Guerre commerciale: près de 1500 producteurs touchés dans la région 

AGRICULTURE. Un fort pourcentage des quelque 1500 fermes productrices de grains du Centre-du-Québec sont actuellement désavantagées par la guerre commerciale avec leurs concurrents américains.

C’est que depuis l’annonce du gouvernement des États-Unis d’une aide spéciale de 12 milliards $ à son secteur agricole, à la fin du mois de juillet, le prix à la tonne du soya a déjà chuté de 70$. «Avant, on était à près de 500$, mais là, on se tient plus près de 400$ par tonne dans le soya», indique Damien Lemire, président régional des Producteurs de grains du Centre-du-Québec.

«Le maïs va sûrement suivre. On n’a pas encore vu les chiffres, mais ça devrait baisser aussi. Le pire, c’est le soya. Parce qu’il y a un marché immense en Chine (60% de la demande mondiale)», continue le président régional des producteurs de grains. «Dans l’orge, l’avoine, le blé, les producteurs seront moins touchés.»

Le maïs et le soya, avec respectivement 430 266 et 129 694 tonnes produites chaque année au Centre-du-Québec, selon les données de 2016, sont effectivement les deux productions les plus importantes dans la région. Ils représentent un peu plus de 90% du tonnage du secteur du grain dans la région.

Au Centre-du-Québec, on estime à plus de 119 000 hectares de terre qui sont dédiés à la production de grains, soit l’équivalent de 220 000 terrains de football. Avec près de 607 000 tonnes de grains de céréales et d’oléagineux, c’est 12% de la production de la province qui se fait dans la région. Il s’agit de la deuxième en importance, derrière la Montérégie.

Les revenus totaux étaient évalués à 172 millions $ annuellement dans la région avant le déclenchement de cette guerre commerciale, en 2018. Le maintien des prix représente un important pan de notre économie.

À cela s’ajoutent des producteurs laitiers, de porcs et de volailles qui sont aussi touchés par la situation étant donné que les grains sont nécessaires pour nourrir leur troupeau avec la moulée. C’est-à-dire ceux qui cultivent leurs propres grains pour nourrir leur bétail. Il y a deux ans, ils étaient 254 dans cette situation, selon ce qu’il nous a été permis d’apprendre.

« Il faut supporter les producteurs pour qu’ils soient capables d’investir de façon régulière. Quand on ne fait pas d’investissements, ça finit par nous rattraper.»

-Damien Lemire

Du retard dans les investissements

Pour le moment, le président régional ne croit pas que la situation puisse mettre en péril cette industrie dans la région. Toutefois, il craint qu’elle devienne moins concurrentielle en devant retarder un certain nombre d’investissements.

«Avec des pertes de revenus, il va falloir ralentir, ou même stopper des investissements comme des silos, des séchoirs et de la machinerie. Parce qu’il y a des gars qui font 2000 âcres dans la région. Ça leur prend un GPS sur le tracteur pour l’autoguidage de la machinerie plus grosse», continue Damien Lemire.

«Il faut supporter les producteurs pour qu’ils soient capables d’investir de façon régulière et être capables de les projeter. Parce que ce sont des investissements assez lourds, mais on ne peut pas les faire avec une baisse de revenus. Quand on ne les fait pas, ça finit par nous rattraper et ça vient ralentir l’entreprise. On devient en retard, moins efficace et on n’est plus capable d’être concurrentiel.»

Une rencontre en haut lieu

La semaine dernière, le président des Producteurs de grains du Québec (PGQ) a rencontré le ministre de l’Agriculture pour demander une réduction du déséquilibre du soutien gouvernemental par rapport à celui des États-Unis, de façon à favoriser la stabilité des revenus des producteurs affectés par la guerre commerciale actuelle.

C’est que selon les prévisions actuelles, entre 2016 et 2018, le soutien de base pour le maïs et le soya sera d’environ 47 $ par hectare au Québec,  soit près de deux fois moins qu’aux États-Unis (80$).

Concernant l’assurance récolte, entre 2010 et 2016, le soutien annuel moyen net s’est établi à 5$ par hectare au Québec, soit près de 11 fois moins qu’aux États-Unis, où il s’établit à 57$ par hectare.

Le PGQ souhaite un programme pour compenser les pertes directes actuelles et une adaptation à plus long terme des programmes pour faire face à une période prolongée de bas prix. Il demande aussi que Québec entreprenne des démarches auprès du fédéral pour obtenir une intervention de sa part.