Une démolition qui dérange

SAINTE-EULALIE.  La démolition du pont d’étagement du rang des Épinettes, qui passait au-dessus de l’autoroute 20, incommode les citoyens qui habitent ou travaillent dans le secteur.

Ce sont principalement les citoyens à l’est de Sainte-Eulalie ainsi que des municipalités limitrophes de Defoy et de Saint-Rosaire, situées au sud de l’autoroute, qui ressentent les impacts de la fermeture suivie de la démolition du pont d’étagement.

Rappelons que la structure du pont d’étagement du rang des Épinettes a été inspectée régulièrement par le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTQ) depuis 2016 et que des travaux ont été réalisés en 2020 afin d’en prolonger la durée de vie. Après une nouvelle inspection, il a été constaté que l’état de la structure était en fin de vie et ne permettait pas des travaux supplémentaires. Le pont a ainsi été fermé à toute circulation de façon préventive le 6 novembre 2024, avant d’être démoli par la suite, dans la nuit du 7 au 8 décembre.

« Pendant la fermeture préventive, les spécialistes ont analysé les scénarios et ont confirmé que la démolition de la structure était requise pour assurer la sécurité des usagers, étant donné l’état de dégradation importante de la structure », indique Roxanne Pellerin, porte-parole régionale MTQ pour la Mauricie et le Centre-du-Québec. « C’est la sécurité qui est primordiale là-dedans », renchérit Gilles Jr Bédard, maire de Sainte-Eulalie.

Mme Pellerin explique que, comme à la suite de toute fermeture préventive, le MTQ est allé à la rencontre de ses partenaires, soient les Municipalités, les services d’urgence, l’Union des producteurs agricoles et les entreprises de transport scolaire pour les aviser de la situation. « On ne peut pas l’annoncer à l’avance quand il est question de sécurité, insiste Mme Pellerin. On agit très rapidement quand on reçoit les résultats et qu’il y a une recommandation. »

Demande de reconstruction

Michel Prince, propriétaire de l’entreprise Antiquités Michel Prince, déplore la démolition du pont d’étagement du rang des Épinettes et estime que le MTQ porte préjudice aux citoyens du secteur, notamment à cause de la rapidité de sa fermeture. « On n’a pas eu le temps de protester ou de s’organiser », lance-t-il. M. Prince est d’ailleurs l’instigateur d’une pétition pour demander la reconstruction du pont d’étagement, papier qui a été signé par près de 300 personnes.

M. Prince n’a toutefois pas déposé la pétition, essoufflé par le travail demandé et découragé face à l’impact réel de ses démarches. Il a cependant transmis ses inquiétudes et celles d’autres citoyens à la Municipalité de Sainte-Eulalie, qui les a elle-même transmises au ministère.

M. Prince croit que le MTQ n’a pas fait son devoir adéquatement dans l’analyse des conséquences de la fermeture de ce pont. Selon lui, l’évaluation du trafic ne s’est pas faite en période achalandée et alors qu’il y avait une interdiction de circulation pour fins de travaux majeurs sur le 6e rang Ouest durant plusieurs mois vers Defoy et Saint-Rosaire, contournant ainsi une part importante des usagers du pont.

Il déplore également que le MTQ n’ait pas pris en compte les entreprises du secteur et les impacts économiques que cela engendrerait sur ces dernières.

« Ça fait préjudice à ma business, parce que mon commerce est situé du côté droit de l’autoroute. La moitié de mes clients viennent de Québec, mais dans la situation actuelle, ils passent devant notre magasin, mais ils ne viennent pas », explique M. Prince, désemparé. Il explique également que le terrain commercial à vendre à côté de son entreprise a perdu de la valeur, plus difficilement accessible que lorsqu’il y avait une sortie à proximité.

En plus de perdre des clients, Michel Prince voit son kilométrage augmenter de manière significative entre sa maison et son travail, séparés par l’autoroute 20. Alors qu’il n’était auparavant qu’à un kilomètre de son travail, il doit désormais emprunter un détour de plus de 10 kilomètres. Il affirme que plusieurs cultivateurs sont dans la même situation, ainsi séparés de leur terre à bois. « Ça dérange les autobus scolaires, les pompiers, les associations de quads », énumère M. Prince, insatisfait de la solution actuelle des chemins de détour.

« Le pont avait 60 ans, ça se peut qu’il ait été endommagé. Ce qu’on n’accepte pas, c’est qu’on nous dit qu’il n’y aura peut-être pas de reconstruction. Ce pont, il est utile et nécessaire », conclut Michel Prince.

De son côté, la Municipalité de Sainte-Eulalie souhaiterait une reconstruction. « Idéalement, on aimerait une reconstruction, mais il faut quand même être logique dans tout ça », avance Gilles Jr Bédard, indiquant que le coût de la reconstruction ne doit pas être disproportionné comparativement aux impacts socio-économiques engendrés par l’absence du pont.

État de la situation

Le ministère des Transports de la Mobilité durable n’a pas encore statué à savoir si le pont d’étagement du rang des Épinettes serait reconstruit ou non.

La décision sera prise à la suite de l’analyse socio-économique en cours. « On va prendre tous les scénarios possibles et tous les éléments liés à ce dossier pour pouvoir prendre une décision, explique Roxanne Pellerin. Le milieu va être rencontré par rapport à cette analyse et l’objectif sera de présenter la démarche, mais aussi recueillir les intérêts de chacun ».

Parmi les données au dossier, on prend en compte le débit journalier moyen annuel (DJMA) de 264 avec 7 % de véhicules lourds.

Le MTQ prendra aussi en compte les résolutions des Municipalités au sujet de la reconstruction de la structure. Tous les points soulevés dans la pétition ont également été portés à l’attention du ministère.

Il n’est pas possible pour le MTQ de s’avancer sur la durée de ces démarches.