Vivre sans épicerie: une question d’habitude

DOSSIER. Une étude de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) révèle que les municipalités de Lemieux et de Manseau, dans la MRC de Bécancour, sont qualifiées de «désert alimentaire», une expression forte et péjorative, selon les maires.

Du côté de Lemieux, cela fait une trentaine d’années qu’il n’y a ni dépanneur ni épicerie. Le maire Jean-Louis Belisle affirme que les habitudes des gens ont tout simplement été prises autrement.

«Certains vont à Gentilly, mais la grande majorité va à Victoriaville, Princeville ou Trois-Rivières. Les gens utilisent aussi beaucoup le dépanneur de Saint-Sylvère.»

En tant que maire de Lemieux, M. Belisle soutient que cette situation ne semble pas agacer les résidents.

«Ce n’est pas un manque ou besoin qui est manifesté et ça ne semble pas être un frein aux déménagements. Les gens sont habitués de prévoir leurs achats», croit-il.

Selon lui, c’est une question d’habitude.

«Ça fait tellement d’années que c’est comme ça. Ça fait partie de la vie et ce n’est pas un drame. C’est vrai que ce serait plaisant d’avoir un dépanneur avec un petit café, mais dans la logique d’aujourd’hui, c’est impossible d’y penser», soutient le premier magistrat de la municipalité de 330 habitants.

En effet, il juge que si Lemieux avait un dépanneur, c’est celui de Sainte-Marie-de-Blandford qui fermerait ses portes. «On est très proche, à environ 6 km de distance. Les deux ne survivraient pas.»

Un dépanneur rénové

À Manseau, la réalité est un peu différente puisque la municipalité compte un important dépanneur qui a d’ailleurs récemment investi une somme de 100 000$ pour se mettre au goût du jour.

Ce commerce offre notamment des fruits, des légumes et de la viande.

«Ce n’est pas en quantité industrielle, évidemment, mais on peut facilement se débrouiller avec ce qu’on y trouve. Il y a aussi plusieurs mets en portion individuelle. Les gens sont habitués comme ça», exprime le maire Guy St-Pierre.

Les Mansois ont par contre l’habitude de faire leur épicerie à Deschaillons ou Victoriaville. Cela dit, «personne à Manseau ne peut se plaindre de ne pas pouvoir bien se nourrir», lance M. St-Pierre, reconnaissant toutefois que tout le monde en veut toujours plus et que «Manseau ne fait pas exception».

À son avis, la situation actuelle a été causée par les grands centres qui ont fait fermer les petits milieux. Il estime que les changements d’habitude des gens, comme celle d’aller acheter ailleurs, sont en quelque sorte à l’origine de ce qu’on vit aujourd’hui.

Mais selon lui, la population vieillissante pourrait peut-être faire renverser la vapeur.

«La propriétaire de notre dépanneur m’a dit qu’elle observait un certain regain. La population est vieillissante et ça fait en sorte que ces personnes vont parfois moins à l’extérieur pour faire leurs achats», note le maire.

Mentionnons que des données du Centre intégré universitaire de santé et des services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec (CIUSSSMCQ) incluent Sainte-Gertrude et Sainte-Françoise comme déserts alimentaires, en plus de Manseau et Lemieux.

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