Moratoire sur le gaz de schiste : la CAQ croit à un «sabordage déguisé»

Pointés du doigt la semaine dernière par le ministre Yves-François Blanchet, trois députés de la Coalition Avenir Québec (CAQ), dont les comtés sont visés par l’industrie, ont tenu à faire le point sur leur position dans l’épineux dossier du moratoire sur le gaz de schiste.

Donald Martel, de Nicolet-Bécancour, Sylvie Roy, d’Arthabaska, et Sébastien Shneeberger, de Drummond-Bois-Francs, ont expliqué pourquoi ils n’ont pas envoyé le projet de loi 37 à l’étape de l’étude article par article, après avoir adopté le principe du projet de loi.

Ils estiment que le Parti Québécois a sauté une étape qu’ils jugent très importante dans le processus, soit la consultation publique par le biais d’une commission parlementaire. «On veut entendre les agriculteurs, les environnementalistes, les municipalités, le milieu des affaires, explique Sylvie Roy. C’est pour ça que nous avons bloqué le processus. Qu’on ne laisse pas la population s’exprimer, en dix ans, je n’ai jamais vu ça.»

Il n’y a rien dans le projet de loi sur lequel la CAQ est en profond désaccord, c’est simplement une question de s’assurer qu’il soit rédigé convenablement. «Il y a peut-être des groupes qui vont nous dire tel article, s’il est écrit comme ça, il pourrait avait tel impact sur nous, ajoute Sylvie Roy. Des juristes vont aussi pouvoir nous dire comment tenir compte de la jurisprudence. Pourquoi s’en priver ?»

La CAQ ne comprend pas non plus pourquoi le gouvernement précipite l’adoption du projet de loi sans s’assurer d’avoir toutes les connaissances scientifiques nécessaires. Par exemple, le rapport du comité d’évaluation environnementale stratégique sur le gaz de schiste qui sera déposé en janvier prochain.

Ce comité est doté d’un budget de 7 millions $ et regroupe 11 experts dans le domaine de la géologie, de l’eau, de l’environnement, du gaz naturel et de l’administration publique. Ceux-ci ont visité plusieurs installations gazières au Canada et aux États-Unis, en plus de commander une série d’études sur le sujet en lien avec les gaz de schiste qui se retrouvent dans la vallée du Saint-Laurent.

Le député de Nicolet-Yamaska a déposé une motion à l’Assemblée nationale pour qu’il y ait des activités d’exploration à des fins scientifiques. «Elle a été adoptée à l’unanimité. Pourquoi se priver de ses connaissances?, questionne-t-il. On a déjà un moratoire actuellement, alors il n’y a pas d’urgence.»

«On ne peut pas se permettre de voter les yeux fermés», renchérit le député Sébastien Shneeberger.

Stratégie électorale

Les députés de la CAQ vont encore plus loin, estimant que le Parti Québécois utilise cette façon de faire pour leur faire porter l’odieux de la décision de ne pas adopter le moratoire.

«C’est tellement de la provocation ce qu’ils font, qu’ils cherchent une façon de nous tenir responsable. Ça ressemble à un sabordage déguisé, lance Sylvie Roy. Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage.»

Le député de Drummond-Bois-Franc se questionne sur l’approche du ministre Blanchet. «On sent que lui a une ouverture pour qu’il y ait des activités. C’est son parti qui est fermé, parce qu’il est trop dogmatique et anti-développement, lance-t-il. Il se cherche une porte de sortie et il veut faire passer la faute sur l’opposition.»

Donald Martel croit pour sa part que le PQ profite du fait qu’il s’agit d’un dossier chaud sur lequel il y a beaucoup de contestations dans des comtés sur lesquels ils ont des visées. «Ils essaient de gagner des points et ils se cherchent un autre facette pour dire qu’on est contre.»

Les députés de la CAQ sont prêts à collaborer, pourvu que le gouvernement minoritaire tienne compte des partis d’opposition qui le maintiennent au pouvoir. «Ils ne peuvent pas l’adopter sans nous, assure Donald Martel. Il doit y avoir d’autres négociations et qu’ils écoutent l’opposition s’ils veulent procéder.»