Le dernier tour de piste de Mario Courchesne

BAIE-DU-FEBVRE. Dans quelques mois, le directeur artistique du Théâtre Belcourt, Mario Courchesne, tirera sa révérence après une vingtaine d’années consacrées à dorloter l’âme de cet endroit.

On saura sous peu le nom de la personne qui assurera sa relève. En attendant, M. Courchesne – aussi étiqueté « M. Belcourt » – poursuit son travail avec la même éthique et la même ardeur qu’on lui connaît.

«C’est un beau privilège et un grand honneur de travailler ici. J’ai côtoyé durant 20 ans toutes sortes d’artistes et une foule de gens formidables. J’ai 65 ans. Il est temps de laisser la place à la relève, à la jeunesse. C’est une décision réfléchie et je veux quitter dans l’allégresse et la joie, en prenant le temps de bien préparer ma succession, sans pour autant jouer à la belle-mère.»

Celui qui a contribué à la renaissance du Théâtre avec sa conjointe Lise Laforce, au milieu des années 1990, se remémore avec le sourire aux lèvres les grandes étapes du Belcourt, à commencer par la première fois où il a mis les pieds dans l’endroit pour y donner des ateliers de théâtre.

«Le théâtre était presque abandonné et la municipalité cherchait à s’en départir. Elle venait de repeindre tout l’espace en blanc. Mais nous, on est arrivé avec nos morceaux tissus et nos rouleaux de peinture. Lise a cousu des nouveaux rideaux et nous avons repeint la scène en noir. Une « saprée » belle couleur qui cache bien le blanc, avait dit à la rigolade le maire de l’époque! C’était en 1994-95», raconte Mario Courchesne.

À la même époque, un ami qui travaillait au CLD leur a lancé l’idée de bâtir une corporation pour que soient présentés des spectacles professionnels au Belcourt. Mario Courchesne et sa conjointe ont planché avec lui sur ce projet, qui a finalement mené à la création de la corporation «Les Amis du Théâtre Belcourt» en avril 1998. «Le premier spectacle qu’on a produit mettait en vedette Manu et Fabiola Toupin», se rappelle M. Courchesne.

De fil en aiguille, la programmation s’est bonifiée. «On a appris sur le tas et on a graduellement fait nos classes. De trois ou quatre spectacles par année, on est passé à une quarantaine aujourd’hui.»

Nouveau souffle

Devant l’engouement suscité par ce vent de renouveau, une première phase de rénovations a été réalisée au tournant des années 2000. Il faut dire que les équipements étaient franchement désuets et la capacité électrique nettement insuffisante, se remémore Mario Courchesne. «Il fallait débrancher le réservoir d’eau chaude pour ne pas que le courant saute pendant le spectacle!»

«Ce fut 20 ans d’amour, de bonheur et de plaisir fou à accueillir les gens et à distribuer les poignées de main»

– Mario Courchesne

Les travaux se sont amorcés à l’été 2000. «Ç’a été de gros travaux communautaires impliquant l’Âge d’or, l’Aféas, les Optimistes et les citoyens. On a investi 300 000$.»

Déjà à l’époque, l’équipe du Belcourt savait qu’il y aurait éventuellement une deuxième phase de rénovations. «Les locaux étaient beaucoup trop restreints. On n’avait pas de hall d’entrée; c’était la bibliothèque qui occupait l’espace. On tassait les livres pour créer un petit environnement d’accueil avant les spectacles.»

Dix ans plus tard, la phase 2 tant attendue s’amorçait. «Il s’est investi 4 M$ ici! C’est une fortune pour un petit milieu comme Baie-du-Febvre.»

Ce qui réjouit le plus Mario Courchesne, c’est que malgré toutes ces rénovations, le Théâtre a su garder son charme et son cachet si précieux. «Il y a de la magie, ici. Et je peux compter sur les doigts d’une main les fois où elle n’a pas opéré, pour diverses raisons. Les artistes sont heureux ici, le public aussi. La salle est petite (340 places) et la clameur l’emplit facilement. Alors même si, parfois, il n’y a que 30 ou 40 personnes dans la salle, la magie est là. Il y a communion entre le public et l’artiste.»

Mario Courchesne ne manque pas de projets pour la retraite qui approche. Il envisage notamment replonger peut-être un peu dans le théâtre. «J’ai des projets d’écriture en tête; des pièces que je voulais faire, ou encore des courtes nouvelles», avoue-t-il un brin timidement. «Sinon, j’aime avoir la main dans la terre. C’est ma seconde nature, et peut-être même ma première! J’envisage aussi faire quelques petits voyages. Bref, je vais trouver des petites besognes pour m’occuper l’esprit et ne pas tourner en rond.»

Il manifeste aussi le souhait suivant: «Je veux prendre le temps de vivre. Voir ma famille, mes enfants, mes petits-enfants».

L’âme du Théâtre Belcourt

Selon Mario Courchesne, ce qui a permis au Théâtre Belcourt de devenir l’institution qu’il est aujourd’hui est sans contredit l’implication des bénévoles qui gravitent autour, de même que les gens qui se sont assis à la table du conseil d’administration depuis 1998.

«Certains sont là depuis plus de 15 ans, souligne-t-il. Ce sont des phares, des personnes indispensables. On voit qu’ils sont heureux d’être là et ça crée une belle chimie. C’est une base essentielle pour permettre l’évolution d’un projet comme le Belcourt.»

Il ne manque pas non plus de souligner leur générosité. «On peut compter sur des gens engagés dans tous nos comités ainsi qu’à la direction technique et à l’accueil, les soirs de spectacle. Par leur présence et leur sourire, ils dynamisent le théâtre. Ça pèse lourd dans la balance du succès.»

Il ne le dira pas, mais son travail et celui de Lise Laforce aussi…