Un petit bonheur par jour

NICOLET. « Trouve-toi un petit bonheur par jour ». Depuis neuf ans, cette phrase est le leitmotiv de Mélanie Roy. Elle lui a servi de phare dans la tempête, lorsque sa fille a commis l’irréparable, et elle l’aide encore à apaiser son quotidien.

Ann-Clara Désilets s’est suicidée le 29 septembre 2013. Dans les heures suivant son geste, l’équipe du Centre de prévention suicide Les Deux Rives (aujourd’hui Accalmie) a contacté Mélanie, son conjoint (Dany Désilets) et leur autre fille (Élisabeth) pour leur offrir du soutien et les aider à encaisser le choc.

Pendant un certain temps, le contact entre la famille et le Centre a été quotidien. « Ils appelaient à chaque jour pour savoir comment on allait et si on avait besoin de [ressources supplémentaires]. Si on avait besoin de parler, on pouvait les appeler en tout temps. Ils ont été d’une grande écoute. »

C’est une intervenante du centre qui a formulé à la famille la recommandation de se trouver un bonheur quotidien pour cheminer dans le deuil. « C’est le plus beau conseil qu’on m’ait donné. Pendant longtemps, le bonheur a été très dur à trouver dans une journée… Tout était une épreuve, tout était lourd. Il fallait faire un effort conscient pour identifier les belles choses apportant du bonheur: l’appel d’un ami, la visite d’une personne de la famille, prendre un bain avec chandelles… », relate Mélanie.

Heureusement, la famille était bien entourée: « On a reçu une belle dose d’amour ». Des amis, des membres de la famille et des gens qu’ils connaissaient moins se sont mobilisés pour soutenir les endeuillés dans leur douloureuse épreuve: « On nous a fourni des repas complets, des gens sont venus arranger nos arbustes; c’était tellement beau! J’avais l’impression de participer à l’émission Donnez au suivant! Plein de monde a contribué. C’était vraiment touchant ».

Un legs

Au moment du décès d’Ann-Clara, le Nicolétain Alain Guilbert était à la tête de la Fondation du Centre de prévention suicide Les Deux Rives. Son mandat était de recueillir des fonds pour soutenir les activités du centre. Sensible à ce qui venait de se passer près de chez lui, il a contacté les patrons de Mélanie à l’époque (Martin Côté et Christine Léger, alors propriétaires du Jean Coutu de Nicolet), pour discuter de la situation. De cette approche sont nées, par la suite, les bases de la Course Esprit-Sain, qui vise à mobiliser la population autour de la prévention du suicide.

« Un comité de 6-7 personnes a été formé. La première édition a eu lieu en octobre 2014. J’étais impliquée, mais pas autant que je le suis maintenant; c’était trop proche de moi », raconte Mélanie.

Les six premières éditions ont permis de remettre plus de 110 000$ à la Fondation Prévention du suicide Accalmie et 30 500$ répartis entre la Maison de la famille Lu-Nid et des écoles primaires et secondaires de la région.

La pandémie a forcé la mise sur pause de l’événement durant deux ans (2020 et 2021). C’était toutefois important pour Mélanie qu’il soit de retour en 2022 pour une septième édition: « Les deux dernières années ont été difficiles pour plusieurs personnes, notamment du point de vue de la santé mentale. La pandémie a grandement contribué à l’isolement et à la détresse psychologique. Le besoin est là, et il faut absolument poursuivre nos actions en appui à la prévention du suicide et à la sensibilisation aux saines habitudes de vie », exprime-t-elle.

Un nouveau comité a donc été formé pour relancer l’événement, qui avait attiré en 2019 pas moins de 1250 personnes.

Bonheur automnal

Les inscriptions pour cette septième édition sont en cours. Elles se font en ligne sur le site de sportchrono.com (section Inscriptions). L’événement a lieu le 23 octobre prochain. Il propose cinq distances de course ou de marche (1, 3, 5, 10 et 21,1 km). Le coût d’inscription est de 35$ par adulte et de 5$ par enfant de 17 ans et moins jusqu’au 1er octobre (45$ et 10$, du 2 au 20 octobre).

« Grâce aux dons des commanditaires qui couvrent les frais de l’événement, le coût de chaque inscription est entièrement remis aux organismes bénéficiaires », précise Mélanie, qui souhaite une participation massive, cette année encore.

Le départ a lieu à l’arrière de l’Hôtel Montfort, où se trouve une arche. C’est aussi à cet endroit où, chaque année depuis la création de l’événement, un arbre est planté à la mémoire d’une personne qui s’est suicidée. « Malheureusement, il y en a toujours. Cette année, deux noms seront inscrits sur l’arbre qui sera planté. »

Le parcours mettra en valeur les couleurs d’automne, que ce soit sur le terrain même de l’Hôtel Montfort, ou encore dans la réserve naturelle du Boisé-du-Séminaire ou dans le Boisé Saint-Michel, selon la distance choisie. « C’est vraiment beau! », souligne Mélanie.

Plus d’une centaine de bénévoles accompagnera le comité sur le terrain la fin de semaine de l’événement, que ce soit pour préparer le site, remettre les dossards, indiquer le parcours ou encore encourager et ravitailler les participants, entre autres. À ce propos, d’ailleurs, Mélanie Roy souligne que ce sont des verres réutilisables qui serviront au ravitaillement. Les gens pourront les lancer dans une petite piscine, une fois ravitaillés. Par la suite, les verres seront lavés et réutilisés l’année suivante.

Cette course, c’est un peu le bonheur automnal de Mélanie Roy, même si elle représente beaucoup de travail. « Ann-Clara courait souvent avec son père. Moi, j’ai commencé à courir un an après son décès. Mentalement, ça m’a fait du bien. »

C’est ce qu’elle souhaite à tous les participants. Et si la course à pied devenait leur petit bonheur quotidien?

Tu es dans un creux de vague ou tu t’inquiètes pour quelqu’un? Compose le 1-866-277-3553 (APPELLE).