Les trésors de Léo LeBlanc
SAINT-WENCESLAS. Léo LeBlanc a un coffre aux trésors chez lui. Une boîte à souvenirs qu’il a trimballée et garnie aux quatre coins du pays durant toute sa carrière chez Transports Canada.
Il y a quatre ou cinq ans, il l’a ouverte pour en faire bénéficier la population de Saint-Wenceslas. Il en a sorti une vingtaine d’œuvres d’art inuit que l’on peut encore admirer à la bibliothèque Jeanne-Hébert. Vertèbre et os de baleine sculptés, dessin, sculptures en pierre de savon, défense de morse, ooloo (outil) et blanchon empaillé ne sont que quelques-unes des pièces qui font désormais partie, temporairement, du décor.
Il était heureux d’avoir la chance de les exposer. «De l’art inuit dans une maison par ici, ça fait un peu bizarre, rigole-t-il. Ça ne va pas nécessairement avec le décor. Je préfère que mes pièces soient à la bibliothèque plutôt que bien cachées dans mon coffre au sous-sol! J’en remplace une ou deux à l’occasion. J’ignore combien de temps encore elles seront exposées, mais pour le moment, il n’est pas question de changer l’exposition en cours.»
«Mon travail m’a apporté une belle expérience de vie. Et, bien sûr, c’est grâce à lui si j’ai une si belle collection»- Léo LeBlanc
Il s’agit de la deuxième exposition à être présentée dans la bibliothèque. La première présentait des artefacts de Jeanne Hébert, qui a été responsable de la bibliothèque durant une quarantaine d’années.
Une pièce à la fois
Léo LeBlanc a commencé à collectionner l’art inuit en 1972. À ce moment, il travaillait à Clyde River (Nunavut). «Je faisais de la radiocommunication entre des villages et transmettais des observations météo aux trois heures. Ça se passait en morse. J’ai fait ça pendant 13 mois», raconte le principal intéressé.
Des artistes locaux venaient régulièrement proposer des pièces aux trois «étrangers» qui travaillaient à la station. «Ils étalaient leurs œuvres et on négociait. Avec du recul, je me considère un peu innocent de ne pas en avoir profité plus que ça! Je n’étais pas assez artiste dans l’âme, il faut croire! On m’a offert des pièces que je regrette d’avoir refusées, comme cette fameuse planche de crible en corne de caribou, sur une base d’ivoire. Je l’ai refusée parce que je ne savais pas jouer.»
Malgré tout, il apprécie chacune des pièces qu’il a acquises. Il les a achetées principalement à Clyde River, Inukjuuak, Poste-de-la-Baleine, Iqualuit et Pangnirtung. «Je me suis promené pas mal! En fait, pour être plus précis, j’ai promené ma famille pendant 35 ans!, mentionne ce père de deux enfants. D’ailleurs, ma fille est partie travailler à Inukjuuak l’an passé. Elle y a retrouvé d’anciennes amies. Elle m’envoie des photos régulièrement et j’avoue que ça me rend un peu nostalgique. Ça me rappelle des souvenirs. J’ai vraiment aimé mon expérience nordique.»
Entre deux villages inuit, Léo LeBlanc a aussi travaillé à Sainte-Marthe-du-Cap, Sept-Îles, Québec, Montréal et Ottawa. Une fois la retraite venue et la séparation aidant, il est revenu s’établir dans son village natal en 2008. Depuis, il s’y implique activement, notamment comme conseiller municipal.
«J’en ai vu, du pays!, résume Léo LeBlanc. À Ottawa, j’ai été inspecteur de services de navigation aérienne. J’ai alors commencé à faire des évaluations à travers le pays, de Terre-Neuve à Vancouver. Mon travail m’a apporté une belle expérience de vie. Et, bien sûr, c’est grâce à lui si j’ai une si belle collection.»
Bref, quand il jette un œil à son parcours de vie, Léo LeBlanc semble tout à fait serein. «Je me suis souvent posé cette question: qu’est-ce que je serais devenu si j’étais resté [dans la région]? Il y a tellement de choses que je n’aurais pas pu voir!»