Dans la cuisine d’une chocolatière

PIERREVILLE. Isabelle Bouchard est concentrée devant un immense bol tiède. Elle s’assure que le chocolat qu’il contient soit à point pour ensuite le couler dans des moules qui n’attendent qu’à être remplis.

Pour cette chocolatière-pâtissière d’expérience, la dernière fin de semaine a assurément été la plus occupée depuis le temps des Fêtes. Rien pour la décourager, cependant, car chaque création la comble de joie et de fierté. Même après 23 ans de métier.

C’est beaucoup de travail, fabriquer des chocolats de façon artisanale comme elle le fait. Ça demande de la minutie, de la dextérité et, surtout, beaucoup de passion et de patience… en particulier à l’approche de Pâques, quand la demande explose!

Cette fin de semaine, aidée de ses proches, elle a «construit» un à un les chocolats en forme de canards, lapins, poules, coqs et compagnie qui font maintenant saliver quiconque entre dans son commerce de la rue Georges, à Pierreville.

«En temps normal, j’utilise une quinzaine de kilos de chocolat par semaine. Dans le temps de Pâques et le temps des Fêtes, ça monte à presque 30 kilos»

– Isabelle Bouchard

«Il faut que la température soit bonne, sinon il faut recommencer», raconte-t-elle, l’œil concentré sur le coq qu’elle est en train de confectionner. La courbe de température doit se situer à environ 31 degrés. Or, pas besoin de thermomètre ici: ce sont ses nombreuses années d’expérience qui lui dictent maintenant le bon moment où verser le chocolat.

Une louche, deux louches de chocolat fondu, puis elle referme le moule. À l’aide d’épingles à linge (oui, oui!), elle fixe le tout solidement en place et tourne le moule sur lui-même à quelques reprises. «Ça permet de répandre le chocolat également sur toute la surface. Lorsque le chocolat semble figé, on le met au réfrigérateur quelques minutes avant de le démouler.»

Chaque pièce est préparée avec soin. Des touches de couleur sont généralement prévues ici et là. Elles sont constituées de chocolat blanc teint, qu’Isabelle Bouchard applique au fond des moules avant de procéder au coulage. Selon la complexité du moule, elle procédera avec ses doigts ou des pinceaux.

Une histoire de famille

Pendant que la chocolatière prépare son coq, sa mère est juste en face, en train de remplir les moules qui généreront de mignons petits cocos. À 77 ans, la dame a définitivement encore les mains habiles.

«J’ai démarré l’entreprise avec ma fille, raconte Lise Lebel-Bouchard. Aujourd’hui, elle en est la seule propriétaire, mais je lui donne encore un coup de main.»

Même chose pour sa sœur Geneviève, ses deux fils, son père André (alias <@Ri>M. Donut<@$p>, puisque c’est lui qui a créé les populaires beignes aux pommes vendus dans les Cafés Morgane) et ses autres fidèles collaborateurs, tous des proches. La Chocolaterie-pâtisserie de l’île, c’est vraiment une histoire de famille.

«On aime bien cuisiner, chez nous!», souligne Isabelle Bouchard, qui a toujours eu des ustensiles dans les mains.

Cet amour pour la cuisine a bifurqué vers les spécialités sucrées – le chocolat pour commencer – il y a une trentaine d’années. «Ma mère et moi avions regardé une émission à la télé qui expliquait comment faire du chocolat maison, et nous nous sommes lancées. On en faisait le soir et la fin de semaine puisque j’étais aux études. On en offrait à la famille et aux amis, et mon père en vendait quelques-uns sur son lieu de travail. On restait alors dans le coin de Montréal.»

Puis, l’aventure s’est poursuivie à la fin des années 90 à Notre-Dame-de-Pierreville, à l’arrière de la maison d’Isabelle Bouchard. «En 2000, j’ai suivi mon cours en démarrage d’entreprise et en 2002, mon cours de pâtisserie. J’en faisais déjà, mais je m’y suis spécialisée. J’ai par la suite déménagé mon commerce au cœur de Pierreville, il y a maintenant sept ans.»

De la passion en barre

La confection de chocolats pourrait se comparer à la confection d’une œuvre d’art. Malgré cela, la chocolatière ne se considère pas « artiste » dans la vie. «Je lis et je rénove dans mes passe-temps», sourit-elle. La peinture ou la sculpture, ce n’est pas pour elle, illustre-t-elle.

Elle se décrit plutôt comme une passionnée. «Il faut aimer ça! On fait souvent des grosses journées. Ça commence tôt et on ne sait jamais à quelle heure on sort», fait-elle savoir.

Le jeudi, un employé vient lui donner un coup de main à la préparation. Puis, c’est le blitz de confection. En plus des chocolats (elle tient généralement entre 15 et 20 saveurs), elle prépare toutes sortes de pâtisseries et du pain. La boulange, elle la fait généralement avec sa sœur le samedi, tôt le matin, au moment où cette dernière termine son quart de travail comme préposée aux bénéficiaires à Nicolet.

«C’est tout le temps agréable!», lance celle qui met la main à la pâte depuis qu’elle a emménagé à Pierreville il y a trois ans.

Pas besoin de dire que les Bouchard ont la dent sucrée! Mais chez eux aussi, la modération a bien meilleur goût. Une bonne chose… surtout quand on est en affaires dans un créneau tel que celui d’Isabelle!