses études.

«Je suis actuellement en année de transition. J’ai quelques deuils à faire. Avant l’accident, je voulais travailler en milieu carcéral. Je dois maintenant changer de branche. Je consulte un orienteur, d’ailleurs.»

D’ici à ce que tout se place, Camille demeure chez ses parents à Saint-Léonard-d’Aston. Elle y trouve un soutien inconditionnel qui lui fait du bien. «Je suis chanceuse: j’ai une bonne famille et de bons amis. Ça m’aide énormément dans ma réadaptation», conclut cette cadette d’une famille de quatre enfants.