Innover par le livre
MRC DE BÉCANCOUR. Le Projet d’Accueil et d’Intégration Solidaire (PAIS) a comme mission l’accueil, l’intégration et l’accompagnement des personnes immigrantes dans la MRC de Bécancour. Pour favoriser la persévérance scolaire de jeunes réfugiés, il a choisi la voie des livres.
« Dans notre secteur, on a de jeunes immigrants présentant un grand retard scolaire, souligne d’entrée de jeu Céline Auger, directrice générale du PAIS. Ce sont des jeunes ayant séjourné dans des camps de réfugiés et qui, dans certains cas, ont été coupés pendant des années de toutes formes de scolarité. »
À l’école, ces jeunes sont placés dans des classes régulières selon leur âge. Malheureusement, certains ont beaucoup de difficulté à suivre la cadence de leur groupe, malgré la mise en place de plusieurs outils par le Centre de services scolaire de la Riveraine et le soutien du PAIS dans leur intégration scolaire. « L’écart des apprentissages entre certains enfants du même âge est majeur. Ils se butent souvent à des défis qu’ils ont de la difficulté à relever. »
Et ce n’est pas parce qu’ils sont en situation de troubles d’apprentissage, tient à préciser Mme Auger: « C’est juste parce qu’ils n’ont pas été à l’école », nuance-t-elle. « Il ne faut pas sous-estimer à quel point c’est dur cognitivement, pour eux, d’avoir ce retard. »
Le rattrapage est difficile malgré toute leur bonne volonté. « Les professeurs font tout ce qu’ils peuvent pour aider, mais c’est impossible de rattraper, par exemple, trois ans de retard en une seule année scolaire! », illustre-t-elle.
« Viens à la bibliothèque! »
Ces constats ont mené à la création du projet « Viens à la bibliothèque!« , visant à leur enlever de la pression des épaules. Les mots d’ordre? Les aider à prendre confiance en eux, à travailler leur estime de soi et leur motivation, tout en leur faisant découvrir le plaisir de la lecture.
Depuis octobre, et ce, pour 33 semaines au total, sept jeunes de 7 à 14 ans partent ainsi à la découverte de livres dans trois bibliothèques de la MRC de Bécancour: celles de Parisville, Saint-Pierre-les-Becquets et Sainte-Sophie-de-Lévrard. Chacun est accompagné d’une formatrice qui, trois fois par semaine, leur fait découvrir des livres et leur propose des activités à partir de ceux-ci.
« On démystifie plein de choses et on intègre une multitude d’éléments culturels. Par exemple, en regardant des encyclopédies sur les animaux du Québec, ces jeunes découvriront qu’il y a des ours, ici. Certains auront peur, mais on les rassure en leur faisant comprendre qu’il n’y en a pas nécessairement au parc de Parisville… et qu’ils peuvent donc y jouer en toute sécurité! », relate Mme Auger.
En parallèle, les jeunes développent leur vocabulaire, améliorent leur lecture et enrichissent leurs connaissances. Ils concrétisent même certaines découvertes sous forme de sorties. Par exemple, ils ont notamment visité le Parc de la rivière Gentilly après en avoir appris un peu plus sur les parcs, de même que sur la faune et la flore du Québec.
Travail d’équipe
Le PAIS a bénéficié d’une aide financière de plus de 20 000$ de la Table régionale de l’éducation Centre-de-Québec (TRECQ) pour concrétiser ce projet. Celui-ci est chapeauté par une conseillère pédagogique (Pauline Langlois), qui accompagne les six formatrices embauchées. « C’est un travail d’équipe », mentionne Céline Auger.
Le Centre de services scolaire de la Riveraine et le CIUSSS MCQ y collaborent également. Les professeurs font un suivi des apprentissages vus en classe, et une travailleuse sociale a rencontré les parents au début du projet pour leur parler de ce qu’est une routine scolaire et pour les aider à en instaurer une à la maison. « Les parents sont des partenaires importants. On leur demande d’encadrer leur enfant pour l’aider à réussir à l’école. Ça semble anodin, mais ce n’est pas évident à faire quand tu n’es pas allé à l’école toi-même », fait comprendre Céline Auger.
Au-delà des attentes
Le projet est maintenant rendu à mi-chemin et les retombées dépassent déjà les attentes. En plus d’atteindre les cibles mentionnées précédemment, il génère d’autres bienfaits: « Les jeunes ramènent des livres à leurs frères et sœurs. Ça les aide, eux aussi, à se préparer pour l’école! Leurs familles sont également exposées aux bibliothèques. Elles réalisent alors que c’est un endroit où socialiser et où il y a des activités », se réjouit Mme Auger.
« On espère que lorsque le projet ne sera plus là, le jeune et sa famille auront encore le goût d’aller à la bibliothèque et de lire, ajoute-t-elle. On a bon espoir qu’en y allant trois fois par semaine, le lien et l’habitude seront créés. »
L’aventure pourrait se poursuivre l’an prochain puisque la directrice générale du PAIS a l’intention de reformuler une demande d’aide financière pour le projet « Viens à la bibliothèque!« : « Ça fonctionne trop bien! », termine-t-elle.