Bécancour profitera-t-elle de la légalisation du cannabis?

BÉCANCOUR. La légalisation du cannabis, le 17 octobre, a sonné le départ de la course au cannabis! Une véritable ruée vers l’or pour plusieurs investisseurs qui veulent percer dans le domaine.

Daniel Blackburn, qui milite depuis plus de 20 ans pour la légalisation du cannabis, compte bien en tirer profit et faire en sorte que Bécancour devienne un endroit stratégique pour profiter de la manne qu’entraînera cette nouvelle industrie.

Dès janvier, en compagnie de Cindy Roof, il ouvrira VertMédic. Le tout débutera par une clinique de consultation qui est en préparation depuis avant Noël à la Polyclinique 55. Il agira comme intermédiaire pour les personnes qui ont reçu une prescription de cannabis médicinale en vue de les accompagner dans leurs démarches.

À la clinique, les gens pourront rencontrer des médecins de l’Ontario ou de la Colombie-Britannique, via Skype, afin de faire changer leurs prescriptions ou ajuster la dose pour que le cannabis soit mieux adapté à leurs conditions ou à leurs médications.

Par la suite, il référera les consommateurs vers des producteurs autorisés par Santé Canada afin qu’ils dénichent des produits de qualité. «C’est un peu comme une pharmacie où l’on dépose sa prescription. Ensuite, on sait où les référer pour qu’ils trouvent ce qu’ils ont besoin», illustre-t-il.

Daniel Blackburn a plusieurs projets pour tirer profit de l’industrie.

Il a déjà eu des contacts avec un homme de coin qui souhaite le faire percer dans le milieu des sports de combat où on souhaite profiter du cannabidol (CBD) qui a pour effet de calmer la douleur.

VertMédic ne vendra aucun pot comme ç’avait été le cas des dispensaires illégaux, dont Cannabis Québec, à Nicolet. Le modèle d’affaires sera plutôt basé sur des honoraires professionnels ainsi qu’une partie des profits des ventes qu’ils feront faire aux producteurs autorisés. L’endroit sera tout de même muni d’une boutique où l’on pourra se procurer des produits en chanvre, tel que des vêtements, des crèmes, etc.

Un premier pas pour lui, mais un grand pas pour l’implantation de l’industrie dans la région puisque le résident de Saint-Grégoire a en effet plusieurs projets en tête.

En plus de cette clinique, lui et ses associés mijotent un projet de construction de serres de production de cannabis médicinal. Ceci permettra d’accommoder les producteurs qui doivent parfois faire pousser leur cannabis médicinal à la maison. Des personnes atteintes de maladie ou des anciens combattants qui souffrent du stress post-traumatique, par exemple.

Certains doivent en consommer parfois jusqu’à 80 grammes par jour dans des produits issus de l’extraction, comme de l’huile. Ce sont donc parfois 150 plants qu’ils doivent faire pousser dans leur garage, leur sous-sol ou leur grenier pour être en mesure de suffire à leur besoin. Le tout dans des conditions de salubrité et de sécurité qui ne sont pas idéales. Ce qui a pour effet de faire baisser la valeur de leur maison, plaide Daniel Blackburn.

C’est pourquoi on prévoit la construction de quatre bâtiments de 2200 pieds carrés qui contiendraient tous les équipements nécessaires à la production et à l’extraction. Le tout serait loué aux autoproducteurs et du personnel pourrait même être sur place pour veiller au grain.

Le projet devrait se réaliser sur un terrain du parc industriel et portuaire de Bécancour. Un premier contact a d’ailleurs été fait auprès de la SPIPB. Celle-ci doit d’ailleurs se prononcer sur l’implantation de l’industrie du cannabis, puisque plusieurs demandes auraient été placées depuis l’arrivée de Flora Agritech.

«Ce serait des conditions idéales avec des agents de sécurité et des infrastructures sur place qui assureraient l’approvisionnement en eau et tout un système d’égout», fait valoir Daniel Blackburn, qui regarde également du côté du Parc Laprade.

Du pot fait au Québec

Un autre projet encore plus gros est également dans les cartons. C’est-à-dire l’implantation d’une microproduction soit l’équivalent d’une micro-brasserie pour de la bière, mais pour le cannabis. Un projet d’environ 1,5 million $ qui viserait dans ce cas-ci non pas le cannabis médicinal, mais bien le «récréatif».

L’idée serait de produire du pot d’ici pour ensuite vendre la production à la SQDC qui s’approvisionne actuellement surtout en Ontario. Dans ce cas-ci, Daniel Blackburn agirait comme lobbyiste puisqu’il y aurait des changements à apporter au plan de la législation québécoise pour que le tout se réalise.

On souhaite notamment la création de l’Union des producteurs indépendants de cannabis qui agirait un peu comme le font les acériculteurs en s’assurant de standardiser, tester, contrôler et emballer la marchandise pour ensuite la mettre en marché.

«Comme les microbrasseries, on pourrait en avoir partout au Québec pour pouvoir enfin fumer du pot québécois en toute légalité, fait valoir celui qui milite en faveur du cannabis depuis une vingtaine d’années. Parce qu’on est en train de manquer le bateau au Québec.»

Des gains devraient d’abord être obtenus pour démocratiser le tout. Puisqu’actuellement, les microproducteurs doivent passer par de gros joueurs pour pouvoir vendre à la SQDC. «C’est comme si on faisait affaire avec Labatt ou Molson. C’est certain qu’ils vont nous mettre sur les étagères du bas. Parce qu’ils n’ont pas intérêt à nous commercialiser, illustre Daniel Blackburn. Ils vont aussi l’acheter beaucoup moins cher que ce que ça vaut.»

Il y a même un projet pour récupérer les tiges et les résidus de l’éventuelle production. Le tout pourra ensuite servir à faire du papier, des tissus et du plastique avec le chanvre. «On peut même décontaminer des terrains en trois ans en y plantant du cannabis», indique-t-il.

La région de Nicolet-Bécancour, qui a souvent été considérée comme la capitale du cannabis avec les nombreuses saisies qui se sont produites par le passé, offre plusieurs avantages. Puisqu’il y a plusieurs producteurs qui oeuvraient jusqu’ici dans l’ombre.

«Dans le cas du cannabis, c’est toute l’industrie qui est un start-up. Il n’y a pas encore d’expertise, fait-il valoir. Avec l’École d’agriculture de Nicolet, nous avons un bassin de producteurs passionnés qui fonctionnaient dans la zone grise, ou dans l’illégalité. Des gars qui ont déjà cette expertise.»