De Alice à Pierre-Alexandre

TRANSGENRE. Depuis sa tendre enfance, Alice a l’impression de vivre dans un corps qui n’est pas le sien. C’est en pleine adolescence, à 16 ans, qu’elle décide de s’assumer complètement et devenir celui qu’elle est vraiment, Pierre-Alexandre (P-A).

Né en tant que fille, P-A a grandi avec deux demi-sœurs plus âgées et un frère de 5 ans son aîné, qui agissait avec Alice comme si c’était un petit frère. «Je me souviens que ça ne me dérangeait vraiment pas. J’étais correct avec ça, parce que mes intérêts, même si j’étais une fille, tournaient autour des autos ou des activités dehors, dans la bouette! J’ai sûrement eu une cinquantaine de barbies, mais je n’ai jamais touché à ça de ma vie!», lance Pierre-Alexandre, rieur.

Il se souvient qu’en tant qu’Alice, petite, elle n’aimait pas porter de robes, qu’elle se sentait mieux en short et t-shirt. Puis, alors que généralement les petites filles aiment le rose, c’était la couleur qu’elle affectionnait le moins.

Déjà, à 3 ans, Alice a demandé à sa mère à quel âge elle aurait un pénis. «Dans ma tête, je me suis toujours senti comme un garçon. C’était donc clair dans ma perception d’enfant qu’un jour, un pénis «pousserait» sur mon corps», se souvient Pierre-Alexandre.

Sa mère n’a pas tellement réagi à ce genre de questionnement, car elle-même, plus jeune, elle était du type <@Ri>tomboy<@$p>. Elle croyait donc qu’Alice était comme elle.

«C’est vers 8 ans que j’ai réalisé que je pensais aimer les filles. En fait, je me voyais avec une fille, mais en tant que gars, raconte P-A. J’en avais parlé un peu à ma mère, mais elle ne comprenait pas vraiment. Je pense qu’elle faisait un peu de déni face à tout ça…»

Puis, à 11 ans, Alice s’est faite raser les cheveux. «Là, j’étais bien. Pour une fois, je me sentais bien d’avoir les cheveux courts. Je portais principalement du linge de garçon et j’agissais comme un gars, tant au niveau physique que dans l’attitude.»

Il est important de souligner que pendant toute cette période, au primaire, Alice n’a pas été victime d’intimidation.

C’est vers l’âge de 11-12 ans qu’Alice a été confrontée à la perception des autres. «J’étais dans un camp et les chalets étaient divisés en gars-filles. À ce moment-là, je ne savais pas trop où m’identifier. Je me suis fait traiter de garçon, mentionne Pierre-Alexandre. Ça ne me rendait pas triste, mais je ne me sentais pas à l’aise.»

Refouler sa vraie nature

À partir de ce jour-là, Alice s’est fait allonger les cheveux et tentait, tant bien que mal, d’être un peu plus «fille», ce qui n’était pas du tout naturel. «Au secondaire, je m’habillais plus féminine, pour ne pas trop me faire écœurer et ne pas trop attirer l’attention. Disons que de la fin du primaire jusqu’en secondaire 3, Alice était beaucoup plus intravertie que P-A ne l’est aujourd’hui.»

Alors qu’au primaire Alice se tenait plus avec des garçons, au secondaire, son cercle d’amis était principalement composée de filles.

Quand le naturel revient au galop

Les choses ont commencé à bouger en 2e et 3e secondaire. «On était un groupe de quatre filles et à un certain moment, j’ai développé des sentiments pour l’une d’entre elles. C’est là que ma perspective a changé.»

À la rentrée scolaire 2015-2016, Pierre-Alexandre refaisait sa 3e secondaire à l’École secondaire Jean-Nicolet (ESJN) pour une deuxième fois, toujours en tant qu’Alice. «Je me sentais étouffé de toujours faire la même chose et j’étais tanné de faire semblant», soutient-il.

Suite à cela, P-A a vécu une période difficile. «J’ai eu des pensées suicidaires après avoir déclaré mon amour à une fille. Autant ça m’a libéré, autant c’était souffrant. C’est comme si mes deux personnalités cohabitaient.»

Accompagnement et démarche

À l’automne 2015, après quelques jours d’absence d’Alice à l’école, une amie avait pris rendez-vous pour elle avec un psychoéducateur. Après avoir hésité, Alice a choisi d’y aller.

En raison de ses pensées suicidaires, elle a été référée à l’hôpital. C’est là que sa mère a tout appris ce que P-A avait vécu dans les dernières années. C’est à ce moment qu’il a exprimé clairement ce qu’il ressentait à l’intérieur quant à son identité.

Après une rencontre avec le docteur, l’adolescent-e a eu des références pour obtenir des services. Par exemple, un travailleur social l’a référé à sa collègue spécialisée dans le volet jeunesse, qui travaille à l’ESJN. Précisons que tout cela s’inscrivait dans une démarche volontaire et qu’Alice/P-A était consentant-e.

Depuis, le cheminement se poursuit et sa mère l’accompagne dans sa démarche, sans compter que différents spécialistes sont mis à contribution.

Référence

Vous vous reconnaissez dans cette histoire? Vous pouvez rejoindre l’Association des transgenres du Québec: Ligne d’écoute et de référence sans frais (1-855-909-9038, option 1) ou ecoute@atq1980.org

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