Gazéification des matières résiduelles : Bécancour dans la mire de 3R Synergie Inc.

L’entreprise 3R Synergie Inc. souhaite implanter une usine de gazéification des matières résiduelles dans le Parc industriel et portuaire de Bécancour. Ce projet évalué à 230 millions de dollars transformerait les déchets voués à l’enfouissement dans le but d’en faire de l’éthanol, de l’engrais ou une forme de biocarburant. Le tout réduisant à zéro le volume d’ordures enfouies dans le sol.

C’est ce qu’a confirmé au Courrier Sud aujourd’hui le directeur général de la Régie intermunicipale de gestion intégrée des déchets dans Bécancour-Nicolet-Yamaska (RIGIDBNY), Louis Charest.

«Ils s’enlignent pour ça et ils sont très sérieux, confie-t-il. Je ne suis pas dans le secret des dieux, mais je peux vous garantir que s’ils investissent pour faire avancer le dossier, c’est qu’ils ont bien l’intention d’aller jusqu’au bout. Ils ne font pas ça pour le plaisir et sans être certains de leurs affaires.»

Bien que le dossier soit sur la table de travail de la Régie depuis 2008, il semblerait que l’annonce du fonds de diversification économique de 200 millions de dollars ait suffi pour que les dirigeants de 3R Synergie Inc. pressent le pas. C’est du moins ce que croit M. Charest.

«Je ne crois pas tellement aux coïncidences et si je me mets à leur place, je comprends qu’il y a une urgence d’agir rapidement parce que beaucoup d’entreprises ont un œil sur le Parc industriel et sur le fonds de 200 millions. Les premiers arrivés auront de meilleures chances d’obtenir ce qu’ils veulent.»

Cependant, une facette importante du projet demeure un mystère pour M. Charest. L’usine que désire implanter l’entreprise basée à Repentigny gèrerait 100 000 tonnes de matières résiduelles annuellement. Or, la Régie ne réussit qu’à amasser un poids total de quelque 12 500 tonnes de déchets domestiques par année.

«On a toujours été clairs et transparents avec eux, assure le directeur général de la RIGIDBNY. On ne peut pas se cacher que nos chiffres ne correspondent pas à leur objectif. À mon avis, ils doivent avoir un plan d’action pour combler la différence, mais je ne sais pas ce qu’ils ont derrière la tête pour l’instant.»

Quant à la matière énergétique transformée qui résultera du processus de gazéification, Louis Charest ignore toujours laquelle des différentes options sera préférée aux autres. Il écarte toutefois la possibilité de produire de l’électricité.

«Hydro-Québec enregistre des surplus d’électricité, alors ça m’étonnerait grandement que 3R Synergie Inc. désire se lancer dans cette voie. Et si Hydro-Québec n’est pas preneur de l’électricité qui pourrait être produite, ça risque de ne pas être rentable», illustre-t-il.

Un processus en plusieurs étapes

Mentionnons que plusieurs étapes sont nécessaires afin de transformer des matières résiduelles en énergie. Dans un premier temps, un tri doit être effectué afin de retirer les particules de métal qui pourraient se retrouver parmi les déchets. Une fois cette étape complétée, le tout est broyé et envoyé dans le gazéificateur.

Celui-ci, à l’aide d’hydrogène, de monoxyde de carbone et d’un minimum d’oxygène, transforme ce qui prendrait des années à se décomposer en une ressource utile telle que de l’éthanol ou de l’engrais.

Un bilan énergétique décisif

Adoptant une approche plus conservatrice, M. Charest reste prudent et s’abstient pour le moment de donner ou non son appui au projet. Il attendra plutôt les résultats d’une étude menée par le gouvernement provincial, à savoir si une telle usine enregistrerait un bilan énergétique positif ou négatif.

«J’ai très confiance en notre bilan énergétique, dit-il. Je suis presque certain que le résultat sera positif, mais je préfère tout de même ne pas me mettre les pieds dans les plats si ce n’est pas le cas en fin de compte. Si l’équation est négative, ça voudrait dire qu’on serait obligé de payer des redevances parce qu’on serait considéré comme étant de l’élimination au lieu de la transformation. C’est pour cette raison que je ne veux pas me prononcer trop tôt.»

Rappelons que ce bilan était attendu pour l’automne dernier, mais le déclenchement d’élections provinciales et le changement de gouvernement avaient retardé la remise du rapport final. À ce jour, la Régie attend toujours avec impatience l’équation du ministère de l’Environnement.