ABI: des lockoutés se racontent

BÉCANCOUR. Les lockoutés se serrent les coudes pour passer au travers le lock-out qui dure depuis bientôt dix mois. Quelques-uns ont accepté de témoigner de ce qu’ils font depuis le début du lockout.

Plusieurs s’impliquent pour la cause qu’ils défendent, mais il y en a aussi qui sont là pour aider les autres ou qui doivent prendre les bouchées doubles pour arriver à boucler leur budget.

Daniel Desrosiers a rassemblé récemment un groupe d’une quarantaine de donneurs pour une collecte de sang d’Héma-Québec à Saint-Grégoire. Il se promène un peu partout dans la province pour aller chercher des appuis.«Je présente le conflit à travers le Québec dans des assemblées syndicales, peu importe l’allégeance, pour aller chercher des supports monétaires et moraux, raconte celui qui travaille normalement à l’électrolyse. Ça permet de créer le mouvement de solidarité qui fait qu’on est encore debout», soutient-il.

Pascal Pilotte-Thiffault, lui aussi un travailleur de l’électrolyse, agit comme délégué social durant le conflit. Il s’occupe d’aider ses confrères et consoeurs  qui souhaitent réintégrer le marché du travail. «Je donne un coup de main pour ceux qui voudraient faire leur curriculum vitae pour les aider à passer au travers du conflit. Ils ont des bouches à nourrir et ils ont besoin d’un petit ajustement. Il y en a de plus en plus, mais ce n’est pas quelque chose qui est majoritaire», raconte-t-il.

«Le moral est quand même bon, mais c’est certain que ce n’est pas une période qui est facile pour personne.»

– Cindy Ouellet-Lamy

«Je suis aussi éducateur spécialisé et je donne du temps dans les écoles primaires, continue le lockouté. Je fais mon possible pour aider les gens autour de moi, comme ma belle-famille, pour le bois de chauffage. J’aide comme je peux. J’occupe mon temps.»

Cindy Ouellet-Lamy, qui travaille à l’électrolyse, est elle aussi déléguée sociale pendant ce conflit. «On fait ni plus ni moins que du travail de rue sur les lignes de piquetage. On visite les équipes pour discuter avec les gars des difficultés que le conflit apportent dans leur vie», explique-t-elle.

«Malheureusement, pour certain, il y a eu une augmentation de consommation. Des gens qui vivaient déjà des divorces et des difficultés familiales avant le conflit. Ce n’est rien pour améliorer. On essaie donc de donner un coup de main de ce côté-là.

Le moral est quand même bon, mais c’est certain que ce n’est pas une période qui est facile pour personne. Ce n’est pas tout le monde qui a la même capacité à s’occuper. Parce que les gens en général dans la société apporte beaucoup d’importance à leur travail. C’est une façon de se valoriser. Ça donne une difficulté, mais la majorité se sont réorganisé, mais après neuf mois on est tanné en …»

Martine Gauthier en était à son 79e don de sang.
(Photo courtoisie – Daniel Mallette)

Martine Gauthier, qui en était à son 79e don de sang, est parmi les nombreux lockoutés qui ont dû se trouver un autre travail pour rencontrer ses paiements avec la moitié de sa paie. Depuis le début du conflit, elle a fait du piquetage, pris part à toutes les manifestations en plus de combler des postes dans différentes entreprises.

«Qu’on ne vienne pas me dire qu’il n’y ait pas d’ouvrage. Il y en a partout. J’ai toutes mes jobs en cinq minutes. C’est ma troisième depuis le début du lockout et je les ai de même (en claquant des doigts). Il manque de personnel partout», indique celle qui travaille elle aussi à l’électrolyse.

«Je suis payé 13$ de l’heure et j’inspecte des cochons. C’est une chaîne. Ça roule. Je suis capable de faire autre chose. Il y en a beaucoup qui travaille, et ils ne travaillent pas dans une aluminerie, continue-t-elle. Il y en a qui s’exile dans le Nord pendant deux mois. Les jobs que personnes veut, c’est nous autres qui les font. Les entreprises doivent être contentes qu’on soit en lockout (rire).»

En plus de s’impliquer dans le syndicat, Janie Pelletier, qui était à l’approvisionnement, en profite quant à elle pour passer plus de temps en famille. «J’ai deux petites filles et on fait notre possible. Parce que la vie nous coûte plus cher. On popote plus. On essaie de s’occuper du mieux qu’on peut», témoigne-t-elle.