Un sens de l’humour qui rapporte

DOSSIER. Au-delà d’une visibilité inattendue avec un triomphe au dernier gala des Aurore, les capsules humoristiques diffusées sur les médias sociaux depuis un peu plus d’un an ont permis à l’Épicerie Lafond de Nicolet de se démarquer. Regard sur le phénomène!

Bon joueur, le réalisateur et le boucher du commerce situé au centre-ville, Étienne Lafond, s’est rendu dans les studios de Radio-Canada, à Montréal, pour accepter son prix dans la catégorie «Meilleure pire publicité ou vidéo corporative», la seule qui n’avait pas été diffusée une semaine plus tôt lors du gala officiel.

Il a participé au scénario de remise de prix le lundi précédant l’émission. Un court segment de quelques minutes qui a pris environ une heure à tourner et au cours de laquelle il a joué le jeu de Jean-René Dufort et de son équipe! «En embarquant à fond dans ce délire, a-t-il assuré. Ils fonctionnent un peu comme nous, avec beaucoup d’humour.»

Étienne Lafond en a profité pour remercier sa fille, que l’on voit à l’occasion dans les capsules, ainsi que sa conjointe, son équipe et tous les gens de Nicolet avant de «recevoir» son prix en plein visage!

Ceci faisait référence à la séquence qui a retenu l’attention d’Infoman. C’est-à-dire un extrait de la vidéo intitulée «Spécial 2 pour 1» ou «Une tranche de vie chez la famille Roy», dans laquelle on voit Louis Roy recevoir un pain Gadoua en plein visage (voir la vidéo ci-contre).

«Je ne sais pas si c’est pour ça qu’on s’est retrouvé là, mais je me suis fait dire que c’est un ami de Louis Roy qui avait envoyé ça à Infoman. Il voulait qu’il en parle, parce qu’il trouvait ça drôle, raconte Étienne Lafond. Jean-René n’avait pas vu les autres capsules. Il n’était pas vraiment au courant de notre concept. Peut-être que ce sont ses recherchistes.»

Même si le prix n’est pas nécessairement des plus prestigieux, Étienne Lafond l’a pris avec un grain de sel et a accepté toute la visibilité qui venait avec la diffusion de l’émission. «Sur le coup, je me suis dit "qu’est-ce que c’est ça?…" Je ne comprenais pas qu’il ne comprenne pas l’humour de village que l’on faisait. Puis, j’ai décidé de m’assumer», témoigne-t-il.

Ce prix, ainsi que la diffusion d’un reportage de ICI Mauricie-Centre-du-Québec, sur les ondes de RDI Économie, a été accompagné d’une grande vague de félicitations et de commentaires élogieux en provenance de la communauté.

«C’est une fierté de village, note Étienne Lafond. C’est le fun, parce que nous sommes un commerce de proximité en premier et la clientèle que nous visons, c’est le monde de Nicolet. Ça nous amène un peu de monde de l’extérieur, mais c’est surtout du monde qui vienne de Nicolet. Ça leur fait penser de venir nous voir.»

Des capsules à saveur locale

Il faut dire que l’Épicerie Lafond (Marché Ami) a fait parler d’elles un peu partout dans la province grâce à ses capsules humoristiques. Sa deuxième vidéo seulement, qui mettait en vedette des séquences du film Rocky, s’est retrouvé sur le site La Clique du Plateau et a fait le tour du Web. Sans compter une courte apparition dans l’émission de La Petite Séduction.

Une situation qui a pris de proportions inattendues pour le commerce qui a aussitôt décidé de prendre un autre tournant, en donnant un angle plus local aux nombreuses capsules qui ont suivi.

«Je me suis demandé ce que ça me donnait de me retrouver sur la Clique du Plateau. Parce que ces gens-là ne viennent pas au commerce, raconte Étienne Lafond. Puis, on s’est mis à faire des capsules juste sur Nicolet, avec des insides que juste le monde d’ici va comprendre.»

Des commerces et des personnalités connues dans la communauté nicolétaine se sont joints aux différents concepts qui servaient à mousser un produit. La réponse du public a été encore plus grande avec des vidéos qui ont atteint les 20 000 visionnements en plus de plusieurs centaines de réactions et de partages sur la page Facebook de l’entreprise.

Le chiffre d’affaires de l’épicerie s’en est d’ailleurs ressenti avec une augmentation de 15% à 25% certaines semaines. Même que pour la capsule gagnante à Infoman, on a remarqué une hausse de 1000% pour le produit vedette, avec la vente de 900 pains Gadoua!

La récente capsule de la Guerre de la Relâche, qui mettait en vedette plusieurs enfants, lui a permis d’écouler près de 800 livres de fromage en grains! Sans oublier la renaissance de la fameuse sauce à poutine de l’ancien Nimaluge qui a fait fureur alors que les clients s’arrachaient les quelques centaines de pots qui avaient été faits spécialement pour la promotion.

«Quand il y a des entreprises, ce sont parfois elles qui m’approchent parce qu’elles aimeraient embarquer. Des fois, ce peut être moi, parce que j’ai eu un flash, raconte-t-il. On ne se charge jamais rien. C’est pour s’amuser et créer des liens.»

Plusieurs fous rires et un budget minime

Étienne Lafond et son équipe ont bien l’intention de continuer dans la même veine et nous promettent d’autres capsules toujours plus désopilantes les unes que les autres.

«Les idées viennent souvent en s’en parlant avec ma conjointe, Julie, dans l’épicerie, avec Paul, mais aussi avec mon frère Guillaume. Des fois, on part sur une bulle et ce pourrait être bien pire!», rigole le réalisateur.

Pas besoin de script bien précis. Seulement les grandes idées et les phrases clés sont mises par écrit et par la suite, on laisse place à l’imagination et à l’improvisation.  Avec l’aide d’un simple téléphone intelligent, qu’on se passe d’un à l’autre, on filme des séquences qui sont ensuite transféré dans un logiciel de montage de base.

En tout, de deux à quatre heures de travail sont nécessaires pour chacune des capsules, et le tout se déroule dans la bonne humeur. «Ça nous prend généralement une heure à tourner. Des fois plus, mais c’est parce qu’on déconne! À moins de vraiment s’enfarger ou d’avoir un fou rire, on prend toujours la première prise. Après ça, au montage, ça me prend environ 45 minutes. Je laisse souvent aller une prise même si elle est au peu plus longue, parce que je ne veux pas mettre trop de temps à faire des coupures bien précises.»

Le budget de tournage est également très minime, avec une moyenne de 10$ par clips! Depuis un an, on estime en effet avoir mis environ 300$ pour l’élaboration d’une trentaine de capsules. «Parce que j’ai donné des bonbons aux enfants, je me suis acheté un déguisement, ou j’ai échappé un filet de porc en le laissant dans les airs, sinon, je n’ai rien investi là-dedans, assure-t-il. Je me refuse à m’acheter de l’équipement ou quoi que ce soit. On dirait que c’est contre ma religion. Je veux que ça reste comme ça.»