«Québec solidaire doit devenir un parti de gouvernement», dit Nadeau-Dubois

QUÉBEC — Appuyé à l’unanimité par les élus de son caucus, le chef parlementaire et co-porte-parole masculin de Québec solidaire (QS), Gabriel Nadeau-Dubois, a posé un ultimatum mercredi: une refonte complète du programme et de la structure de QS qui «doit devenir un parti de gouvernement».

Il avait pourtant formulé cet enjeu en 2018, mais à la suite de la démission fracassante lundi de la co-porte-parole féminine de QS, Émilise Lessard-Therrien, il réclame des changements qui seront «déterminants» pour son avenir dans le parti.

Partira-t-il si les réformes sont refusées par les membres au prochain conseil général prévu à Saguenay à la fin du mois ou encore lors des instances de novembre? 

«Ce n’est pas ce que je dis», mais «je veux dire aux membres de mon parti où je loge», a-t-il répondu dans une longue mêlée de presse à l’Assemblée nationale, après une réunion avec ses collègues députés.

Au cours des derniers jours, il a dit avoir mis toutes les options sur la table, dont la démission, mais qu’il «souhaite continuer» et a obtenu le vote unanime des membres du caucus pour réaliser trois chantiers: un programme plus «pragmatique», une structure allégée et une déclaration visant les régions pour élargir la base électorale.   

Il a reconnu que QS traverse des «moments difficiles», un «plafonnement» dans les sondages, mais il est temps de trancher sinon la formation de gauche sera replongée dans d’autres conflits.  

«Souhaitons-nous que Québec solidaire devienne un parti de gouvernement, oui ou non?», a-t-il lancé. 

Il a assuré ainsi qu’il ne tentait pas de «prêter des intentions» à Mme Lessard-Therrien et a ajouté qu’après avoir vu beaucoup de débats dans les médias sociaux sur les personnalités, il faut ramener le débat sur des bases politiques.  

«C’est la question à laquelle les membres de Québec solidaire devront répondre. Il est temps qu’on fasse ces choix-là. Tant et aussi longtemps qu’on ne tranche pas ces questions-là, ça crée des frustrations, ça crée de la division.»

M. Nadeau-Dubois avait pourtant déjà affirmé en 2018 qu’«on ne fonde pas un parti politique pour organiser des épluchettes de blé d’Inde, on fonde un parti parce qu’on souhaite être au gouvernement», mais cette fois, il affirme «avoir la responsabilité d’être clair».   

Co-porte-parole

La formule de deux co-porte-parole, masculin et féminin, doit notamment être «modernisée» en précisant les rôles, la répartition du pouvoir, qui est responsable de quoi, parce qu’il y a «des flous qui créent de la confusion et même de la frustration», a-t-il plaidé. 

Dans son message de démission diffusé sur les réseaux sociaux, Mme Lessard-Therrien laissait entendre que la direction du parti était noyautée par l’entourage de M. Nadeau-Dubois et qu’elle avait du mal à y trouver son «espace».

Le chef parlementaire a laissé entendre qu’il n’avait pas l’intention de modifier sa garde rapprochée et que c’était lui le responsable à qui il fallait adresser des critiques. 

Parmi les chantiers qu’il veut voir aboutir: élaguer le programme qui remonte à 2006, mais il ne s’agit pas de le recentrer, a-t-il assuré.

Il a appelé les membres à adopter, au conseil général à la fin du mois à Saguenay, une nouvelle «déclaration», des positions pour séduire les régions afin de proposer une «offre politique plus convaincante» aux élections de 2026. Mais il n’a pas détaillé le contenu de cette proposition. 

Enfin, aux instances de novembre, il demande l’adoption de statuts révisés pour simplifier la structure «trop lourde» qui date du temps où QS n’avait même pas de députés.   

«C’est aux membres de trancher», a-t-il résumé. 

«Moi, ma responsabilité, c’est de dire quelle est ma vision, et d’inviter les membres à participer à ce débat.» 

La démission d’Émilise Lessard-Therrien n’est pas le premier coup porté à l’autorité de M. Nadeau-Dubois en l’espace de quelques mois.

Dans un livre paru en novembre dernier, l’ancienne députée Catherine Dorion avait écorché aussi le chef parlementaire de QS. 

«Je pense que j’ai fait preuve d’autocritique», a-t-il soutenu jeudi, en assurant qu’il tente de s’améliorer constamment.  

Dans son message de démission, Mme Lessard-Therrien a dit qu’elle voulait «essayer d’insuffler un nouveau souffle au parti, ou enfin, un souffle qu’il possédait avant», mais que sa vision s’est «heurtée à un blocage organisationnel».

Elle a écrit: «je m’y suis sentie bien seule et j’ai eu du mal à y trouver mon espace. Les différentes visions se sont entrechoquées, me paraissant difficilement compatibles, grafignant au passage mes motivations profondes à être co-porte-parole de Québec solidaire.»

Ancienne députée de Rouyn-Noranda-Témiscamingue battue au scrutin de 2022, Mme Lessard-Therrien a été élue à la fin de novembre co-porte-parole féminine par une courte marge au deuxième tour face à la députée Ruba Ghazal. 

Elle avait à coeur d’enraciner son parti dans les régions et en avait fait une mission, alors que la majorité des sièges de QS se trouvent sur l’île de Montréal et que le parti plafonne bien en dessous de 20 % dans les intentions de vote, sondage après sondage.