Inquiétudes concernant les manifestants au procès des cinq hockeyeurs
LONDON — Le procès pour agression sexuelle de cinq anciens membres de l’équipe canadienne de hockey junior se poursuivra désormais devant une juge seule après la dissolution du jury.
Cette décision fait suite à l’envoi, jeudi, par un juré, d’une note à la juge indiquant que certains membres du jury estimaient que deux des avocats de la défense se moquaient d’eux à leur arrivée au tribunal chaque jour, ce qui a soulevé des inquiétudes quant à la partialité du jury.
Les deux avocats ont nié avoir commis une telle infraction. La juge Maria Carroccia, de la Cour supérieure de l’Ontario, a dit n’avoir constaté aucun comportement inquiétant de la part des équipes de défense ou des hommes qu’elles représentent. Cependant, la juge a exprimé des inquiétudes quant au fait que plusieurs membres du jury pourraient nourrir des sentiments négatifs envers la défense, ce qui pourrait nuire à leur capacité de rendre une décision équitable.
Michael McLeod, Dillon Dube, Alex Formenton, Carter Hart et Callan Foote ont plaidé non coupables d’agression sexuelle relativement à une rencontre survenue dans une chambre d’hôtel de London, en Ontario, aux premières heures du 19 juin 2018. McLeod a également plaidé non coupable d’une accusation supplémentaire de complicité d’agression sexuelle.
Le passage à un procès devant juge seule signifie que les arguments, les preuves et autres informations discutées en l’absence du jury peuvent désormais être divulgués.
Voici quelques éléments que les jurés n’ont pas entendus au sujet de l’affaire :
Des manifestations suscitent des inquiétudes
Des manifestants exprimant leur soutien à la plaignante se sont régulièrement rassemblés devant le palais de justice, le matin, depuis que la femme a témoigné pour la première fois le 2 mai, brandissant des pancartes et scandant des slogans tels que «Briser le silence, mettre fin à la violence».
Les manifestations ont suscité des inquiétudes quant à leur possible impact sur le jury, les avocats de la défense ayant souligné que les jurés devaient «foncer à travers la foule» pour entrer par l’entrée principale.
Bien que la liberté d’expression soit importante, les manifestants réclament «avec force et véhémence» un résultat précis lors de l’entrée des jurés, a fait valoir l’avocat David Humphrey, qui représente McLeod.
Des dispositions ont été prises pour que les jurés entrent par une entrée sécurisée, mais la juge Carroccia a déclaré avoir été alertée plus tard dans la journée que des manifestants prévoyaient de se rassembler aux deux entrées – une situation que la magistrate a jugée préoccupante.
«Je demanderai au personnel d’avertir la police, car toute interférence avec les jurés devra être arrêtée», a déclaré Mme Carroccia le 5 mai.
Finalement, aucune manifestation n’a eu lieu à l’entrée sécurisée, mais les manifestations sont restées une source d’inquiétude, notamment après que des avocats ont rapporté avoir vu certains participants apporter des pancartes dans le hall du palais de justice.
«Ils sont sur les marches et empiètent sur l’entrée du bâtiment. Ils ciblent nos clients alors que nous entrons dans le palais de justice», a clamé auprès de la juge l’avocate Julianna Greenspan, qui représente Foote.
Elle a qualifié les manifestations d’«acte d’intimidation» et a soutenu qu’il y aurait un «tollé» si «la situation s’inversait» et qu’une foule semblait plutôt soutenir les joueurs.
Interception policière d’une personne recherchant la plaignante
À l’insu de la plaignante, un membre du public a tenté de la trouver au palais de justice, mais cette personne a été interceptée par l’enquêteur principal, a-t-on appris au tribunal.
Les procureurs de la Couronne ont mentionné la semaine dernière que quelqu’un s’était rendu à l’étage où se trouve la salle de visioconférence pour parler à la plaignante. Aucun contact n’a été établi, a assuré la procureure Meaghan Cunningham.
La juge Carroccia a dit avoir été informée qu’un avocat non lié au procès avait discuté de l’affaire à la radio le 2 ou le 5 mai et avait révélé l’étage et la salle d’où la plaignante témoignait.
«De nombreux avocats ont demandé l’autorisation de suivre ce procès par Zoom, ce qui ne pose évidemment pas de problème, mais si cela devient un problème, ces autorisations seront révoquées», avait alors insisté la juge.
«Non seulement des ordonnances de non-publication sont en vigueur, mais nous tentons de mener un procès ici. Pourquoi des gens ressentent-ils le besoin de s’immiscer dans notre procès? Je l’ignore.»
La plaignante a témoigné par vidéoconférence pendant neuf jours, dont plus d’une semaine complète de contre-interrogatoire par la défense.
Un homme portait des lunettes connectées au tribunal
La police a ouvert une enquête après qu’un homme eut porté des lunettes connectées dans la salle d’audience dans les jours qui ont suivi le début du procès. L’affaire a été classée sans accusation, a-t-on appris au tribunal.
La juge a demandé à l’homme s’il avait enregistré les débats – ce qui est interdit – après que quelqu’un eut attiré l’attention sur ses lunettes, mais sa réponse était ambiguë.
Il est associé à un organisme sans but lucratif qui vise à soutenir les personnes accusées à tort, a indiqué la défense au tribunal un autre jour.
Les procureurs de la Couronne ont demandé que l’homme se voit interdire d’assister au procès jusqu’à la conclusion de l’enquête policière, une ordonnance accordée par la juge.
Il a été autorisé à revenir après que la défense a informé le tribunal que les allégations avaient été jugées non fondées. La juge Carroccia a tranché qu’il pouvait observer à condition de ne pas porter ses lunettes intelligentes au tribunal.