Élections fédérales: Legault salue Poilievre, réserve son jugement sur Carney
QUÉBEC — François Legault a salué jeudi les promesses du chef conservateur Pierre Poilievre en matière d’immigration et semblé réserver son jugement sur le chef libéral Mark Carney.
Le premier ministre du Québec a présenté sa traditionnelle «liste d’épicerie» destinée aux chefs des partis fédéraux au jour 5 de la campagne électorale qui s’étirera jusqu’au 28 avril.
M. Legault a insisté sur deux priorités, soit la réduction du nombre d’immigrants temporaires et la protection des secteurs-clés de l’économie québécoise lors d’éventuelles négociations commerciales avec les États-Unis.
Il a salué la promesse «extraordinaire» de Pierre Poilievre de céder au Québec le pouvoir de sélectionner une partie des immigrants temporaires issus du Programme de mobilité internationale (PMI).
«Je veux souligner le geste qui a été posé hier soir par M. Poilievre de s’engager à transférer au gouvernement du Québec la sélection de (…) plus de 90 % des travailleurs temporaires du programme PMI», a-t-il déclaré.
«C’est tout un gain pour le Québec, (…) c’est extraordinaire et j’espère que les autres chefs vont suivre», a-t-il ajouté, disant vouloir réduire à 200 000 le nombre d’immigrants temporaires sous contrôle fédéral au Québec d’ici trois ans.
François Legault demande également que le prochain premier ministre du Canada respecte les champs de compétence du Québec, qu’il augmente les investissements en infrastructure et qu’il protège le système de gestion de l’offre.
Il réclame aussi l’élimination des exigences d’évaluation environnementale du gouvernement fédéral, «qui dédoublent celles du Québec et des provinces», ce qui a déjà été accepté par M. Carney sans que M. Legault en fasse mention.
N’apparaissent plus sur la liste de demandes officielles du Québec: les pleins pouvoirs en immigration, le rapport d’impôt unique, l’augmentation des transferts en santé et la non-contestation de la loi 21 sur la laïcité de l’État, notamment.
«Écoutez, on pourrait faire une longue liste d’épicerie. J’aimerais ça qu’ils augmentent les transferts en santé. On a fait des choix pour bien cibler, puis pour avoir des résultats», s’est défendu le chef du gouvernement du Québec.
Lors de la dernière campagne électorale fédérale, en 2021, M. Legault avait qualifié le Parti libéral du Canada de centralisateur et de «dangereux», et recommandé aux Québécois de voter pour les conservateurs d’Erin O’Toole.
Jeudi, il est resté prudent dans ses commentaires sur Mark Carney, un ancien gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre, glissant en anglais qu’il souhaitait que le prochain premier ministre soit «un bon négociateur».
M. Carney a notamment géré l’économie du Royaume-Uni pendant la crise du Brexit.
«Je lui ai fait les demandes et on attend les annonces, s’est-il limité à dire. On n’a pas encore eu toutes les propositions du Parti libéral du Canada.» Il a ensuite esquivé une question portant sur la qualité du français de M. Carney.
Applaudissant les demandes de M. Legault en point de presse à Montréal jeudi, le chef bloquiste Yves-François Blanchet a invité MM. Carney et Poilievre à s’engager à mieux répartir les demandeurs d’asile partout au pays.
«On l’a vu, le nouveau déficit du Québec, c’est affolant. Il faut baisser la pression sur les finances publiques et un des moyens de le faire, (…) c’est une répartition proportionnelle au poids de la population des provinces», a-t-il déclaré.
Nouveaux droits de douane: l’opposition inquiète
Plus tôt, les partis d’opposition à l’Assemblée nationale se sont inquiétés des droits de douane de 25 % que les États-Unis imposeraient dès le 2 avril au secteur de l’automobile.
Ils ont demandé à François Legault de s’assurer que le gouvernement fédéral ne fasse pas de concessions sur le dos du Québec dans ses efforts pour protéger l’industrie de l’auto de l’Ontario.
«C’est quoi, notre priorité de nos demandes au fédéral? C’est de protéger l’économie québécoise», a déclaré en point de presse le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay.
«Dans aucun cas, il faut que les entreprises et l’industrie québécoise soient sacrifiées en vue d’un futur « deal », quel qu’il soit», a poursuivi le co-porte-parole de Québec solidaire par intérim, Guillaume Cliche-Rivard.
«Mark Carney a dit ce matin: « Je veux parler à M. Trump. » Moi, je ne veux pas que le Québec puis son industrie, notamment l’industrie laitière, fassent les frais d’un futur « deal » au profit de l’Ontario», a-t-il renchéri.
Le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a abondé dans le même sens. «Je crains qu’il y ait des monnaies d’échange pour protéger l’automobile canadienne», a-t-il dit.
Les chefs de partis fédéraux doivent s’engager à protéger l’économie québécoise, a insisté en conférence de presse M. Legault, qui mettra également le cap vers l’Allemagne dans les prochains jours pour y mener une mission économique.
«La meilleure façon de répliquer, c’est de se diversifier et de trouver de nouveaux alliés», a-t-il dit.