Les élus municipaux se font malmener

NICOLET-YAMASKA. La région a perdu deux maires en trois mois. Celui de Saint-Léonard-d’Aston a démissionné en août dernier, tandis que celui de Pierreville a annoncé son départ pour décembre, à plus ou moins un an des élections municipales.

Personne n’a levé la main pour remplacer Jean-Guy Doucet au terme du processus officiel de mise en candidature pour l’élection partielle à Saint-Léonard-d’Aston. Dans le cas de Pierreville, il n’y aura pas de processus du genre pour le successeur d’Éric Descheneaux puisque sa démission survient moins d’un an avant la prochaine élection générale.

Le premier a évoqué un bris du lien de confiance avec les conseillers municipaux et la directrice générale pour justifier son départ, affirmant vouloir préserver son intégrité et sa santé. «Je ne peux plus ramer à contre-courant», avait confié M. Doucet, déplorant que le conseil ait profité du fait qu’il soit en vacances en Gaspésie pour tenir une séance extraordinaire afin de renverser l’une de ses décisions.

Le deuxième en a tout simplement eu assez d’être constamment la cible de médisances, de méchanceté et même de menaces sur la place publique. «Il y a des limites à ce qu’une personne peut endurer mentalement et physiquement», a adressé celui qui croyait que Pierreville était un «milieu inclusif et ouvert», pour avoir élu un maire ouvertement homosexuel en 2017. Finalement, les préjugés ont rattrapé M. Descheneaux.

Geneviève Dubois, mairesse de Nicolet et préfète de la MRC de Nicolet-Yamaska, a vu de près les ravages causés par les manigances et le manque de respect flagrant dont ont été victimes ses deux collègues du Conseil des maires. «Il y a un mépris général des élus à l’heure actuelle», se désole-t-elle.

Elle ajoute que le climat de tension semble s’accentuer depuis le début de la pandémie. «À la demande de la Santé publique, on est parfois obligé de prendre des décisions qui ne plaisent pas. Cela génère une foule de commentaires déplacés et irrespectueux. C’est dommage.»

Elle estime que les élus ont fait un travail remarquable au cours des derniers mois, au même titre que le personnel soignant ou les professeurs, par exemples: «Tout a continué normalement: vos poubelles ont été ramassées, vos rues ont été déneigées, etc. Oui, on a dû fermer des infrastructures et réajuster des choses, mais on a constamment été sur le terrain. Les élus ont été extraordinaires pendant la pandémie, mais là, ils sont fatigués et en plus, ils se font invectiver. C’est désolant.»

«Ce n’est pas attrayant de faire de la politique en ce moment», poursuit-elle, déplorant que les élus ne reçoivent pas de soutien direct de la part du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH) ou de l’Union des municipalités du Québec. «Il y aurait peut-être des aspects un peu plus législatifs à regarder [pour faire changer les choses].»

Geneviève Dubois ajoute que des maires lui ont déjà confié vouloir quitter au terme du présent mandat, notamment en raison de la charge de travail exigée pour le maigre revenu supplémentaire que cela leur apporte. «J’ai des collègues qui gagnent 4 000$, 8 000$ ou 13 000$ par année. C’est très peu pour subir le mépris des gens [alors qu’ils travaillent sans compter leurs heures]. Il faut revaloriser le rôle d’élu. Il faut aussi nous outiller pour nous aider à nous protéger. Bref, un changement s’impose si l’on veut une qualité d’élus aux prochaines élections.»