Ces violences sexuelles dont on ne parle pas

VIOLENCES. «Les agressions sexuelles ne se limitent pas au monde très médiatisé des Rozon, Salvail, Charest. Ce n’est pas parce qu’elle est invisible, passée sous silence, que la violence sexuelle est inexistante chez les aînées, les personnes ayant des limitations fonctionnelles et dans les milieux de travail», a expliqué Renée Levasseur, responsable d’un projet de sensibilisation menée par la Table de concertation du mouvement des femmes Centre-du-Québec (TCMFCQ).

La Table a mis à profit tous les moyens dont elle disposait pour lancer une campagne visant non pas à inciter les victimes à se ruer «au poste de police» afin de dénoncer leur agresseur, mais à sensibiliser à ce qu’est la violence sexuelle et à inciter les victimes à demander de l’aide.

Grâce à une subvention du Secrétariat à la condition féminine, la TCMFCQ a ainsi confié à Benoît Jean le mandat de réaliser trois courtes vidéos, chacune étant adaptée à la clientèle visée. Le masque blanc sert de fil conducteur au message, a expliqué Mme Levasseur. «On se cache derrière le masque de la honte, de la peur, du silence, de l’indifférence.» De la connivence aussi puisque dans les milieux de travail, il n’est pas rare que des collègues ou des employeurs préfèrent fermer les yeux sur ce qu’ils ont vu.

Les vidéos cherchent à inciter les victimes de violence sexuelle à se confier et à aller vers les ressources. Outre les vidéos, la Table a également produit un dépliant informatif, un signet et une «carte d’affaires» rappelant que l’agression sexuelle est un rapport imposé et posé, avec ou sans contact physique, sans le consentement des personnes.

Si la violence sexuelle menace une femme sur dix, c’est trois sur dix du côté des femmes ayant une limitation fonctionnelle. Chez elles, entre les soins et la caresse non désirée, la ligne est parfois mince, reconnaît Marylène Morin, directrice générale de l’organisme Handicap Action Autonomie. Confier leur malaise en parlant de ce qu’elles vivent leur fait craindre de perdre des services ou du support si elles se trouvent à domicile.

Pour réaliser les vidéos, trouver les mots appropriés pour porter le message, la Table a ainsi fait appel à des organismes, comme la FADOQ, Handicap Action Autonomie, la Chambre de commerce et d’industrie des Bois-Francs et de L’Érable, Brio-RH et la CSN.

«Cela reste un défi de parler de violence sexuelle aux aînés», a admis la directrice générale du CALACS, Lise Setlakwe, qui fait partie des partenaires de la Table. De la FADOQ, Sylvie Roberge dit qu’effectivement, la violence sexuelle est un sujet encore plus tabou chez les aînés.

La violence sexuelle est «inconcevable», s’est exclamée Josée Desharnais, directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie. Elle a indiqué que la Chambre allait promouvoir la campagne de sensibilisation de la Table dans les différents milieux de travail et promouvoir aussi la trousse «Ici, on s’engage contre la violence» lancée tout récemment au Centre-du-Québec.

La trousse comprend un guide pour les gestionnaires et une proposition visant à se doter d’une politique contre la violence et le harcèlement psychologique et sexuel au sein de leur entreprise ou institution. Y est suggéré que dans chaque milieu soit nommé un «agent de prévention», une personne de confiance, habile à accueillir les plaintes.

Le mouvement #metoo a incité de nombreuses victimes à dénoncer les actes dont elles étaient – ou avaient été victimes -. Au CALACS, Lise Setlakwe a indiqué que le mouvement avait augmenté de 43% la clientèle de l’organisme.

La TCMFCQ que dirige Francyne Ducharme veut pousser sa campagne jusque dans les organisations, cherchant à se faire inviter pour parler de harcèlement et de violence, les vidéos devant servir d’amorce aux échanges. Un guide a aussi été produit pour que, dans les organismes, les intervenants et intervenantes soient en mesure de mieux accueillir les dévoilements.

On peut obtenir plus d’informations auprès de la Table (819 758-8282 ou sante@femmescentreduquebec.qc.ca).