Le dernier coup de départ de Richard Lebeau

SAINT-LÉONARD-D’ASTON. Quelque part en septembre ou en octobre, encore bien droit au centre de l’allée, la balle que Richard Lebeau propulsera du départ du terrain de golf qu’il a fait naître d’une île délaissée franchira une bonne distance. Du haut de sa sagesse de 80 ans, le grand homme accrochera par le fait même sa pelle et son râteau après 26 saisons d’implication. Retour sur un pan d’histoire sportive de Saint-Léonard-d’Aston et sur un dévouement hors du commun.

«En 1991, j’avais décidé de prendre une année sabbatique.  Et voilà que par un bel après-midi d’automne, je regardais la télévision. Tout à fait par hasard, je suis tombé sur un reportage concernant un éleveur de moutons ontarien. Ce monsieur un peu farfelu a voulu augmenter ses revenus et pour cela, il a décidé de transformer une partie de ses terres en un terrain de golf particulier. Notre homme a pris quelques mesures pour déterminer l’emplacement des trous puis il a réussi à installer des fanions dans de vieux contenants de peinture. Les joueurs payaient 5$ pour s’amuser et il en venait presque tous les beaux jours. Le lien entre ce reportage et l’idée de faire quelque chose de semblable à Saint-Léonard-d’Aston a très vite fait son chemin dans mon esprit», explique un Richard Lebeau qui descendra rapidement sur l’île aux Noix pour une séance de visualisation qui marquera l’histoire.

«Le plan d’aménagement s’est imposé de lui-même. Une normale 4 au centre puis trois normales 3 avant de terminer par une longue normale 5 sur la côte ouest de l’île», précise celui qui parlera rapidement de son idée à son ami Jean-Paul Provencher.  «Nous décidons de marcher toute l’île qui était recouverte de neige à ce moment- là. Mais lorsque nous  déposions nos pieds sur le sol, nous avions une sensation très nette de marcher sur des roches en très grand nombre. Heureusement, il s’est avéré plus tard qu’il s’agissait simplement de mottes de terre gelées. Satisfaits de cette première évaluation, nous avons décidé que nous irions de l’avant avec ce projet sans connaître tout le travail qui nous attendait ni toutes les transformations que nous allions imposer au paysage», dit-il en reconnaissant, avec le recul, que c’était un projet de «fou»!

Il faut savoir qu’à l’époque, l’île située sur la rivière Nicolet avait été laissée à l’abandon depuis des années. Rien pour aider, sa pointe sud servait de dépotoir.

Après une première journée de travail marquée par un feu d’herbe, une multitude de méthodes ingénieuses pour couper le gazon de cet immense terrain et des heures impossibles à comptabiliser, tout était en place pour l’ouverture du Golf Le Pro. C’est justement le fils de Jean-Paul Provencher, Michel, qui aura l’idée du nom: «Le» pour Lebeau et «Pro» pour Provencher.

«Tout au long de ces 26 années, nous avons souvent eu besoin d’aide de toute sorte. Jamais nos demandes n’ont été refusées et c’est avec gratitude que je rends hommage à la générosité de nos  bienfaiteurs. Il serait trop risqué d’en faire la liste, car il serait malheureux d’oublier certains noms, mais il serait impardonnable de ne pas faire mention de Jean-Paul car sans lui, ce grand projet n’aurait jamais vu le jour», confie-t-il avec émotions.

«Le terrain de golf Le Pro a été pour nous une aventure assez particulière dans laquelle nous avons investi beaucoup d’efforts qui ont résulté en un succès certain, car plusieurs de nos visiteurs nous manifestaient leur admiration pour la qualité et la beauté du terrain. Il est à souhaiter que l’état actuel de l’île soit sauvegardé», exprime Richard Lebeau. «Avec le recul, cela a été de l’ouvrage, mais je ne regrette pas. On s’est amusé pareil.»