« Je ne devrais pas être ici aujourd’hui »

RÉGIONAL. L’entrepreneur Frédéric Tremblay estime avoir droit à une deuxième chance. Victime d’un arrêt cardiaque le matin de son 54e anniversaire il y a un peu plus d’un an et demi, les paramédics dépêchés chez lui ont d’abord cru qu’il était décédé malgré les manœuvres de réanimation pratiquées par son épouse en attendant les secours.

« Ça s’est produit au réveil. J’avais eu un malaise dans la nuit, mais c’était une douleur que je connaissais parce qu’on m’avait diagnostiqué des spasmes œsophagiens six ou sept ans plus tôt, qui n’en étaient pas, et on m’avait donné une médication. J’ai pris des antiacides en me disant que ça allait passer, mais à un moment donné, j’ai tapé sur l’épaule de ma blonde et je lui ai dit que je ne filais vraiment pas bien. »

C’est à ce moment qu’il perd conscience.

« À partir de là, l’histoire m’est contée. Le cœur était en déficience du côté gauche. Je suis en insuffisance cardiaque. Le centre et l’artère droite sont bloqués à 95 % et un caillot a bloqué le côté gauche. Là, le cœur a dit: j’arrête. Ma femme, Fabiola, a pratiqué sur moi la RCR. Elle m’a fait un massage cardiaque pendant une dizaine de minutes pour me garder en vie le temps que l’ambulance arrive. »

Celle qui a grandement contribué à sauver la vie de son mari le 4 juin 2023, la chanteuse et chroniqueuse culturelle Fabiola Toupin, agit comme porte-parole de la quatrième édition de « Marcher pour la cause » qu’organise l’Association des cardiaques de la Mauricie à l’Île Saint-Quentin le 8 février prochain.

« J’ai dû réanimer mon conjoint. Il a fait, à côté de moi, une crise cardiaque sans appel si je n’avais pas été capable de répondre positivement aux directives que le 911 m’a donné et si nous n’avions pas été si près de l’hôpital. Les paramédics sont arrivés rapidement et c’est avec le défibrillateur qu’on a réussi à le ramener, sinon je serais veuve aujourd’hui. »

Ce qui bouleverse Frédéric encore aujourd’hui, c’est que ce triste épisode s’est déroulé en présence de sa famille et de ses amis qui avaient dormi à la maison en prévision de sa fête d’anniversaire, notamment sa mère, qui ont assisté à la scène, impuissants.

« Quand les ambulanciers sont arrivés, ils ont dit à ma femme qu’ils m’avaient perdu. Ils ont entrepris de défibriller et d’essayer de me réanimer. Ç’a fonctionné, à la grande surprise des ambulanciers et de tout le monde. »

Le moment où il reprend conscience est flou. On lui pose une série de questions auxquelles il répond bien.

« Dix minutes, c’est extrêmement long. On pensait que le cerveau aurait probablement un début d’atteinte. Il y avait une chance sur 500 que je n’aie pas de séquelles neuropsychologiques. On m’a amené d’urgence à l’hôpital. On habite tout près. Le trajet a duré une minute. On m’a amené en salle d’opération en me disant que j’avais fait une crise cardiaque. On a débloqué le côté gauche de mon cœur. »

Pendant les quelques semaines où Frédéric demeure aux soins intensifs, on découvre que six ou sept ans auparavant, il avait fait un premier infarctus sans le savoir.

« Mon système d’artères était bloqué du côté gauche puis il s’était créé un bypass naturel pour alimenter le cœur parce que l’infarctus s’est produit graduellement. Ça s’est résorbé, le corps étant spécial et fort, mais le centre et le côté droit étaient bloqués à 95 %. J’avais passé plusieurs tests, mais on n’avait rien décelé. On m’avait dit que mon cœur était en pleine forme, puis on avait fini par un diagnostic de spasmes œsophagiens. »

Ce qui a aidé la réhabilitation de Frédéric, c’est qu’il avait repris sa santé en main en 2019.

« J’étais revenu à mon poids santé. Je marchais, je faisais de la randonnée, j’étais quand même assez actif. Comme je ne fumais pas, que j’étais en forme et encore jeune, le médecin a proposé un déblocage de l’artère gauche. »

Voulant mettre toutes les chances de son côté, Frédéric s’est procuré une montre qui surveille son activité cardiaque ainsi que trois défibrillateurs pour la maison et ses principaux lieux de travail.

La convalescence n’a pas été facile. Mis au repos forcé pendant trois mois, c’est une dépression qui l’atteint ensuite.

« Je n’avais jamais fait ça, une dépression. Je suis un entrepreneur, capable de travailler 80 heures par semaine, un gars sur qui le stress coule comme sur le dos d’un canard. On finit par se convaincre de ça mais le stress m’affectait. J’ai pris des antidépresseurs qui m’ont complètement éteint. Ça m’a permis de me rebâtir, mais ce n’était pas moi. Ç’a été beaucoup plus difficile psychologiquement que physiquement toute cette histoire-là. »

Près d’un an après l’arrêt cardiaque, il peut cesser les antidépresseurs et recommencer à voir les beaux côtés de la vie.

« J’ai réussi à retrouver un nouvel équilibre de vie où le travail n’est pas tout. Aujourd’hui, je considère tout ça comme un cadeau. Un cadeau mal emballé, mais un cadeau pareil, parce que je ne devrais pas être ici aujourd’hui. »

L’activité physique fait partie de la vie de famille. Ses deux garçons de 11 et 13 ans sont très sportifs.

« Mon plus grand, Benjamin, fait des sélections pour les Jeux du Québec en soccer. Il fait du sport-études en soccer. Mon plus jeune, Émile, son sport, c’est le karaté. Il a fini troisième au monde dans sa catégorie de poids en combat à Albufeira, au Portugal. Il s’entraîne avec l’équipe canadienne. »

Parions que les Tremblay-Toupin participeront à la marche de l’Association des cardiaques de la Mauricie le samedi 8 février à l’Île Saint-Quentin.

« Une bonne marche avec l’air frais de l’hiver, ça ravigote. »