Atteinte à la réputation: Ben Lalen obtient gain de cause

JUSTICE. Il vaut parfois mieux tourner sa langue sept fois avant de parler lorsque l’on se retrouve en assemblée publique. Un résident de Sainte-Eulalie l’a appris à ses dépens alors que ses propos lui auront coûté un peu plus de 3 000 $.

L’affaire en question remonte à la séance du conseil municipal du mois de janvier 2015, où une trentaine de personnes étaient présentes, et elle a fait l’objet d’une décision de la Cour du Québec, en septembre dernier.

C’est lors de la période de questions que Sylvio Valois aurait tenu des propos à l’égard d’un commerçant de l’endroit, sans jamais le nommer. Selon les témoignages recueillis, il faisait allusion à Ben Lalen, un commerce qui vend des peaux de mouton et des animaux en fibre de verre.

Il aurait demandé à la conseillère Andrée Brûlée, qui est également membre du comité consultatif d’urbanisme (CCU), si elle avait donné un permis à de la «vermine» sur le bord de l’autoroute 20. Il aurait ensuite ajouté «qu’on laisse entrer encore de la vermine», parce qu’il s’intéressait à la question des nuisances.

Des propos qui sont venus aux oreilles du commerçant, Benoit Thibodeau, le lendemain, alors qu’il déjeunait au restaurant Le Madrid. Le propriétaire de Ben Lalen, dont la majeure partie de la clientèle provient du tourisme, venait d’agrandir son commerce après 22 mois de démarches pour l’obtention d’un permis.

L’homme de 64 ans affirme s’être senti comme «un moins que rien» après avoir appris les propos qui lui ont été rapportés par un total de trois personnes. D’autant plus qu’il avait investi 200 000 $ dans son commerce et que le long délai pour l’obtention de son permis l’avait «démoli».

C’est pourquoi il a intenté une poursuite de 10 000 $ en dommages moraux et 2 500 $ en dommages exemplaires pour atteinte à sa réputation, à son honneur et à sa dignité. M. Valois a quant à lui nié sa responsabilité et demandé à ce que les honoraires de ses avocats lui soit remboursé pour «abus de procédure».

Une expression en référence aux nuisances

Lors de son témoignage, Sylvio Valois a fait valoir qu’il n’a pas donné de noms et n’a traité personne de «vermine», mais il a tout de même admis avoir peut-être évoqué le commerce lors de l’assemblée.

Il a toutefois précisé avoir utilisé cette expression comme dicton en référence aux nuisances. Il précise que ce sont les animaux qui étaient appuyés sur la clôture, le long de l’autoroute 20, qui étaient des nuisances, et non l’enseigne du commerce.

Après avoir entendu une dizaine de témoins,  le juge Pierre Labbé a reconnu que les propos visaient le commerce et son propriétaire et qu’ils portent atteinte à son honneur, sa dignité et sa réputation.

Il a toutefois tenu compte que le contexte dans lequel les propos ont été tenus révèle que le mot «vermine» avait le sens d’animal indésirable et nuisible dans l’esprit des personnes présentes.

Le Tribunal conclut également que, connaissant le litige qui a opposé Ben Lalen et la municipalité pour l’obtention d’un permis, M. Valois aurait dû faire preuve de prudence et de retenue dans ses propos.

Comme la preuve n’a pas permis de démontrer que la faute était intentionnelle et que les propos n’avaient pas pour but de nuire au commerçant, mais d’attirer l’attention du conseil sur les nuisances, le juge a accueilli la demande seulement qu’en partie. Il a ainsi condamné Sylvio Valois à payer une somme de 3 000 $ plus les intérêts en dommages moraux.