Celle qui ne craint pas la joie: lettre à un pervers narcissique
BÉCANCOUR. SOS violence conjugale, service de première ligne pour les victimes et leurs proches, estime avoir reçu 7 000 appels de plus en 2020-2021 qu’en 2019-2020. Le nombre peut atteindre 200 par jour, alors que la moyenne se situait à 90 en 2019*. L’autrice de Bécancour, Danielle Fournier, ne pouvait imaginer que son récit Celle qui ne craint pas la joie arriverait à un moment aussi opportun, considérant la période de violence inégalée que vivent les femmes depuis le début de la pandémie.
Celle qui ne craint pas la joie est un récit de Danielle Fournier paru à la fin de l’hiver 2021 traitant de la relation toxique d’une femme avec un homme considéré comme pervers narcissique. Rédigé sous forme de lettre, le récit offre au personnage féminin le dénouement que l’on souhaiterait à toute femme vivant de la violence au sein d’une relation. « Mon personnage s’en sort et fait un pied de nez au personnage masculin! », révèle Mme Fournier.
« Le personnage féminin s’en sort très bien; elle retrouve la joie et se débarrasse finalement de cet homme-là. C’est un homme que tout le monde pourrait connaitre. C’est vraiment le cas typique du pervers narcissique, relate Danielle Fournier. Le personnage masculin n’a pas de prénom, d’ailleurs. Il devient une espèce de personnage anonyme qui pourrait être n’importe quel homme ».
Dotée d’une grande sensibilité et d’une grande écoute, Danielle Fournier a écouté les femmes lui parler, lui raconter leur relation amoureuse, bien installées dans des cafés. La Bécancouroise avoue également avoir elle-même vécu une relation « un peu délicate ». « En les écoutant parler, j’ai réalisé que beaucoup d’entre elles avaient vécu ce genre de relation et je me suis dit que je devais absolument en parler », dit-elle.
« Encore hier, j’ai reçu un message d’une dame que je ne connais pas et qui me disait que mon livre lui avait fait le plus grand bien, car elle avait connu ce genre de relation », poursuit Mme Fournier. Il s’agissait d’ailleurs de l’objectif de l’autrice, que les femmes se retrouvent dans son texte, bien qu’il ne s’agisse pas d’un livre thérapeutique, mais bien d’une fiction. « Je suis partie de plusieurs histoires et j’en ai construit une avec toutes ces histoires que j’ai entendues ».
Pour certaines femmes qui vivent au quotidien avec un pervers narcissique, mais ne savent pas comment identifier l’homme qu’elles côtoient, Danielle Fournier explique que le pervers narcissique est tout d’abord un homme excessivement séducteur qui, au fil de la relation, démontrera possessivité et violence verbale.
« Cajoleur et protecteur, il va se présenter comme quelqu’un qui va vous protéger. Tranquillement, sans même que vous vous en rendiez compte, il vous dira que vos amies ne sont pas assez bien pour vous, que vous êtes tellement mieux que tout le monde. Comme vous êtes un peu dans son giron, vous pensez que c’est vrai. Vous vous éloignez tranquillement de vos amis et de votre famille, et la seule personne qui vous reste, c’est lui. Quand vous vous en rendez compte, vous êtes déjà à sa merci et sous l’emprise de son charme. Tout ce qui fait qu’au début vous étiez extraordinaire devient un défaut », explique Danielle Fournier.
« Mon objectif, c’est de toucher quelqu’un »
Danielle Fournier est très sensible aux histoires des gens qui croisent sa route, et c’est pour cette raison que les trois récits sur lesquelles elle travaille actuellement sont inspirés de témoignages qui lui sont livrés.
L’autrice traite dans l’un d’eux de la violence. « Je suis très sensible à la violence et je pense que ce n’est pas que les hommes qui peuvent être violents, les femmes aussi peuvent l’être », mentionne Mme Fournier qui ne veut pas trop en révéler sur ses écrits, car elle est toujours en période de réflexion.
Dans une autre de ses œuvres en chantier, elle raconte l’histoire d’un homme mourant et de sa relation avec la femme qu’il aime. « J’avais des amis qui étaient un couple très uni et l’homme était mourant, et j’ai accompagné cet homme-là pendant un bon moment. Il avait une très belle relation avec sa compagne et j’avais envie de parler d’eux. Encore une fois, c’est mon point de départ qui se tisse avec les histoires d’autres personnes que j’ai connues qui sont mortes ou qui sont mourantes », poursuit Mme Fournier.
« Je parle de ce que je connais. Ce que je connais, c’est ce que je vis, ce que je ressens, ce que les gens me racontent, ce que je vois, ce que j’entends et ce que je lis. Mes récits sont toujours plusieurs histoires qui se tissent les unes aux autres mais qui, en fin de compte, vont vers une même destinée », conclut l’autrice.
*Source: site web du Conseil du statut de la femme.