Voyager à moindre coût, mais à quel prix?
HÔTELLERIE. Après Uber et Amigo Express, qui ont bouleversé la façon de se déplacer, les offres avantageuses du site internet AirBnB commencent quant à elles à venir tranquillement jouer dans les plates-bandes des hôteliers, même ici, sur la Rive-Sud.
Le site internet permet à des particuliers de louer leur logement ou leur chambre à des voyageurs de partout dans le monde, de quoi faire de l’ombre aux hôtels, qui crient à la concurrence déloyale.
Le concept est simple: de New York à Paris en passant près de chez nous au Québec, AirBnB permet de découvrir le monde par le biais d’hôtes locaux pour une facture beaucoup plus légère qu’une chambre d’hôtel traditionnelle.
En effet, le service créé en 2008 est à ce jour implanté dans plus de 190 pays.
Lorsqu’on inscrit «Nicolet» ou «Bécancour» dans le moteur de recherche du site internet, on tombe sur une douzaine d’hôtes. Une simple chambre, un condo, une maison, un chalet sur le bord du fleuve: il y en a pour tous les goûts. Les prix varient en fonction du type d’hébergement et de divers éléments.
Une tendance grandissante
Encore nouvelle sur la Rive-Sud, la plateforme ne semble pas avoir affecté les lieux d’hébergement de la région. Marie-Ève Boisclair, vice-présidente Ventes et Marketing à l’Auberge Godefroy, reconnaît que le phénomène prend de l’ampleur. «Présentement, on n’a pas un aussi large impact que ce qu’on voit dans les grandes villes du monde. C’est un phénomène qui est relativement nouveau, mais c’est vrai que c’est une tendance qu’on voit de plus en plus. Ce n’est pas encore très populaire ici, mais je me tiens quand même au courant et je vais voir de temps en temps sur le site», affirme-t-elle.
De son côté, la directrice générale par intérim de l’Hôtel Montfort ne connaissait pratiquement pas l’existence de la plateforme. «Peut-être que la vague est à venir, mais pour le moment, on ne note aucune problématique en ce sens», a fait savoir France Noël.
Il faut dire qu’à l’heure actuelle, il est difficile de quantifier l’impact qu’aura AirBnB, à plus long terme, sur les hébergements du territoire.
Inquiétude et optimisme
Mme Boisclair considère que les hôtes inscrits sur AirBnB sont des acteurs déloyaux dans le monde de l’hôtellerie. «Ça demeure de la concurrence déloyale quand on considère qu’ils ne sont pas enregistrés ou coté comme hébergement. Ces endroits ne sont pas reconnus par les associations touristiques ou hôtelières.»
France Noël ne croit pas, pour sa part, qu’il s’agisse de compétition déloyale. En fait, elle voit même cela d’un bon œil. «Nos produits sont complètement différents, alors le client a toujours le choix. À mon avis, plus le consommateur peut choisir, mieux c’est pour le développement touristique du Québec.»
Tant l’Hôtel Montfort que l’Auberge Godefroy ont des produits personnalisés et c’est ce qui rassure Marie-Ève Boisclair: «Je pense que la majorité de notre clientèle nous choisit pour vivre une expérience, alors je ne suis pas certaine que nos clients recherchent le genre d’hébergement proposé par AirBnB.»
Elle demeure toutefois sur ses gardes quand on parle de la taxe d’hébergement. C’est que les particuliers faisant affaire avec AirBnB n’ont pas encore à payer la taxe sur l’hébergement au Québec, au grand dam de plusieurs hôteliers. «Selon moi, c’est de l’hébergement illégal et le gouvernement devra agir. Mais même s’ils se font taxer, ils n’auront pas les mêmes standards de qualité que nous, alors ça restera un réseau illégal», déplore la vice-présidente Ventes et Marketing à l’Auberge Godefroy.
Par ailleurs, notons qu’actuellement, seulement deux inspecteurs sont en poste pour surveiller l’hébergement illégal au Québec.
Enfin, du point de vue de Tourisme Centre-du-Québec, on privilégie les établissements classifiés. «La classification, c’est important et pour les touristes, il s’agit souvent d’un gage de qualité et ça peut être rassurant», fait valoir Isabelle Hallée, responsable des communications.
L’organisation touristique affirme ne pas avoir beaucoup de données sur la quantité de gens qui utilisent AirBnB. «Le pouls de nos membres qui oeuvrent dans l’hébergement, c’est qu’ils ne le ressentent pas vraiment», conclut-elle.
Vers une légalisation à l’automne?
Le gouvernement du Québec songerait à légaliser AirBnB à l’automne et, par le fait même, à taxer et traiter ces particuliers comme les hôtels, selon ce que révélait un article paru dans le journal Le Soleil.
En collaboration avec Marianne Côté.