«Bientôt on aura perdu presque tous les témoins de l’histoire acadienne»

Les plus anciennes maisons de Bécancour vivent depuis quelques années un fort déclin. Souvent laissées à l’abandon ou mal rénovées avec le temps, plusieurs sont démolies pour faire place à une construction neuve, une route ou un terrain commercial. Michel Martel, récupérateur et restaurateur de maisons ancestrales, s’acharne à préserver ces témoins de l’histoire au moment même où St-Grégoire décide de renouer avec ses racines acadiennes.

«St-Grégoire est un des gros bassins de maisons acadiennes parce que le village a été fondé par les Acadiens. Le problème c’est que comme il n’y a aucune sensibilisation qui se fait, les gens ne connaissent pas la valeur et même l’histoire de ces maisons. On est en train d’en perdre beaucoup au profit du développement», affirme Michel Martel, résidant de St-Grégoire et charpentier menuisier de profession.

Sensible à la sauvegarde des maisons ancestrales, il s’est pris il y a plus de 30 ans d’une grande passion pour la récupération et la restauration des maisons des premiers acadiens du territoire. Des maisons souvent âgées de 250 ans, qui ne paient plus de mine et sont vues comme des obstacles par plusieurs nouveaux propriétaires, qui en envisagent la démolition. «C’est à ce stade que j’interviens, juste avant la perte totale», souligne le charpentier qui numérote et démonte à la main chacune des pièces de la maison. Il propose ensuite la maison à des acheteurs, souvent amateurs de patrimoine, et la remontera sur le terrain de leur choix. «Je démonte environ deux maisons par année. Ce qui est dommage c’est que depuis 30 ans, il n’y a pratiquement aucune des maisons sur lesquelles j’ai travaillé qui est restée dans la région. Ce sont des gens d’ailleurs qui sont sensibles à la valeur de ce patrimoine. Ici, personne ne pose un geste», se désole le passionné.

L’une des dernières maisons des fondateurs de St-Grégoire partira d’ailleurs sous peu vers la frontière américaine. «C’était une des premières maisons construites ici, vers 1765, par un Leblanc. Le magnifique terrain sur lequel elle se trouvait, près du lac St-Paul, a été achetée il y a quelques mois et le nouveau propriétaire voulait se construire une maison neuve. C’est dommage que personnes à la Ville ne se soit réveillé pour acheter et mettre en valeur ce terrain et cette maison-là. C’était un site patrimonial formidable qu’on aurait pu utiliser pour le tourisme. Quand j’ai démonté la maison, j’ai trouvé plein de vestiges historiques» raconte Michel Martel.

Invité de «Passion Maisons» à la chaîne Historia

Le spécialiste de la restauration a reçu en juillet dernier la visite de l’équipe de tournage de «Passion Maisons», une émission qui fait la tournée des plus belles maisons ancestrales rénovées par leur propriétaire. L’épisode réalisé à St-Grégoire sera diffusé sur la chaîne spécialisée Historia ce mardi 24 octobre ainsi que le 5 décembre.

Un reportage d’une heure a ainsi été fait sur le passionné, qui réside lui-même dans deux anciennes maison acadiennes remontées côte à côte. «La première maison date de vers 1790 et a été construite par un Bergeron. La deuxième, que j’ai achetée au président de l’UPA Laurent Pellerin, est une maison de Prince qui a été construite vers 1810. J’ai retravaillé les deux avec des outils originaux comme les haches, les ciseaux à bois, le rabot. Ça donne un résultat unique et c’est une façon de raconter l’histoire.»