Avancer contre vents et marées

NICOLET. Pendant 20 ans, la Nicolétaine d’origine Yolaine Champagne a exercé la profession de thérapeute en réadaptation physique dans la région du grand Montréal. Un emploi qu’elle aimait énormément. Mais en 2015, à 41 ans, le ciel lui est tombé sur la tête: « J’ai eu besoin d’une chirurgie à la colonne cervicale. Mais, parce qu’on ignorait que je souffrais d’un trouble du tissu conjonctif, la chirurgie m’a laissé des séquelles permanentes », raconte celle qui est atteinte du syndrome Ehlers Danlos et qui souffre d’instabilité cervicale.

Son corps est désormais intolérant à la gravité. « Je dois souvent m’allonger ». En raison de sa nouvelle condition de santé, elle a dû faire le deuil de son emploi et de sa vie d’avant. 

« Je me suis demandé quel travail je pourrais bien faire en étant couchée devant mon ordinateur portable », mentionne Mme Champagne, qui utilise, par la force des choses, de l’équipement adapté.

Durant sa réflexion, elle s’est attelée à terminer la rédaction d’un roman original commencé avant sa chirurgie (Oneida, l’éveil des secrets). L’exercice lui a plu, car elle pouvait ainsi travailler à son rythme, en respectant les limites de sa condition.

Puis, elle a décidé de s’auto-publier plutôt que de faire affaire avec une maison d’édition. «[Cela me permet] d’écrire sans pression ni échéancier», explique-t-elle. «Ma tête est envahie d’un perpétuel brouillard et tout me distrait facilement, ce qui fait que je travaille plus lentement. En plus, ma condition physique est variable et souvent imprévisible», ajoute-t-elle.

Il lui est donc difficile de se présenter à des salons ou autres événements pour faire la promotion de ses romans, comme l’exigeraient certaines maisons d’édition. Mais qu’importe: elle apprécie la liberté que lui apporte sa décision. «On ne m’impose rien. Et maintenant que je vis au jour le jour, avec l’impression d’avoir une épée de Damoclès en permanence au-dessus de ma tête, si mon roman est prêt à être publié, je veux qu’il le soit le plus vite possible, pas dans un an!».

 Pour l’épauler, elle peut notamment compter sur deux fidèles bêta-lectrices (Fabienne et Maxine) et sur une correctrice. «D’autres m’aident parfois quand j’ai besoin d’une relecture additionnelle et je les remercie de tout mon cœur».

Graphiste

En choisissant de s’auto-publier, Yolaine Champagne a également eu le bonheur de pouvoir ajouter une autre corde à son arc : le graphisme. C’est elle qui produit les pages couvertures et le montage de ses romans : «Ça me rend fière parce qu’au final, le livre me ressemble vraiment!», dit-elle.

En 2017, une artiste digitale lui a enseigné le photomontage. De 2018 à 2020, elle a suivi un grand nombre de cours en ligne et de tutoriels à propos de différents aspects de l’art digital. En 2021, elle a aussi commencé à apprendre le digital painting. Elle réalise maintenant quelques contrats sur demande, tout en peaufinant au quotidien son art et son style. 

Yolaine Champagne a, à ce jour, six romans à son actif : la trilogie Oneida, le livre L’amour contre un rêve et le récit, en deux tomes, d’Éoline, fille du vent. Il s’agit de romances. «C’est un genre littéraire très populaire. Pour chacune de mes histoires, je cherche toujours une touche d’originalité. J’y intègre bien souvent une intrigue principale autre que la romance elle-même», décrit-elle. 

Ses livres sont en vente sur Amazon, la seule plateforme, dit-elle, qui lui permet d’éditer ses romans et qui lui paie des redevances chaque mois. « Ce petit revenu régulier m’aide à m’acheter quelques trucs nécessaires à ma condition. Amazon allège aussi mes tâches, puisqu’il se charge de vendre, imprimer et expédier mes romans », souligne celle dont les livres sont aussi accessibles aux abonnés Kindle.

L’espoir d’un traitement

Son alliance avec Amazon simplifie beaucoup de choses pour elle, en plus de la libérer d’un certain stress, notamment financier.

« Étant atteinte d’un trouble permanent rare, je n’ai droit à rien. Ni aide financière, ni soins dispendieux remboursés », regrette Mme Champagne, qui se considère comme une orpheline du système de santé pour lequel, ironiquement, elle a consacré 20 ans de sa vie professionnelle. 

Elle a déployé beaucoup d’efforts depuis 2015 en vue d’obtenir un traitement de médecine régénérative disponible aux États-Unis, notamment. Or, elle s’est butée à plusieurs obstacles en cours de route. Ce traitement se serait traduit par l’injection de cellules souches dans les ligaments de son cou afin de les raffermir et amoindrir, voire régler, son instabilité cervicale.

« En une à trois séances, j’aurais pu retrouver ma vie d’avant. Mais je crois qu’il est maintenant trop tard pour y avoir recours. Je crains que ma condition se soit détériorée au point de ne plus pouvoir contourner une chirurgie », dit-elle.

Subir une autre chirurgie est la dernière chose qu’elle souhaite, étant donné que la première lui a laissé un cadeau empoisonné. Mais compte tenu de la situation, elle est prête à y consentir. « Si un neurochirurgien d’ici est intéressé à m’aider en tenant compte de mes particularités et qu’il accepte de s’informer auprès des experts mondiaux, je suis prête à mettre ma vie entre ses mains. Alors si jamais un de ces professionnels lit ces lignes et que le défi l’intéresse, qu’il me contacte! C’est avec grand plaisir que je lui répondrai! », termine-t-elle.