Québec abandonne le gaz de schiste

POLITIQUE. Le Bureau des audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur l’industrie du gaz de schiste démontre de nombreuses réserves quant à l’exploitation de cette industrie dans les basses terres du Saint-Laurent. Le premier ministre Philippe Couillard a décidé d’abandonner toute tentative d’implantation de l’industrie au Québec.

:La conclusion des commissaires est de la commission d’enquête est claire: les preuves que le Québec bénéficierait de l’exploitation du gaz de schiste par fracturation hydraulique sont trop faibles que les avantages qui y seraient rattachés. En entrevue à Radio-Canada, le premier ministre Couillard s’est rangé derrière ces arguments.

«En raison de l’ampleur des impacts potentiels associés aux activités de l’industrie du gaz de schiste dans un milieu aussi peuplé et aussi sensible que les basses terres du Saint-Laurent, en raison également des incertitudes qui subsistent quant aux impacts potentiels sur la qualité de l’eau des aquifères et à la capacité de l’industrie de préserver l’intégrité des puits à très long terme, la commission d’enquête est d’avis qu’il n’est pas démontré que l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste dans les basses terres du Saint-Laurent avec la technique de fracturation hydraulique, serait avantageuse pour le Québec», concluent les commissaires du BAPE.

De nombreux avis, par rapport à l’eau, les terres agricoles, les impacts sur la communauté et les émissions de gaz à effet de serre ainsi que sur les bénéfices en argent pour le Québec démontrent les réticences des commissaires.

L’aspect économique a aussi été abordé dans le rapport de la commission présidé par Denis Bergeron. En observant les prix du gaz offerts, le système de redevances du Québec et les emplois possiblement créés, la commission est d’avis que «dans l’ensemble, l’analyse avantages-coûts surestime les avantages que retirerait le Québec dans l’éventualité d’une exploitation du gaz de schiste».

Prudence

Le rapport du BAPE amène un principe de prudence. Dans le cas de l’eau, un enjeu au cœur des préoccupations soulevées durant les audiences, les commissaires reconnaissent que le risque de contamination de la nappe phréatique demeure faible. Toutefois, des «incertitudes» subsistent quant à la caractérisation des couches intermédiaires entre le shale d’Utica et les aquifères peu profonds, d’où l’importance de procéder avec prudence.

De plus, les enquêteurs ont remarqué que «le déploiement éventuel de l’industrie du gaz de schiste exercerait une pression importante sur les cours d’eau des basses terres du Saint-Laurent, sur le plan des prélèvements comme sur le plan des rejets d’eaux usées».

Cela est directement en lien avec les inquiétudes concernant l’agriculture. Le morcellement des terres en raison des chemins d’accès, la demande en eau, l’impact sur la qualité de l’air, le niveau sonore, la circulation routière et les possibles déversements accidentels d’eaux usées ou de contaminants sont autant de facteurs pouvant nuire aux producteurs agricoles. La commission d’enquête recommande donc aux entreprises gazières de «soumettre une évaluation des effets potentiels de leurs activités sur les entreprises agricoles et sur les entreprises des secteurs du tourisme et de l’agrotourisme, dans le cadre de leur demande de certificat d’autorisation».

Les commissaires se sont aussi attardés à l’émission de gaz à effet de serre (GES) qu’engendrerait une telle industrie, relatant au passage que les fuites de méthane, dont l’effet de serre est de 20 à 25 fois plus important que celui du CO2, ne peuvent être ignorées. Le rapport mentionne que les activités de ce type d’industrie gazière pourraient faire augmenter le bilan québécois d’émission de GES de 3 % ou 23 %, dépendamment des scénarios.