Le retour de «Suzie»

BÉCANCOUR. Après 35 ans passés à prendre soin des autres, Suzanne Doucet, de Sainte-Angèle-de-Laval, a tiré un trait sur sa carrière d’infirmière le printemps dernier. Une décision mûrement réfléchie prise à l’automne 2019, sans savoir qu’une pandémie frapperait le monde entier à l’aube de sa retraite.

«J’ai terminé en mars 2020. La tempête commençait. C’était très tumultueux. Les choses n’étaient pas encore bien campées. J’ai vraiment eu l’impression d’abandonner le navire en pleine tempête», raconte celle qui a vécu le moment avec un sentiment ambivalent: «D’un point de vue personnel, tu te dis « Fiou, je suis sortie de là. Je vais pouvoir mieux protéger mes proches vu que je ne travaille pas ». D’un autre côté, tu penses à tes consoeurs, à tout le travail qu’il y a à faire…»

Une pensée qui est restée très présente tout au long du printemps et de l’été. Si bien que lorsqu’elle a reçu un appel du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec (CIUSSS MCQ) l’invitant à reprendre du service pour aider à la vaccination, en septembre dernier, elle n’a pas hésité une seconde avant d’accepter.

«J’ai dit oui tout de suite parce que dans le contexte actuel, mon plus grand désir, c’est que les gens qui soignent continuent leur travail de soignant», explique-t-elle, rappelant que chaque année, du personnel est déplacé de son secteur habituel le temps de la vaccination contre l’influenza.

Celle que l’on surnomme «Suzie» a donc repris du service à l’automne. Après avoir aidé à la vaccination antigrippale en novembre et décembre, elle administre maintenant le vaccin contre la COVID-19. Elle fait partie des quelque 300 retraités du CIUSSS MCQ à avoir accepté de donner un coup de main sur le terrain au Centre-du-Québec et en Mauricie depuis le début de la pandémie .

La vaccination représentait un défi intéressant pour Suzie, qui a toujours cherché à en relever durant sa carrière. «J’en avais fait un peu lorsque je travaillais aux soins à domicile. J’avais aussi participé à une clinique de vaccination, il y a peut-être une vingtaine d’années. Mais jamais je n’en avais fait de façon massive.»

Pouvoir découvrir les subtilités de la vaccination a été, pour elle, une source de motivation à se lancer dans l’aventure. «J’ai encore envie d’apprendre des choses! Comme infirmière, j’ai changé de milieu de travail aux 5-6 ans. Je me suis promenée de l’urgence aux soins intensifs en passant par les soins à domicile, les services courants et Info Santé. J’aimais ça, changer de place. Quand j’avais l’impression d’avoir fait le tour, j’allais voir autre chose», raconte la native de Bécancour, qui a eu la chance d’oeuvrer dans plusieurs établissements de santé de Bécancour – Nicolet-Yamaska.

Visiblement, elle était prédestinée à cette carrière. «J’ai toujours été bien à aider les autres. J’étais toujours au-devant de ma petite sœur et de mon petit frère. D’après moi, c’était dans mes gênes, le besoin de prendre soin des autres», croit Suzie, dont la mère était infirmière.

«Adolescente, je ne voulais pas faire comme elle. J’ai évité ça autant que j’ai pu. J’ai fait deux ans de cégep en n’importe quoi et après ma deuxième année, mes parents m’ont dit qu’il serait temps que je me plante les pieds et que je fasse quelque chose! Mon grand-père est venu habiter chez nous. J’ai pris soin de lui. Il me disait « Tu serais bonne, comme ta mère« . Alors j’ai décidé d’essayer.»

Grand-père a eu raison! La voilà, 35 ans plus tard, avec une carrière bien remplie derrière la cravate et un goût d’aider son prochain aussi présent qu’à ses débuts.

Depuis son retour sur le terrain, Suzie travaille un ou deux jours par semaine. Lorsque les vaccins contre la COVID-19 arriveront massivement, elle envisage doubler son implication. «J’ai la chance de pouvoir aider, d’avoir un impact direct sur la pandémie avec la vaccination. On a tous hâte, comme population, de se sortir de là. Le bout qu’on doit faire, c’est de respecter les consignes et d’essayer de vacciner le plus de monde possible.»