Un tueur en série de Winnipeg sera entendu par un jury, annonce le juge du procès

WINNIPEG — Un juge a décidé que le procès de l’homme accusé du meurtre de quatre femmes à Winnipeg se déroulera devant un jury. La défense voulait plutôt que son client soit entendu par un juge seulement.

Les avocats de Jeremy Skibicki ont déclaré au tribunal cette semaine que le fait de procéder à la constitution d’un jury porterait atteinte à son droit à un procès équitable en raison de l’importante publicité préalable aux procédures judiciaires. La défense craint que les deux années de couverture médiatique biaisent les jurés.

Le juge en chef de la Cour du Banc du Roi du Manitoba, Glenn Joyal, qui supervise le procès, a statué vendredi que les jurés, tout comme les juges, sont capables de rester impartiaux lorsqu’on leur donne suffisamment de directives.

«Le système juridique canadien part de la présomption selon laquelle, avec des instructions appropriées du juge, les jurés sont effectivement capables de mettre de côté leurs opinions antérieures et d’agir de manière impartiale», a-t-il soutenu.

«L’impartialité n’exige pas que l’esprit du juré soit une page vierge ni qu’il abandonne toutes ses expériences de vie antérieures aux fins de la délibération», a-t-il ajouté. 

Le jury doit entendre les déclarations préliminaires mercredi prochain.

M. Skibicki, âgé de 37 ans, a plaidé non coupable à quatre chefs d’accusation de meurtre au premier degré.

Les restes partiels du corps de Rebecca Contois ont été retrouvés dans une poubelle et dans une décharge municipale en 2022. La police pense que les restes de Morgan Harris et de Marcedes Myran sont dans une autre décharge privée en dehors de la ville.

L’emplacement du corps d’une femme non identifiée que des dirigeants autochtones nomment Mashkode Bizhiki’ikwe, ou Buffalo Woman, est cependant inconnu.

Des manifestations à l’échelle nationale ont eu lieu après que la police a annoncé qu’elle ne fouillerait pas la décharge de Prairie Green à la recherche de Mmes Harris et Myran, mais le mois dernier, les gouvernements fédéral et manitobain ont injecté 40 millions $ dans les recherches.

Une psychologue établie aux États-Unis ayant étudié les préjugés des jurés a dit au tribunal cette semaine qu’elle avait examiné des centaines d’articles médiatiques sur les meurtres et découvert que beaucoup utilisaient un langage chargé d’émotion.

Christine Ruva, du campus Sarasota-Manatee de l’Université du sud de la Floride, estime qu’une couverture médiatique persistante crée un parti pris implicite chez les jurés. Si une personne est soumise à seulement 10 articles sur une affaire pénale, elle devient partiale et il est presque impossible de renverser cette situation, selon cette spécialiste.

Les procureurs de la Couronne ont cependant contesté les recherches de Mme Ruva, qui se concentrent sur le système judiciaire américain. 

Le juge a fait écho à ces préoccupations, soulignant que les jurés sélectionnés la semaine dernière ont été rigoureusement interrogés et ont reçu des instructions claires.

Le tribunal a appris qu’une poignée de personnes choisies n’avaient jamais entendu parler de l’affaire et de l’accusé.

Léonard Tailleur, l’un des avocats de M. Skibicki, a déclaré aux journalistes que la décision du juge ne change pas sa façon d’aborder le procès. 

La défense a indiqué au tribunal qu’elle envisageait de faire valoir que M. Skibicki n’était pas criminellement responsable des décès en raison de ses problèmes de santé mentale.

Un verdict de non-responsabilité criminelle signifie qu’une personne était incapable de comprendre la nature et l’impact de ses actes à cause d’un trouble mental. L’individu est détenu dans un hôpital jusqu’à ce qu’une commission détermine qu’il ne constitue plus une menace pour le public.