Premier match dans la LNH: Matthieu Descoteaux se souvient

HOCKEY. L’imminence des débuts officiels du Bécancourois Samuel Montembeault dans la Ligue nationale de hockey n’est pas sans rappeler d’heureux souvenirs à Matthieu Descoteaux qui tenait à lui lancer le message suivant :

«Embarque sur la glace comme quand tu étais ti-gars à Bécancour! Aie du fun, Sam! Ta première game, tu vas t’en souvenir toute ta vie. Tu es rendu là. Tu as travaillé fort. Ce n’est pas un tirage au sort. Tu mérites d’être là!»

Premier et unique joueur de la MRC de Nicolet-Yamaska avoir atteint le sommet du hockey professionnel à ce jour, Matthieu Descoteaux a disputé sa première partie le 11 février 2001 dans l’uniforme des Canadiens de Montréal. Dix-huit ans ont passé et le colosse de Pierreville s’en rappelle comme si c’était hier.

Voici l’entrevue réalisée avec l’homme de 41 ans pour Le Courrier Sud.

 

Stéphane Lévesque: Si je me souviens bien tu as fait ton hockey mineur à Nicolet?

Matthieu Descoteaux: Oui, j’ai joué aussi pour les Draveurs de Francheville. Après, j’ai fait le Midget AAA avec les Estacades. J’ai poursuivi avec les Cataractes de Shawinigan et j’ai terminé mon junior avec Hull. Mon coach était Claude Julien et on a gagné la Coupe Memorial en 1997.

 

SL: Bien que tu aies été un choix de première ronde des Oilers, tu passes beaucoup de temps dans la Ligue américaine. Est-ce que tu développais une certaine frustration de ne pas être rappelé, de ne pas pouvoir réaliser rapidement ton rêve de jouer dans la Ligue nationale?

MD: On se fait un plan de carrière dans notre tête et on se fait dire constamment de prendre ça une saison à la fois. Mais il vient un temps, dans une carrière d’un joueur, où une frustration s’installe si tu n’as pas ta chance de jouer en haut. C’est normal. Au hockey, tu deviens vieux vite. Les jeunes veulent prendre ta place.

 

SL: Quand tu apprends que tu es échangé aux Canadiens, es-tu heureux?

MD: Oui, il y avait beaucoup plus de points positifs que de côtés négatifs. Juste au point de vue de l’organisation, c’était mieux. En plus, le club-école des Canadiens était maintenant à Québec avec les Citadelles. C’était comme jouer chez nous. J’ai voulu faire mes preuves rapidement. J’ai eu une très bonne saison. J’ai même été invité à la partie des étoiles de la Ligue américaine.

 

SL: Arrive le rappel par le gros club. Comment ça s’est déroulé?

MD: Dans ce temps-là, on n’était pas à l’heure des médias sociaux. Ce n’est pas mon agent qui m’a appelé sur mon cellulaire, car je n’avais même pas de cellulaire! Sur la route, avec les Citadelles, j’ai vu le trainer sortir ma poche de la chambre. Il me regarde avec un sourire et me dit: «Matthieu, tu t’en vas avec Montréal». C’est lui qui me l’a annoncé. Mon premier match va être sur la route, contre Buffalo.

 

SL: As-tu appelé tes parents?

MD: Certainement! J’ai appelé de ma chambre d’hôtel à Providence. C’est quelque chose de gros quand tu as le call pour la première fois. En plus, quand j’étais jeune, j’étais «Canadiens». Grandissant dans les années 80, ç’a été marquant pour moi, cette équipe-là! Je l’ai vue gagner la Coupe de 1986.

 

SL: Tu embarques sur la glace à Buffalo. Au premier coup de patin, à quoi tu pensais?

MD: Le stress s’installe dès que tu entres dans la chambre. Ce n’est pas des gars avec qui tu es habitué de jaser qui sont là. Ce n’est pas toi qui décides où tu t’assois dans le vestiaire. Tu arrives et ton stock est déjà placé. Moi, j’étais à côté de Jeff Hackett, le gardien de but. Il était assez spécial. Carrément «cinglé» même quand ça allait bien! Il ne faut pas que tu lui parles avant la game. Stéphane Robidas m’avait averti: «Ne passe pas par-dessus son bâton, ne touche pas à son stock». J’étais un peu stressé.

 

SL: Après la partie, le stress passe, il y a une baisse de la tension. Est-ce que tu t’es dit: «Je l’ai enfin, ma première partie dans la Ligue nationale»?

MD: Oui. En plus, on avait gagné, ça avait bien été. J’avais eu mon premier point à mon premier match. Les gars m’avaient tiré la pipe avec ça dans la chambre. C’était beau, c’était un beau moment. Après la game, c’est Saku Koivu qui m’a passé son cellulaire pour que j’appelle mes parents à la maison, à Pierreville! Ils avaient vu la partie à la TV.

J’étais content d’y être arrivé, mais en même temps, c’était une suite logique. Dans ma tête, ça ne se finira pas là. Oui, je suis rendu là parce que j’ai fait des bonnes choses et que j’ai travaillé. Ce n’est pas de la chance!

 

SL: Dix-huit ans plus tard, tu y penses souvent?

MD: Oui j’y repense. Sur les cinq games que j’ai jouées avec les Canadiens, j’en ai joué quatre sur la route. Seulement une à Montréal. C’est celle-là dont je me souviens le plus.

 

SL: Parce que tes parents étaient là?

MD: Personne n’était là! J’explique. J’étais retourné avec les Citadelles dans la Ligue américaine et on avait eu une pratique de patin punitive à Québec le matin. Deux heures de temps, on était verts dans la chambre. Le coach m’appelle dans son bureau avec Jim Campbell: «Les Canadiens viennent de faire des échanges. Ils ont besoin de joueurs pour le warm up. Vous ne devriez pas jouer». On est monté en auto à Montréal, on s’est pris un McDo sur le bord de la 20. Deux cheese en conduisant. On arrive au Centre Molson, on s’habille. J’appelle mon père André en lui disant que j’avais été rappelé, mais de ne pas dépenser 400$ de billets, car je ne jouerais pas. Finalement, j’ai joué juste sur l’adrénaline parce que je n’avais pas de jambes en raison de mon entrainement du matin à Québec. J’ai marqué et j’ai eu la troisième étoile!

 

À propos de Matthieu Descoteaux

Originaire de Pierreville, Matthieu Descoteaux est né le 23 septembre 1977. Choix de 1ere ronde des Oilers d’Edmonton, il est le 19e choix au total lors du repêchage de 1996. Après trois ans dans la Ligue américaine, il est échangé aux Canadiens de Montréal en compagnie de Christian Laflamme le 9 mars 2000 en retour d’Igor Ulanov et d’Alain Nasreddine. Il fait ses débuts avec les Glorieux le 11 février 2001 contre les Sabres de Buffalo. Il inscrit une passe. Le 21 février 2001, contre Dan Cloutier des Canucks de Vancouver, il inscrit un but. Matthieu Descoteaux dispute trois autres parties avec le Tricolore lors de cette saison. Sa carrière se poursuivra en Europe pendant quelques saisons. Elle se conclura en 2009 dans la Ligue nord-américaine de hockey.