Chez le BigFoot, la victoire prime… sur les bagarres

HOCKEY. Comme plusieurs taisent leurs allégeances politiques, à peu près personne n’ose dire publiquement qu’il aime les bagarres au hockey. De nos jours, c’est devenu l’un des plus grands tabous liés au sport national. Pourtant, lorsqu’un combat éclate, la foule s’anime dans les gradins, signe indéniable qu’elle affectionne le spectacle.

Dans les estrades de l’Amphithéâtre Gilbert-Perreault, aucun partisan des Tigres ne semble abhorrer le style teigneux proposé par Louis Robitabille depuis son arrivée. Au hockey junior, toutefois, les pugilistes se font de plus en plus rares. Les règles visant à réduire le nombre de duels aux poings se sont resserrées.

Il ne reste plus qu’une poignée de circuits au Québec qui proposent encore ce style de jeu. La Ligue de hockey senior A de la Mauricie, dans laquelle évolue le BigFoot de Saint-Léonard d’Aston, est l’une d’entre elles. Joël Roch y fait la loi sous l’étendard des Condors de Saint-Cyrille, jetant les gants au moins une fois presque chaque match.

Ça ne sied pas à tous. Éliminé en ronde quart de finale, le Turmel senior de Lac-Mégantic ne sera pas de retour la saison prochaine, la direction disant ne pas se reconnaître dans cette contrainte de devoir aligner des bagarreurs.

Le BigFoot, de son côté, est une véritable dynastie au sein de ce circuit. Il a remporté les grands honneurs trois fois et pris part à une finale au cours des dernières années. Il aligne plusieurs joueurs des Bois-Francs et de L’Érable. Cette équipe s’avère, ni plus ni moins, le point de chute de tous les patineurs ayant complété leur stage junior n’ayant pas percé dans les rangs professionnels. Quelques anciens de la Ligue de hockey junior majeur du Québec y évoluent, mais la plupart proviennent du réseau junior AAA.

L’ancien capitaine du V. Boutin junior AA de Plessisville, Jason Pitt, vient de remporter le championnat des pointeurs avec une récolte de 54 points en 22 rencontres au cours du calendrier régulier. Les Victoriavillois Pier-Antoine Dion, Marc-André Laroche et Yanick Beauchemin, tout comme le Plessisvillois Vincent Lamontagne et Tristan Gosselin, de Saint-Albert, y roulent aussi leur bosse. L’ancienne étoile du Titan Marc-Anthony Therrien, venant tout juste de compléter son stage universitaire, se rapportera à l’équipe en vue des actuelles séries.

«La Ligue nord-américaine est devenue tellement forte que ça prenait un circuit comme le nôtre pour permettre aux joueurs de continuer à jouer au hockey dans un bon calibre. L’enjeu est important pour nous. Avant de s’amuser, il faut gagner», commente le Princevillois Samuel Fortier, qui agit comme directeur général de l’équipe lorsqu’il déchausse ses patins.

Le BigFoot n’est pas considéré comme une équipe de baroudeurs. Il compte quelques durs à cuire, mais il n’est pas reconnu pour user de ce style de jeu à outrance pour intimider l’adversaire.

Fortier, d’ailleurs, dit ne pas apprécier les foires comme celle qui est survenue le week-end dernier, à Cap-de-la-Madeleine. Après seulement 11 secondes de jeu, le défenseur Nicolas Ross St-Onge a foncé sur l’ancien gardien des Tigres Steven Veilleux, défendant les couleurs des Loups de La Tuque. Une mêlée générale s’en est suivie. L’arbitre victoriavillois Frédéric Poliquin et son comparse Simon Blais ont distribué les pénalités en abondance sur le jeu.

«Ce n’est pas ce que nous voulons. Nous, on déplore ce genre de situation. Oui, il y a des bagarres, mais ce n’est pas que ça. Notre ligue est physique, mais il se joue de l’excellent hockey dans notre ligue», précise Fortier.

Il y a trois ans, le BigFoot s’est d’ailleurs retrouvé au cœur d’un épisode très médiatisé. Le défenseur Louis-Étienne Leblanc, de Ham-Nord, a été sauvagement attaqué par un adversaire. L’incident s’est retrouvé devant les tribunaux, l’ancien des Tigres réclamant 250 000 $ au joueur fautif ainsi qu’à son organisation. Celle-ci a été bannie du circuit. Leblanc s’en est tiré avec une fracture de la mâchoire, le privant momentanément de son gagne-pain chez Cascades.

Chez le Big Foot, on préfère généralement laisser parler le talent plutôt que les poings. L’émotion prend parfois le dessus, particulièrement en séries, mais les débordements sont découragés. L’équipe préfère se concentrer sur son objectif ultime, celui de mettre la main sur la coupe Sherwood. Ça se présente bien pour la troupe d’André Alie, qui est sur le point d’accéder à la demi-finale, menant 3 à 1 dans sa série contre le Mécanarc de Donnacona.

À Saint-Léonard, quelques centaines de personnes assistent aux matchs locaux du BigFoot. Depuis deux ans, l’équipe dispute l’un de ses matchs du calendrier régulier à Plessisville, histoire de faire découvrir l’équipe et le circuit dans ce marché de hockey junior. Ces rencontres ont fait un tabac à l’amphithéâtre Léo-Paul-Boutin. Ce succès a confirmé que L’Érable pourrait devenir une destination de choix pour y établir une équipe de la LHSAM. «C’est un marché intéressant», reconnaît Fortier.

Pas question, pour l’instant, de parler de déménager le BigFoot, insiste cependant le DG. «Tant et aussi longtemps que notre conseil d’administration sera aussi dynamique, il n’y a aucune raison de quitter Saint-Léonard. Il travaille très fort pour trouver des commanditaires et nous permettre d’offrir du bon hockey aux amateurs», a-t-il conclu.