Un premier cas de placement syndical à Nicolet

JUSTICE. Une affaire de placement syndical et d’intimidation sur un chantier de construction, qui s’est produite à Nicolet, a connu son dénouement au cours des dernières semaines à la Cour du Québec.

Selon ce que rapporte La Presse Canadienne, il s’agit du tout premier jugement depuis l’instauration de la loi interdisant le placement syndical dans l’industrie de la construction qui avait été adoptée en décembre 2011.

Dans cette affaire, qui a eu lieu sur le chantier du centre des congrès de l’Hôtel Montfort, au printemps 2014, Marcel Duchesne, un représentant syndical de la FTQ-Construction, avait tenté d’intervenir directement auprès de l’entrepreneur pour qu’il embauche un de ses membres.

Or, en vertu de la Loi sur les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d’œuvre dans l’industrie de la construction, il est désormais interdit de référer de la main-d’œuvre autrement que par sa participation au Service de référence de main-d’œuvre de l’industrie de la construction.

Le tout a débuté en mars 2014, alors que le représentant de la Fraternité nationale section local 9 de la FTQ-Construction avait laissé un message dans la boîte vocale de l’employeur Constructions Germain. Ne recevant pas de retour d’appel, il s’était présenté sur le chantier pour rencontrer Guy Germain et lui recommander fortement l’embauche d’un travailleur.

Celui-ci l’informe d’abord qu’il n’en a pas besoin, avant de prétexter que l’individu n’a pas les qualifications requises, alors qu’en vérité, il a reçu des références négatives à son sujet. Le représentant syndical croit que son membre est discriminé en raison de son âge avancé et souhaite parlementer avec l’employeur.

Quelques semaines plus tard, Marcel Duchesne revient sur le chantier et s’en prend verbalement à M. Germain, lui disant qu’il insulte un de ses travailleurs et qu’il n’y a pas beaucoup de «ses hommes» sur le chantier. «Il est agressif, sacre et tape avec sa main sur son biceps», peut-on lire dans le jugement.

M. Germain le somme d’abord de quitter le chantier, puis le pousse à deux mains au niveau du torse, après une «engueulade à deux pouces du nez». Marcel Duchesne lui dit qu’il va revenir avec «ses chums» et qu’il va voir «c’est quoi la FTQ».

L’entrepreneur ne signale pas l’incident à la police, mais il contacte tout de même l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ), jugeant être victime d’intimidation.

Deux jours plus tard, M. Duchesne se présente à nouveau sur le chantier, en compagnie de deux de ses collègues, dont un de ses supérieurs. M. Germain refuse de leur parler et leur ordonne de quitter le chantier.

Ce qu’ils font après un certain temps, après avoir consulté les travailleurs sur place. Il porte ensuite plainte à la Commission de la construction (CCQ) relativement à des dérogations en matière de sécurité.

Après avoir considéré les témoignages des deux parties, le Tribunal a préféré croire la version de l’employeur, la jugeant plus crédible, alors que celle du représentant syndical est «contradictoire».

La juge Annie Vanasse a donc retenu que la chronologie des événements a démontré que «M. Duchesne réfère de la main-d’œuvre, se frustre du fait qu’on ne suive pas ses recommandations et tente de calmer le jeu sur une enquête éventuelle.»

Le Tribunal conclut qu’il a référé de la main-d’œuvre lors de son passage, mais que la poursuite n’a pas prouvé qu’il ait fait des pressions dans le but d’embaucher un travailleur plutôt qu’un autre. L’accusé a donc été condamné sur le chef de «placement syndical», mais acquitté sur celui «d’intimidation».

Rappelons que Construction Guy Germain était l’entrepreneur général du chantier de construction du centre des congrès pouvant accueillir 400 convives et d’un pavillon de 32 chambres. Un chantier qui s’était amorcé à la mi-mars 2014 et inauguré en septembre de la même année. Le tout avait nécessité un investissement de 4,5 millions $.