Présence des sages-femmes aux CA des CISSS essentielle pour les femmes du Québec

OPINION. Dans son projet de loi 10 qu’il s’apprête à faire adopter sous le bâillon et dans la précipitation, le ministre de la Santé Gaétan Barrette a choisi d’exclure les conseils des sages-femmes des conseils d’administration des futurs établissements de santé, les CISSS. Ce faisant, il fait subir à la profession de sage-femme un recul inacceptable qui aura des répercussions sur l’accès des femmes à leurs services.

Une volonté citoyenne

En 1999, la profession a été légalisée à la suite d’une mobilisation massive des Québécoises et des Québécois. D’autres avant nous ont milité pour que les femmes puissent bénéficier de suivis de grossesse adaptés à leurs besoins, accoucher dans le respect et la dignité et là où elles le souhaitent, à la maison de naissance, à domicile ou en centre hospitalier. En 2010, une enquête menée auprès des femmes en âge d’avoir un enfant indiquait que 26 % d’entre elles désiraient accoucher à l’extérieur de l’hôpital. Or, à ce jour, seulement 3 % des Québécoises ont accès aux services de sage-femme, les seules professionnelles qui les accompagnent hors centre hospitalier.

Un atout pour le système de santé

Dans la politique de périnatalité 2008-2018 publiée sous Philippe Couillard, le Parti libéral s’était donné comme objectif de rendre accessibles les services de sage-femme et les maisons de naissance dans les différentes régions du Québec. Au lieu de répondre à la demande croissante des femmes et des familles du Québec, le ministre Barrette est en train de saboter l’intégration des sages-femmes dans le réseau public de la santé. Il se trouve aussi à renier leur expertise en termes d’organisation de soins et de services. Avec cette exclusion, le conseil des sages-femmes deviendrait le seul conseil professionnel sans représentation aux CA des CISSS.

La contribution des sages-femmes permet de désengorger les salles d’accouchement des hôpitaux, de diminuer les taux d’interventions obstétricales de même que les hospitalisations, le tout se traduisant par des économies substantielles pour notre système de santé. En assurant les suivis de grossesse à bas risque, elles accordent également aux médecins une plus grande disponibilité pour les femmes qui nécessitent leur expertise médicale. Dans un contexte où le manque de ressources pour les femmes enceintes et qui accouchent se fait cruellement sentir, la décision du ministre Barrette, cautionnée par le premier ministre Couillard, est incohérente en regard de tous les engagements du gouvernement en matière de périnatalité.

L’exclusion des sages-femmes aura comme conséquence de les isoler des lieux d’orientation et de planification stratégique. Elle viendra aussi alimenter la méconnaissance d’une grande partie de la population et des professionnels du réseau de la santé. Beaucoup de préjugés perdurent à leur égard et les bâillonner en diminuant leur présence dans le réseau de la santé contribuera à maintenir cette situation.

Une attaque envers les femmes

Nous avons encore ici une illustration concrète de l’attaque envers les femmes à laquelle le gouvernement se livre dans son plan d’austérité, dont le projet de loi 10 constitue un morceau important. Le ministre Barrette doit honorer les engagements de son parti et reconnaitre concrètement l’importance de soutenir l’intégration des sages-femmes en tant que professionnelles de la première ligne dans le système de santé public.

La situation est d’autant plus criante, voire même dangereuse dans une société dite démocratique, quand on sait que des représentants de la population ne pourront plus continuer de siéger sur ce CA non plus, et que le tout s’apprête à être adopté de façon précipitée, par le recours au bâillon. Il est important que la population ait son mot à dire au sujet de la santé, de notre santé.

Avec nous depuis plus de 10 ans!

Dans notre région, la Maison de naissance de La Rivière à Nicolet accueille des femmes enceintes et leur famille depuis plus de 10 ans, avec un point de service à Trois-Rivières et un à Victoriaville. Il y a également des consultations pré et post natales à Ste-Thècle. En recréant une atmosphère simple et familiale, les sages-femmes croient qu’une maison de naissance est un espace qui favorise un accouchement normal tout en permettant aux femmes de se réapproprier leur pouvoir sur leur maternité et leur accouchement.

Nous soutenons et souhaitons plus de services de sage-femme et de maisons de naissance au Québec et sommes convaincues que l’exclusion de sages-femmes des CA des futurs CISSS va à l’encontre du développement de l’accès à ces services. Par conséquent, nous lui demandons de maintenir la présence des sages-femmes aux CA des CISSS et de respecter ainsi la volonté de choisir de milliers de femmes du Québec.

Geneviève Côté

Trois-Rivières

Membre du comité de parents de la Maison de naissance de la Rivière