Tabarnak: L’expo qui jure

Avec un titre comme «Tabarnak: L’expo qui jure», on pourrait s’attendre à être choqué ou mal à l’aise face à une exposition aussi libérée que celle créée par le Musée des religions du monde. Mais il n’en est rien.

«En fait, loin de nous l’idée de provoquer. Notre but, c’est plutôt d’attirer l’attention sur le musée!», souligne simplement Jean-François Royal, directeur du musée nicolétain.

Tout compte fait, l’expérience s’avère beaucoup plus informative et divertissante qu’autre chose, parce qu’à travers l’interprétation que l’équipe du musée fait de l’univers des sacres, on en apprend énormément.

«On a décidé de se lancer dans cette exposition parce que Mathieu, responsable de l’action éducative, était tanné de faire rire de lui lorsqu’il prononçait les termes tabernacle ou calice lors de ses animations avec les groupes scolaires!», lance le directeur à la rigolade.

«C’est vrai, les jeunes réagissaient souvent en riant et en disant "Oh le monsieur a sacré!" Mais ce n’était pas le cas, il ne faisait que nommer les objets par leur nom», raconte Marie-Josée Savard, agente de communications.

«En effet, on s’est rendu compte que les jeunes entendaient sacrer et sacraient eux-mêmes, mais ignoraient totalement pourquoi le fait d’évoquer ces termes avait davantage d’impact que d’autres», ajoute M. Royal. «Alors, l’idée de cette exposition éducative est née.»

De quoi bien tenir sa langue…

Au fil de la visite, on découvre l’évolution du sacre à travers le temps, ses origines, ses lieux de diffusion de prédilection, ses transformations de même que les tentatives utilisées pour l’enrayer!

On constate qu’en 2011, le sacre semble passer plutôt bien, car à l’époque de François 1er, en 1494, à sa première offense, on nous aurait dépouillés de quelques pièces de monnaie, à la deuxième (tenez-vous bien) on nous aurait fendu les lèvres, à la troisième, on nous aurait percé la langue et à la quatrième, nous n’aurions pas eu l’opportunité de le refaire une cinquième fois, car on nous aurait condamnés à mort par pendaison et étranglement! De quoi bien tenir sa langue, n’est-ce pas ?

Les oubliés et les persistants

L’univers des blasphèmes a bien évolué au cours des siècles, certains termes sont demeurés et d’autres ont épuisé leur potentiel d’impact. C’est d’ailleurs un des objectifs de l’exposition: retracer les sacres et les remettre dans leur contexte pour comprendre leur référence et donc leur poids, leurs conséquences.

Mesdames, vous faire qualifier de toupie vous affecte peu? Peut-être le serez-vous un peu plus à la suite de votre visite au Musée des religions du monde. Il y a plusieurs années, être une toupie n’était pas synonyme d’hyperactivité, mais désignait bien une «femme de mauvaise vie, de bas étage»!

C’est ici où l’on comprend que le but de l’exposition est également de faire réfléchir sur l’avenir du sacre au XXIe siècle.

 

«Il semble bien qu’aujourd’hui, le même phénomène se produise avec les anciens sacres qu’au début du XIX siècle. L’autorité religieuse a disparu et les utilisateurs ont oublié le sens de la faute. Leur expressivité affaiblie, ces sacres deviendront à leur tour des mots archaïques, folkloriques. Si les sacres perdent de leur influence, il est à prévoir qu’une nouvelle génération de blasphèmes naisse de ce vide», note-t-on sur les murs de l’expo.

Ainsi, en attendant que le lexique religieux s’épuise, il est encore temps pour les visiteurs d’apprendre les véritables significations des sacres en allant observer le dictionnaire visuel qui a été conçu à la toute fin de l’exposition. On y retrouve une panoplie d’objets religieux et les sacres qui y sont rattachés.

Finalement, les amateurs d’art seront ravis d’apprendre que deux sculptures d’Alfred Laliberté sont présentées dans cette exposition en plus d’une toile de Joseph Légaré.

«Tabarnak: L’expo qui jure» sera présentée du 20 mai 2011 au 2 septembre 2012.

Informations: www.museedesreligions.qc.ca ou 819 293-6148.