SLNGaz: le BAPE dit oui, mais…

ÉCONOMIE. Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) conclut que le projet de construction d’une usine de liquéfaction du gaz naturel à Bécancour est «acceptable», mais se permet tout de même quelques bémols.

Dans son rapport d’enquête rendu public ce matin, la commission estime que les impacts potentiels pour la communauté d’accueil et le milieu naturel sont «faibles». D’abord en raison des risques technologiques associés aux activités de liquéfaction et de chargement du gaz naturel liquéfié qui seraient circonscrits à l’intérieur des limites du parc industriel.

La commission d’enquête est tout de même d’avis que Stolt LNGaz devrait tenir compte, dans la conception finale de ses installations, des risques associés aux futurs réservoirs de Servitank et, plus particulièrement, de l’ajout éventuel d’un deuxième réservoir de nitrate d’ammonium.

Elle recommande également au ministère d’exiger que SLNGaz dépose tous les scénarios d’accidents pouvant générer des effets dominos significatifs avant l’autorisation éventuelle du projet.

Pour émettre un , la commission a également tenu compte de la taille modeste du projet à Bécancour comparativement à ce qui se fait ailleurs dans le monde et que l’utilisation de gaz naturel liquéfié par les industries du nord-est du Québec et du Canada, au lieu du mazout et du diésel réduira de façon significative les émissions de gaz à effet de serre.

La disponibilité du gaz naturel pourrait également représenter des réductions de coûts pour les entreprises desservies, dans la mesure où le différentiel de prix observé entre le gaz naturel et le mazout, entre 2011 et 2014, se maintiendrait sur plusieurs années. Puisqu’on se souviendra que la chute des prix des produits pétroliers, à la fin de 2014, avait fait en sorte de réduire de moitié cet écart.

Toutefois, pour que le Québec puisse bénéficier des avantages économiques et environnementaux potentiels du projet, il serait nécessaire qu’une forte proportion du gaz naturel liquéfié (GNL) produit par Stolt soit effectivement destinée aux industries du Québec plutôt qu’à l’exportation.

La commission d’enquête constate d’ailleurs que la demande de licence d’exportation de gaz naturel liquéfié de Stolt LNGaz porte sur un volume maximal de 500 000 tonnes par année, ce qui représenterait 100% de sa production de GNL durant la première phase. Une fois les deux phases du projet achevées, les exportations passeraient au maximum à 50% de la production.

La litigieuse question de l’approvisionnement en gaz naturel est aussi abordée dans le rapport du BAPE, un sujet soulevé à plusieurs reprises par les opposants au projet. À ce sujet, la commission note que la Régie de l’énergie considère que ni les gaz de schiste ni les biogaz provenant du Québec ne peuvent être considérés comme une option d’approvisionnement à l’horizon 2030.

Pour le moment, les démarches auprès de TransCanada portent sur un volume de gaz naturel correspondant aux besoins d’une seule unité de liquéfaction, soit environ 665 millions de mètres cubes par année et plusieurs craignent une pression à la hausse sur les gaz de schiste.

Stolt s’est aussi montré ouvert à la faisabilité d’intégrer le biogaz dans son prodécé, mais l’entreprise juge que ce ne pourrait répondre qu’à 1,5% de ses besoins annuels en raison de sa faible valeur calorifique et son contenu élevé en sulfure.

«Cependant, l’avantage pour Stolt et pour ses clients serait d’utiliser une ressource qui réduirait le bilan des émissions de gaz à effet de serre. Cela donnerait aussi l’occasion à Stolt de contribuer au développement de cette filière énergétique», peut-on lire dans le rapport d’enquête.

Quelques recommandations

Par ailleurs, la commission estime que le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) aurait dû demander que les risques associés au transport maritime du GNL sur le fleuve Saint-Laurent soient évalués dans l’étude d’impact.

Compte tenu que Stolt s’est engagée, sur une base volontaire, à se soumettre au processus fédéral d’examen TERMPOL, le MDDELCC devrait tenir compte, dans son évaluation et son éventuel suivi du projet, des recommandations du comité formé dans le cadre de ce processus.

La commission d’enquête constate que si un accident survenait à un méthanier naviguant sur le fleuve et provoquait un déversement de gaz naturel liquéfié qui s’enflammait ensuite, des personnes résidant ou circulant près des rives pourraient se retrouver à l’intérieur du seuil de radiations thermiques de 3kW/m2.

Parmi les zones riveraines à l’intérieur d’un rayon de 420 mètres de la voie navigaubale, on note Champlain, Deschaillons, Lotbinière, Lévis, Québec, Saint-Pétronille et deux municipalités de l’Île d’Orléan.

Le BAPE estime tout de même que son analyse aurait été différente, si le mode de transport choisi avait été par camion ou par train puisque les impacts auraient été plus importants au chapitre des nuisances, de la sécurité publique et des émissions de gaz à effet de serre.

De plus, le BAPE estime qu’étant donné que l’information à ce sujet n’était pas disponible lors de l’audience publique, Stolt devrait la rendre publique et organiser des séances d’information pour les citoyens de Bécancour et de Champlain.

La commission recommande au MDDELCC de prévoir un encadrement réglementaire précisant les montants minimum d’assurances responsabilité civile et de garanties financières requises dans le cas d’entreprises telles que Stolt qui produisent et entreposent des matières dangereuses.

Le BAPE estime que ceci permettrait d’éviter que la société québécoise ait à assumer une partie des coûts rattachés à un éventuel accident ou à la fermeture des installations de ces entreprises. De plus, la commission estime que Stolt devrait rendre publics les montants d’assurances qu’elle entend contracter.