Glissement de terrain : obligés de quitter leur petit coin de paradis

PIERREVILLE.  Dans la nuit du 31octobre au 1er novembre, vers 2h30 du matin, Annie Chapdelaine a été réveillée par d’étranges bruits et de petites secousses. C’était la rue devant sa résidence qui venait de disparaitre dans la rivière Saint-François, emportant avec elle une partie de son terrain.

« Ma fenêtre de chambre était ouverte. Le son que j’entendais ressemblait à de gros vents avec des branches qui craquaient. Je trouvais ça étrange et je ne savais pas ce que c’était », raconte Mme Chapdelaine.

« Ensuite, j’ai senti des mini secousses, mais pas assez pour me lever ». C’est lorsqu’elle a entendu un bruit qu’elle imaginait être celui d’une remorque vide trainée par un véhicule, ce qu’elle a qualifié d’un bruit de tôle, qu’elle s’est enfin levée et a réveillé son conjoint, Charles Courchesne.

« C’est au moment où l’auto est tombée dans le trou », précise Mme Chapdelaine. Alarmée par les cris d’un homme, elle s’est tout de suite dit : Il y a encore un accident devant chez nous! Au même moment, le cellulaire de son conjoint a sonné. « Je me suis dit que ce n’était pas bon signe; soit on connait la personne, soit il y a quelque chose de pas normal », dit-elle.

Au bout de la ligne, c’était sa voisine, en pleurs, qui avait assisté à toute la scène. Alors que Mme Chapdelaine composait le 9-1-1, son conjoint a voulu prendre sa camionnette munie d’un gyrophare pour aller bloquer la rue avant qu’une autre voiture ne s’engouffre dans le trou. Alors qu’il allait sortir de son entrée, il a immobilisé son véhicule juste à temps, n’ayant pas vu encore l’ampleur du glissement de terrain : impossible pour lui de sortir de chez lui, car la route avait complètement disparu.

Faire face à l’inconnu

Depuis la nuit du glissement de terrain, Annie Chapdelaine et Charles Courchesne ne peuvent plus habiter leur maison, la stabilité du sol étant encore incertaine. « La chance que j’ai, c’est que ma maison est plus reculée que celle de ma voisine. Mais dans les faits, on ne sait rien à propos de nos maisons encore. On ne sait pas ce qui va arriver », explique la Pierrevilloise.

Heureusement, le couple a de la famille a proximité et est hébergé chez les parents de Mme Chapdelaine, également situés à Pierreville.

Le 4 novembre dernier, Annie Chapdelaine avait l’opportunité de retourner chez elle pour vider la maison de ses meubles et effets personnels. Elle a fait un appel à tous sur les réseaux sociaux, et la réponse a été bien au-delà de ses attentes! « J’ai beaucoup d’amis qui sont venus qui ne m’avaient pas dit qu’ils viendraient. Je faisais l’accueil dans la rue, et je voyais du monde arriver avec des camionnettes, des remorques; j’avais des larmes de joie qui coulaient. On voit ça ailleurs, mais je ne pensais pas que ça m’arriverait à moi », raconte-t-elle. Environ 50 personnes se sont déplacées pour les aider, ce qui a permis de vider la maison de trois étages en à peine 40 minutes!

Le couple ne sait pas quand il pourra regarder sa maison, ni même si cela sera possible. Il devrait en savoir davantage quand les tests de sol seront complétés. Pour l’instant, l’éventail de possibilités est encore énorme : « Est-ce que le sol est à risque jusque derrière ma maison? Est-ce que je vais pouvoir y retourner rapidement une fois que ce sera réglé? Est-ce qu’on va déplacer la maison sur le terrain ou bien la démolir? », se demande Mme Chapdelaine.

Cette dernière avoue être impatiente de savoir si elle pourra un jour retrouver son petit coin de paradis. « On a mis quand même beaucoup d’énergie sur notre maison centenaire et sur notre terrassement. Ça fait 18 ans qu’on habite là. Les enfants y ont grandi, il y a un paquet de souvenirs qui restent dans cette maison ».

Malgré tout, Annie Chapdelaine reste positive. « Je ne vois pas ça comme une tragédie. C’est un événement qui est arrivé dans ma vie. Ça aurait été une tragédie si quelqu’un était mort. Là, tout le monde est correct. On n’a aucun contrôle sur la suite, alors je laisse aller et je me dis que le meilleur est à venir », conclut-elle.