Une première au monde à Gentilly

DÉCLASSEMENT. C’est un peu le même sentiment que les premiers hommes qui ont marché sur la lune qu’ont vécu les travailleurs depuis l’arrêt du réacteur. C’est que personne avant eux n’avait réalisé cette opération, qui est une première au monde.

Si d’autres déclassements ont déjà eu cours, jamais ça n’avait été le cas avec le réacteur CANDU 6 qu’utilisait Gentilly-2. Même de Gentilly-1, qui avait été en exploitation que quelques mois, il y avait très peu de retour d’expérience qui pouvait être utile au personnel.

«Il y avait quelques expériences dont on pouvait tirer profit, mais pas totalement, explique Donald Olivier, le directeur des installations de Gentilly-2. Comme je dis souvent, Gentilly-2 est comme un entonnoir, alors c’est un peu différent. Il y avait aussi des enjeux importants en termes de ressources, d’expertise et de relations de travail.»

L’expérience de Gentilly-2 est d’ailleurs suivie de près dans le monde du nucléaire, surtout au Canada, mais également en Argentine, en Corée du Sud ou dans les autres pays où des réacteurs CANDU ont été vendus par le Canada.

Puisque d’autres auront à suivre la même démarche un jour ou l’autre, des suivis se font régulièrement pour partager l’expérience acquise avec les autres exploitants des centrales utilisant la même technologie.

Il y a beaucoup d’intérêt du côté de Pickering, en Ontario, qui devra commencer le processus d’ici cinq ans. Le tout peut aussi servir à Point Lepreau, au Nouveau-Brunswick: une centrale jumelle à Gentilly-2, qui a pour sa part complété sa réfection en 2012.

Un travail de moine

Si plusieurs activités étaient réalisées pour la premières fois, le tout n’a pas rencontré de problématique importante. Des inspections de la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) ont lieu régulièrement, et ce, sans avertissement, et aucune anomalie n’a été déclaré depuis le début du processus.

Donald Olivier, directeur des installations de Gentilly-2.

Les étapes se déroulent rondement et selon l’échéancier prévu. Après avoir procédé à la phase de stabilisation, en 2013-2014, pour retirer le combustible irradié et l’entreposer dans une piscine de stockage, Hydro-Québec est passé à la deuxième phase, entre 2015 et 2020.

Au cours de la préparation à la dormance, ce sont 6 000 grappes qui auront été transférées de la piscine vers l’aire de stockage à sec. Au printemps 2016, deux nouveaux modules CANSTOR ont d’ailleurs été construits, puis mis en service pour compléter l’entreposage: un investissement de 12 millions $.

Des 200 systèmes qui servaient aux opérations de Gentilly-2, seulement 30% d’entre eux demeureront actifs d’ici la fin de 2020 pour assurer le refroidissement du combustible en piscine.

Le tout sera ensuite mis en dormance et ce n’est qu’à partir de 2059 qu’on procédera aux étapes menant au démantèlement des équipements. Une période d’une quarantaine d’années au cours de laquelle le temps aura permis de diminuer la contamination liée à la radioactivité.

Comme le processus est prévu pour s’échelonner sur une aussi longue période, le tout est mené avec minutie et chacune des opérations se doit d’être consignée. Une rigueur qui est impérative par souci de sûreté, de sécurité, autant pour les travailleurs, la population et l’environnement.

«C’est important pour que les travailleurs qui reprendront ce que nous avons, dans 35 ans, savent ce que nous avons fait, explique Donald Olivier, le directeur des installations de Gentilly-2. Documenter et laisser des traces est une préoccupation majeure.»

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