Le Parc industriel et portuaire de Bécancour : l’espoir d’une région

Depuis l’annonce de la fermeture de la centrale nucléaire Gentilly-2, bien des yeux sont rivés sur son voisin, le Parc industriel et portuaire de Bécancour. La raison? Il recèle un potentiel énorme qui pourrait contribuer à remettre l’économie de la région sur les rails.

«Avec près de 7000 hectares de terrain utilisés à 25%, une situation géographique idéale, un port aux eaux aussi profondes que le fleuve, et un accès facile aux diverses autoroutes, au chemin de fer, au gaz naturel, à de l’eau industrielle illimitée et à la cogénération, il est l’endroit tout désigné pour accueillir de grosses entreprises créatrices d’emplois», confirme le président-directeur général de la Société du Parc, Maurice Richard.

D’ailleurs, les géants RTFT (Rio Tinto Fer et Titane) et IFFCO (Indian Farmers Fertiliser Cooperative Limited) ont annoncé, en 2012, leur intérêt à investir à court terme dans ce Parc gouvernemental – le seul de la province. Alors que RTFT projette d’y construire, à compter de 2014, une usine d’environ 4 milliards de dollars susceptible de créer jusqu’à 400 emplois, IFFCO souhaite y installer, d’ici 2017, une usine de production d’urée de 1,2 milliard de dollars qui emploierait entre 200 et 300 personnes.

Des impacts majeurs, qui ne représenteraient pourtant que la pointe de l’iceberg! Maurice Richard possède en effet, sur son bureau, une impressionnante pile de dossiers… dont il ne peut malheureusement rien dévoiler pour le moment. S’il admet que la plupart ne devraient pas se régler dans un proche avenir, il fait également valoir, en contrepartie, que souvent, mieux vaut ne pas se presser. Pour illustrer ses propos, il prend le cas de TRT ETGO, qui avait tenté une première approche infructueuse à Bécancour, il y a environ 25 ans.

«À l’époque, le dossier n’était pas mûr, et le financement absent. Mais depuis, bien des choses ont changé, et certains financiers ont fini par croire au projet. Ainsi, on parle aujourd’hui d’un investissement direct de 175 millions de dollars à Bécancour, avec d’importantes retombées indirectes. Parfois, c’est payant d’être patient.»

Tributaire d’un marché mondial

La patience est d’ailleurs une qualité plus essentielle que jamais de nos jours, puisque dorénavant, un bon nombre de dossiers locaux dépendent de l’humeur des marchés mondiaux.

Des exemples, ici-même? En 2008, REC Silicium avait annoncé un investissement de 1,2 milliard de dollars pour un projet d’usine spécialisée dans la fabrication de silicium destiné aux panneaux solaires. Or, cinq ans plus tard, le projet n’a toujours pas vu le jour, en raison de la baisse marquée de l’intérêt des marchés envers le silicium.

«Mais qui sait si, demain matin, une quelconque avancée ne ramènera pas tout aussi rapidement cet intérêt? Non seulement faut-il faire preuve de patience mais, le moment venu, il faut être fin prêt», souligne M. Richard.

Autre illustration du lien direct entre l’avancement des dossiers locaux et les aléas de l’économie internationale : le cas d’Innovation Metals Corporation (IMC), qui se spécialise dans la transformation de terres rares. À l’été dernier, l’entreprise a annoncé le dépôt d’une option d’achat sur un terrain du parc, de même que son intention d’investir 300 millions $ à Bécancour.

«Il y a trois ans, personne ne savait ce qu’étaient les terres rares! Depuis, non seulement a-t-on saisi toute leur importance, mais on a réalisé que la Chine – où se concentre 95% de la production mondiale – commençait à appliquer des mesures protectionnistes sur ces minerais.»

Cela a incité des entreprises nord-américaines à s’intéresser de plus près à la production de ces terres. Elles ont alors appris que deux des composantes utilisées dans leur traitement (le chlore et l’acide chloridrique) étaient offerts par Olin, une entreprise établie… dans le Parc industriel et portuaire de Bécancour! D’où l’intérêt d’IMC, entre autres, pour la région…

«À première vue, cet intérêt constitue évidemment une excellente nouvelle, poursuit Maurice Richard. Cela dit, nous sommes conscients que si la Chine décidait de laisser tomber ses mesures protectionnistes, certains dossiers seraient peut-être réévalués…»

Des terrains presque vendus

En poussant davantage la discussion avec Maurice Richard, on apprend par ailleurs qu’IMC n’est pas la seule entreprise à détenir une option d’achat sur un terrain au parc. «Certaines ont même demandé une extension de leur option, en 2013, ce qui est de très bon augure. En effet, cela démontre que leur intérêt pour le parc est encore bien présent.»

À ce chapitre, il convient de rappeler que les dirigeants de la Société du Parc, à la base, sont toujours très parcimonieux et rigoureux en ce qui concerne la vente de leurs terrains. En fait, ils ne vendent qu’à des entreprises qui leur proposent des projets bien concrets, susceptibles d’avoir un impact économique régional et provincial réel. Et lorsqu’un projet achoppe, ils reprennent le terrain.

Ainsi, en 2012, aucun terrain n’a été vendu pour y bâtir de la grosse industrie. En revanche, quelques petites parcelles ont été cédées à des clients déjà existants, qui en avaient en général besoin pour prendre de l’expansion ou combler certains besoins d’espace.

Cela dit, Maurice Richard rappelle que le mandat premier du parc consiste à bien servir les usines déjà en place. «Elles sont nos meilleurs ambassadrices lorsque vient le temps de convaincre un investisseur potentiel», juge-t-il, avant de confier que la consolidation des entreprises existantes a autant d’importance que les usines nouvelles. «Elle assure la pérennité du parc.»

Ainsi, quand des entreprises comme CEPSA Chimie Bécancour et Arkema annoncent leur intention d’investir prochainement des millions de dollars pour moderniser leurs installations, Maurice Richard et son équipe sont convaincus d’avoir tout aussi bien joué leur rôle que lorsqu’ils réussissent à attirer des nouveaux joueurs.