Quand les municipalités doivent gérer des crises sociales

RÉGIONAL. Les municipalités du Québec font face à de nombreux enjeux. De passage dans la région la semaine dernière à l’occasion d’un déjeuner de chambre de commerce, le président de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et maire de Varennes, Martin Damphousse, a fait la lumière sur ces défis.

À plusieurs reprises, le président de l’UMQ a réitéré que les municipalités du Québec ont davantage besoin de l’aide du gouvernement pour arriver à gérer plusieurs dossiers, dont la crise du logement.

« Présentement, on parle beaucoup de la crise du logement, en plus de celle de la main-d’oeuvre. Cette crise du logement avait été annoncée par l’UMQ, mais elle n’était pas tellement bien perçue par le gouvernement provincial. Mais là, on le réalise et la crise s’amplifie partout au Québec. Le taux d’inoccupation n’a jamais été aussi bas, rappelle M. Damphousse. Quand on veut accueillir des travailleurs étrangers parce qu’on en a besoin pour nos entreprises, on ne sait plus où les loger, alors ils retournent chez eux. On est dans un cercle vicieux pas simple à régler. »

« Le fédéral a fait un bout de chemin en réduisant la TPS pour les nouveaux logements, convient-il, mais on attend des programmes structurants de Québec. En même temps, l’inflation et la hausse des taux d’intérêt font mal. On est dans une conjoncture où c’est vraiment difficile. Honnêtement, il faut trouver des solutions parce que ça empire chaque année », ajoute-t-il.

Le milieu municipal se retrouve aussi à gérer la hausse de l’itinérance. « Dans ma tournée des régions, j’ai entendu à peu près toutes les régions me parler d’itinérance. Je ne pensais pas que j’aurais un jour à gérer l’itinérance comme maire, raconte celui qui est maire de Varennes depuis 15 ans. Tout le monde se tourne vers les municipalités pour trouver des solutions. Si on ne reçoit pas d’aide du ministre Lionel Carmant, on n’y arrivera pas. »

Les changements climatiques et la transition énergétique

Depuis son arrivée à la tête de l’UMQ il y a une dizaine de mois, Martin Damphousse s’est exprimé sur les défis vécus par les municipalités face aux changements climatiques à de nombreuses tribunes.

« Le climat change. Ce qu’on vit sans arrêt depuis des mois et des mois nous donne raison. On avait demandé au gouvernement un pacte vert de 2 milliards de dollars de nouvelles sommes pour rénover les infrastructures souterraines pour s’adapter aux changements climatiques. On a eu un montant, mais pas les deux milliards demandés. Chaque fois que des pluies diluviennes, des feux de forêt ou encore des tornades, les gens appellent à l’UMQ pour savoir si on a des sommes de plus. Il faut prévenir plutôt que de réparer quand ça arrive. On a besoin de davantage de sommes », explique-t-il.

Le dossier de la transition énergétique préoccupe aussi beaucoup l’Union des municipalités du Québec. « En Mauricie, vous êtes dans un environnement favorable à une filière énergétique d’une belle qualité, affirme M. Damphousse. Vous avez un potentiel de rêve, autant à Bécancour, à Trois-Rivières et à Shawinigan. Ce potentiel doit être capable d’aider le Québec, vos entreprises, vos municipalités et aider l’environnement. C’est un mandat que je me suis donné pour faire en sorte que le milieu municipal devienne un acteur incontournable de la transition énergétique. »

Cela s’articule autour de quatre grands piliers, soit consommer plus intelligemment notre énergie, l’acceptabilité sociale, accélérer la transition et développer des partenariats.

« Il faut réussir à faire mieux, ensemble, et communiquer mieux. On parle de barrages, d’éoliennes et même d’énergie solaire. Le gouvernement et Hydro-Québec ont choisi d’aller vers l’éolien. Il y a un énorme potentiel. Je pense qu’il faut s’inspirer des meilleures pratiques. C’est un choix logique et rentable », soutient le président de l’UMQ.

Par ailleurs, à ses yeux, une réelle transition énergétique doit aussi passer par une bonification des sommes allouées au transport collectif. « On a demandé des sous additionnels, mais le ministre Fitzgibbon nous dit que c’est la responsabilité des villes de réduire le nombre de voitures sur les routes. Sans un bon système de transport collectif, on n’y arrivera jamais. »

Des revenus qui dépendent de la taxation

Cela fait longtemps que l’Union des municipalités du Québec réclame également une réforme du modèle fiscal municipal, car le modèle actuel fait en sorte qu’environ 70% du revenu des villes provient de la taxation. Toutefois, M. Damphousse ne croit plus qu’il est réaliste d’imaginer une réforme complète.

« On a abandonné l’idée, dit-il. Par contre, le gouvernement du Québec nous a donné de nouveaux pouvoirs dans les derniers mois. Prenons l’exemple du droit de préemption. Ça, c’est intéressant. À Varennes, on a identifié 160 lots distincts. Ça vient nous donner des leviers de développement. »

Il explique aussi avoir trouvé des façons de développer le secteur industriel de Varennes afin d’augmenter la part des revenus de taxation provenant du secteur industriel. Cela fait en sorte qu’aujourd’hui, les revenus de taxation de la Ville de Varennes proviennent à 37% du résidentiel.

« On avait beaucoup de zones blanches commerciales et industrielles, explique Martin Damphousse.  On a mis en place une stratégie d’achat et de revente qui nous a permis d’accueillir 300 nouvelles entreprises qui ont généré 7000 nouveaux emplois. Les revenus de la ville ont doublé et on n’a pas eu besoin d’augmenter les taxes dans les dernières années. Ça nous a aussi permis d’offrir plein de nouveaux services. »

Il cite en exemple un centre de données d’Amazon qui s’est installé à Varennes et qui ne compte que deux employés. « C’est très payant pour une municipalité, car contrairement au gouvernement qui dépend du nombre de personnes pour l’impôt foncier, au municipal, c’est par bâtiment. La valeur du bâtiment est tellement chère que c’est extraordinaire pour une municipalité et ça ne pèse pas plus lourd sur notre parc de logements. »