Manseau irritée par l’article 81 du projet de loi 67
MANSEAU. La municipalité de Manseau marque son désaccord avec des dispositions législatives inscrites au projet de loi 67 touchant la location touristique des résidences principales. L’article 81 de ce projet de loi pourrait priver Manseau de ses pouvoirs en matière de zonage et d’aménagement du territoire pour ce type de location court terme.
À LIRE AUSSI: Convertir sa résidence principale à la location court terme
Une résolution adoptée par le conseil municipal le 5 octobre dernier et adressée à la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation du Québec statue que l’article 81 du projet de loi 67 déposé à l’Assemblée nationale «porte atteinte aux pouvoirs de zonage des municipalités et à la capacité des citoyens de se prononcer sur la règlementation de leur milieu de vie». L’adoption d’un règlement de zonage est parfois assujettie à une consultation citoyenne, voire à un référendum «et là, on va mettre le citoyen devant le fait accompli», explique Guy St-Pierre, maire de Manseau. «Tout le monde va pouvoir faire sa demande au ministère afin d’être reconnu (comme résidence principale d’hébergement collaboratif). C’est à la grandeur du Québec qu’on enlève la possibilité aux municipalités de zoner cette activité-là», ajoute-t-il.
L’article 81
L’article 81 du projet de loi 67 vise l’hébergement collaboratif en résidence principale. Il introduit de nouvelles dispositions qui «s’inscrivent dans la continuité du Règlement entré en vigueur le 1er mai 2020». Il y est écrit que la règlementation municipale ne pourra pas «interdire l’exploitation des établissements de résidence principale en matière d’hébergement touristique». Aussi, qu’une municipalité devra exclure les établissements de résidence principale du taux de taxe non résidentielle et de la taxe d’affaires.
L’article 81 permet en revanche aux municipalités «de suspendre ou retirer une attestation relativement à des infractions prévues en matière de nuisances, de salubrité ou de sécurité», avec l’accord du ministère.
Révolte à l’échelle provinciale
L’article en question fait grand bruit non seulement à Manseau, mais partout au Québec, de même qu’à la Fédération québécoise des municipalités. La FQM déposera cette semaine en Commission parlementaire près de 300 résolutions attestant de l’opposition des municipalités au projet de loi.
Le président de la Fédération québécoise des municipalités, Jacques Demers, estime que l’aménagement du territoire, le zonage, est le premier rôle des municipalités. «On passe par-dessus le citoyen qui n’aura pas son mot à dire. C’est rare de voir une réaction aussi unanime. Le droit des citoyens de s’exprimer et de voter sur un changement de zonage est un droit fondamental et le gouvernement vient de leur retirer. Pour servir quels intérêts?», se questionne M. Demers.
Québec affirme de son côté avoir voulu définir «un cadre réglementaire clair, simple et équitable pour tous, et accompagner les municipalités qui n’avaient pas suffisamment de ressources pour contrôler et encadrer le nouveau phénomène de l’hébergement collaboratif.»
Jacques Demers, qui est aussi maire de Sainte-Catherine-de-Hatley, ne comprend pas. «Pour régler des problématiques de voisinage, ça nous a pris 4, 5, 6 ans pour régler un seul dossier. Ça nous a couté 25 000$ en frais d’avocats. Il faut permettre aux municipalités qui n’en veulent pas de pouvoir ouvrir un registre et que les citoyens prennent la décision.»
Au cabinet de la ministre du Tourisme Caroline Proulx, on se défend d’être mal intentionné et on se montre ouvert à la discussion. «Les dispositions du projet de loi 67 s’inscrivent dans la continuité des règlements que nous avons mis en place afin d’encadrer adéquatement la location court terme de la résidence principale. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’étude du projet de loi à l’Assemblée nationale. Nous pourrons ainsi entendre en bonne et due forme les positions des représentants des municipalités et des parlementaires».
Le ministère du Tourisme rappelle que les municipalités pourront établir des règles additionnelles et encadrer davantage la location court terme des résidences principales.