La préservation du frêne noir sur le territoire waban-aki

ODANAK.  Depuis trois ans, le Bureau du Ndakina du Grand conseil de la Nation Waban-Aki (GCNWA) procède à l’inventaire des frênes noirs présents dans le Ndakina, le territoire ancestral abénakis. Dans un objectif de protection de cet arbre menacé par l’agrile du frêne, le Grand conseil a fait appel à Donnie McPhee, coordonnateur du Programme de collecte de semences autochtones de Ressources naturelles Canada.

Le frêne noir revêt une importance culturelle, spirituelle et économique pour la communauté abénakise. « Le frêne noir est une espèce emblématique, car les Abénakis ont été créés à partir du frêne noir. Le frêne noir est également important d’un point de vue social et économique avec toute la transmission intergénérationnelle de certains savoirs qui y sont liés, notamment la vannerie, une industrie qui est toujours très forte et importante », explique Nicolas Pinceloup, agent de projets en adaptation aux changements climatiques pour le Bureau du Ndakina.

Dans les projets du Bureau du Ndakina, en plus de référencer les peuplements à portée des communautés d’Odanak et de Wôlinak, on souhaite déterminer l’état de santé de ces frênes ainsi que leur potentiel pour la vannerie, le tout dans un contexte de diminution des ressources. « On fait face à une restriction de l’usage du frêne noir dans les communautés à cause de sa potentielle inscription à la liste des espèces menacées de la Loi sur les espèces en péril, mais aussi à cause de la disparition des peuplements causée par l’agrile du frêne, les changements climatiques et l’augmentation de l’utilisation du territoire », plaide M. Pinceloup.

17 000 kilomètres pour récolter des semences

À l’été 2022, Donnie McPhee a passé trois mois sur la route et a parcouru plus de 17 000 kilomètres afin de rencontrer 40 communautés autochtones, donc celle d’Odanak et de Wôlinak. L’objectif de M. McPhee est d’offrir une formation pratique de collecte de semences d’arbres et d’arbustes afin d’aider les communautés à élaborer leurs propres stratégies de collecte de semences.

Le GCNWA a vu dans ce programme l’occasion pour sa communauté d’apprendre à planifier et prévoir les récoltes de semences, sélectionner les arbres desquels collecter et quand collecter, avec pour objectif de conserver ces semences pour le futur. « Il y a des communautés qui possèdent déjà beaucoup de connaissances quant à la collecte, le nettoyage et l’entreposage, mais aussi beaucoup de communautés qui ont l’intérêt, mais pas les connaissances », explique la porte-parole francophone de M. McPhee, Lucie Lavoie.

« Dans une perspective de résilience face aux changements climatiques, on a besoin de conserver beaucoup de semences de différentes plantes, que ce soit arbres, arbustes et herbacés. On fait ça avec l’objectif de trouver des frênes noirs résistants à l’agrile du frêne. On veut développer une banque de semences pour pouvoir faire la sélection d’individus résistants et, par la suite, faire des croisements simples pour créer des lignées résistantes », révèle Nicolas Pinceloup.

La rencontre entre les représentants du GCNWA et Donnie McPhee s’est déroulée en août dernier, dans le secteur d’Odanak. M. Pinceloup mentionne que la rencontre a répondu aux attentes du Grand conseil. Cependant, l’été 2022 n’a pas été une bonne année pour la récolte de semences. « Il faut savoir que le frêne noir a des cycles de production de semences qui varie entre 7 et 9 ans, et en ce moment, on n’est pas dans une bonne phase pour la région dans laquelle on l’étudie. Tout ce qui nous manque, c’est une grosse année de production de semences », explique celui qui espère que l’automne prochain sera une période favorable.

Le Programme de collecte de semences autochtones de Ressources naturelles Canada en est à ses tout débuts et est en constante évolution. Bien plus qu’une formation, Donnie McPhee échange avec les représentants des communautés des Premières Nations afin de créer une formation adaptée aux besoins et demandes de chacune d’entre elles. « C’est un échange de connaissances, un programme qu’on veut codévelopper avec les communautés autochtones », souligne Lucie Lavoie.