De l’Arizona à Gentilly au temps de la COVID-19

CORONAVIRUS. Elle aurait pu le chanter, elle a une très jolie voix et elle enseigne la musique, mais Audrey Nadeau a plutôt accepté de se confier sur son retour de voyage au Courrier Sud. En compagnie de son conjoint Simon Daoust, elle vivait, il y a à peine quelques jours, un voyage au nord de l’Arizona. C’était avant la crise mondiale de la COVID-19. Heureusement, en isolement, le couple est de retour à Gentilly.

Simon, Audrey et un de leurs enfants.

«À notre départ, aucune restriction de voyage aux États-Unis n’avait été émise. J’avais pris le temps de demander conseil auprès de notre transporteur et nos assureurs. Tous nous disaient qu’il n’y avait pas de raison, à ce moment, d’annuler notre voyage. Heureusement, nous étions dans de vastes espaces avec peu ou pas de contacts humains. On était par contre vraiment stressés par tout ce qu’on nous rapportait sur la situation d’urgence qui s’était mise en place au Québec», rapporte Audrey qui, sur place, va se mettre à la recherche assidument sur les mesures à prendre.

«J’ai tenté de devancer notre retour en changeant nos billets d’avion, mais malheureusement, la procédure en ligne m’en empêchait. Nous devions contacter directement Air Canada et bien sûr, les lignes étant tellement surchargées. La compagnie était même dans l’impossibilité de nous mettre en attente! On ne pouvait parler à personne! Assurances, CAA, Air Canada…rien! Tous les vols de retour qui nous permettaient de revenir en avance impliquaient des escales dans les plus grands aéroports des États-Unis», explique-t-elle.

En désespoir de cause, elle contactera un agent de voyage du coin qui, malgré qu’Audrey et Simon n’étaient pas ses clients, a accepté de les écouter et, surtout, de les conseiller. «Je repense à mon esprit qui s’est soudainement apaisé après lui avoir parlé et je le remercie énormément. Le mieux pour nous était d’attendre notre vol direct et de rester dans la région éloignée et isolée où on se trouvait», ajoute-t-elle.

«Le plus dur à gérer là-bas a été l’opinion des gens, ceux sur qui on pensait pouvoir compter. Ils ont été les premiers à nous juger à la place de nous aider. On a reçu du soutien de gens envers lesquels on n’avait par contre, aucune attente. On voit le vrai visage des gens en temps de crise», confie Audrey.

Pour ce qui est de l’ambiance dans les aéroports, tant à Phoenix qu’à Montréal, on n’était pas, on le devine, dans la réjouissance. «Beaucoup de personnes âgées devant revenir au pays plus tôt, elles étaient toutes très stressées. Les gens prenaient au sérieux les recommandations de distance entre eux, ainsi que les consignes de lavage des mains. Du temps que j’y ai été, je n’ai vu personne qui avait l’air de «s’en foutre»! Mais aussitôt que quelqu’un toussait ou portait un masque, tout le monde devenait méfiant», souligne-t-elle en précisant que l’arrivée à l’aéroport de Montréal a été un grand soulagement.

«Avant les douanes, on nous a remis un premier feuillet explicatif sur les symptômes du COVID-19, ainsi que nos obligations de voyageurs concernant la quarantaine. Aux bornes libre-service des douanes, nous devions faire une attestation où on jurait solennellement que nous allions nous mettre en quarantaine pour une période de 14 jours. Plusieurs questions sur d’éventuels symptômes sont également posées.  Ensuite, on rencontre un douanier qui nous repose les mêmes questions, s’informe sur notre état de santé et nous rappelle qu’on doit observer un isolement de 14 jours. Une troisième station est en place, celle-ci probablement par la fameuse équipe de la mairesse de Montréal. On nous redonne le même document reçu avant les douanes, on nous questionne encore sur notre état de santé, et on nous demande encore de se mettre en quarantaine. Ici, j’ai trouvé que c’était totalement inutile. Le seul effet provoqué était de recréer une situation de promiscuité entre les voyageurs», s’exclame celle qui avait en tête de rejoindre sa campagne et s’y isoler, le temps qu’il faudra.

«Nous, on est les privilégiés dans cette situation maintenant qu’on a regagné notre maison. Nous avons une ferme et y produisons la grande majorité de ce que nous consommons: bœuf, porc, poulet, œufs, lait, fromage! Nous avons encore une bonne réserve de fruits et légumes qui sont congelés, cannés ou séchés. Nous sommes dans un rang, passablement éloignés de contacts étroits. Ma belle-mère s’est occupée de nous approvisionner en farine. Le reste, on a tout ce qu’il faut sous la main pour tenir plusieurs mois s’il le faut! Nos enfants peuvent profiter des grands espaces tout autour, sans se sentir confinés dans la maison. Vraiment, on se sent chanceux et surtout, notre choix de vie prend aujourd’hui tout son sens!», conclut philosophiquement Audrey Nadeau.